Israël en guerre - Jour 432

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Des réactions pro-israéliennes face à l’attentat ne signifient pas un soutien soudain

La communauté internationale ne condamne plus seulement le massacre, mais aussi les discours palestiniens de haine ; or, la pression sur Israël continuera comme prévu

Raphael Ahren est le correspondant diplomatique du Times of Israël

Les forces de sécurité israéliennes sur les lieux d'un attentat terroriste au marché Sarona de Tel Aviv, le 8 juin 2016. (Crédit photo: Gili Yaari/Flash90)
Les forces de sécurité israéliennes sur les lieux d'un attentat terroriste au marché Sarona de Tel Aviv, le 8 juin 2016. (Crédit photo: Gili Yaari/Flash90)

Dans leurs communiqués concernant l’attentat meurtrier de mercredi à Tel-Aviv, les dirigeants de plusieurs pays se sont abstenus de reprendre leur refrain habituel demandant dans le même souffle aux Israéliens et aux Palestiniens de faire preuve de « retenue » et de reprendre les pourparlers de paix. Ils se sont limités au contraire à de fermes condamnations de l’attaque et, dans certains cas, ont même dénoncé le Hamas pour avoir célébré le carnage et ont appelé à mettre fin à la propagande anti-juive qui est vue comme l’ayant inspiré.

Cependant, plutôt qu’un changement dans l’attitude du monde vis-à-vis du conflit israélo-palestinien, il semble que ce ton sensiblement différent de la voix de la communauté internationale soit uniquement une question de sémantique.

Par conséquent, on peut s’attendre à ce que la pression sur Israël pour la mise en œuvre d’une solution à 2 Etats reprendra peu de temps après que les titres sur cette attaque aient disparu des Unes, et même s’intensifiera probablement de façon spectaculaire dans les semaines et les mois à venir.

Le changement de style dans les condamnations suite à l’attaque est cependant indéniable, comme le montre une comparaison rapide.

Après un massacre en novembre 2014 contre une synagogue dans le quartier de Har Nof à Jérusalem, au cours duquel 4 Juifs et un policier druze ont été tués et plusieurs personnes blessées, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon avait dénoncé toutes les formes de terrorisme et avait ensuite appelé les deux parties « au leadership politique et au courage pour prendre des mesures afin de remédier à la situation très tendue » dans la capitale d’Israël.

« Toutes les parties doivent éviter d’utiliser la rhétorique provocatrice qui ne fait qu’encourager les éléments extrémistes », avait déclaré Ban. Il a ensuite invoqué « l’impératif pour les dirigeants des deux parties de prendre des décisions difficiles qui favorisent la stabilité et assurent la sécurité à long terme pour les Israéliens et les Palestiniens ».

Après une série d’attaques contre des Juifs à Jérusalem en octobre 2015, Ban a dit qu’il était « profondément troublé » par des organisations palestiniennes glorifiant ces actes. Il a ensuite exhorté instamment « tous les dirigeants à condamner la violence et l’incitation à la haine, à maintenir le calme et à faire tout ce qu’ils peuvent pour éviter une nouvelle escalade ». En conclusion de son discours, il a réitéré sa conviction que le conflit israélo-palestinien pourrait être résolu grâce à « une solution négociée à 2 Etats ».

Ban Ki-moon (Crédit photo : Don Emmert/AFP)
Ban Ki-moon (Crédit photo : Don Emmert/AFP)

Son communiqué sur la fusillade de mercredi soir au marché Sarona de Tel Aviv était différent, et de façon significative. Non seulement il a condamné l’acte en lui-même, mais il a également ajouté qu’ « il n’y a aucune justification au terrorisme, ni à la glorification de ceux qui commettent ces actes odieux ».

Remarquablement, Ban a dit qu’il était « choqué par les dirigeants du Hamas qui ont choisi de saluer cette attaque et par certains qui ont choisi de la célébrer ». Sa déclaration s’est terminée avec un appel à la direction palestinienne « d’être à la hauteur de sa responsabilité en se prononçant fermement contre la violence et l’incitation à la haine qui l’alimentent ». Elle ne contenait pas d’appel à la retenue ni à une reprise rapide des négociations de paix.

L’Union européenne a également modifié le style de ses réactions au terrorisme palestinien.

Un attentat en novembre 2014 à Jérusalem-Est a été « une nouvelle preuve douloureuse de la nécessité d’entreprendre des efforts sérieux vers un accord de paix durable dans le conflit israélo-palestinien », avait déclaré à l’époque la chef de la politique étrangère de l’UE Federica Mogherini.

Après avoir exprimé ses condoléances à la famille de la victime, elle a exhorté « toutes les parties à agir de façon responsable et à faire preuve de retenue, pour ne pas enflammer davantage la situation déjà très tendue ». Pas un mot sur l’incitation à la violence ou à sa glorification.

« Ceux qui glorifient cette attaque doivent être condamnés » – Federica Mogherini

Son communiqué sur l’attaque de mercredi à Tel-Aviv est frappant par son ton différent. Plutôt que de répéter des phrases passe-partout sur la nécessité d’une reprise des pourparlers de paix, il exprime de la sympathie pour ceux qui ont perdu des membres de leur famille et se termine par ces phrases résolues : « Les responsables de ces meurtres doivent être traduits en justice. Ceux qui glorifient cette attaque doivent être condamnés ».

La hasbara (diplomatie publique) israélienne, semble avoir été efficace dans ce domaine. Depuis le début de la vague actuelle de terrorisme, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a souvent appelé la communauté internationale non seulement à dénoncer les actes de violence contre les Israéliens, mais aussi à dénoncer l’Autorité palestinienne qui ne les condamne pas avec suffisamment de force. Cette « absence de condamnation du terrorisme », avait-il dit en mars, « devrait être elle-même condamnée par tous dans la communauté internationale ».

Quelques heures après l’attaque de mercredi, l’ambassadeur israélien à l’ONU Danny Danon a demandé des condamnations du Secrétaire général et du Conseil de sécurité. « L’odieux attentat d’aujourd’hui prouve malheureusement que lorsque la communauté internationale refuse de condamner la terreur contre les Israéliens, l’attaque suivante n’est qu’une question de temps », a-t-il dit.

Avant même que Danon ne publie sa déclaration, l’envoyé spécial de l’ONU pour le processus de paix, Nickolay Mladenov, avait tweeté qu’il était « choqué » de voir le Hamas célébrer le bain de sang de mercredi à Tel Aviv, ajoutant que les dirigeants « doivent se lever contre la violence et l’incitation qui l’alimente, et ne pas les tolérer ».

Le fait que Mladenov ait devancé Danon pour dénoncer non seulement l’attentat lui-même mais aussi l’incitation et la glorification de la violence illustre bien que les exigences d’Israël sur ce front ont été entendues, au moins dans une certaine mesure.

Et pourtant, Netanyahu et son ambassadeur au QG de l’ONU ont peu de raisons de se réjouir. Le fait que les dirigeants de ces pays d’aujourd’hui semblent moins enclins à appeler à la « retenue » et plus enclins à condamner les discours de haine palestinienne ne prédit en rien un changement radical dans la façon dont ils cherchent à arranger le Moyen-Orient.

Alors que de nombreux Israéliens soutiennent qu’il est impossible de créer un Etat palestinien aussi longtemps que la région sera dans la tourmente – ce serait comme jeter les bases d’une nouvelle maison en plein milieu d’un tremblement de terre, aime à dire le ministre de la Défense Avigor Liberman – une grande partie de la communauté internationale pense le contraire.

Le conflit israélo-palestinien est au contraire toujours considéré comme la cause fondamentale des nombreux maux de la région. La résolution pourrait stabiliser la région, a affirmé par exemple le président français François Hollande dans son discours au Sommet de la paix de la semaine dernière à Paris.

Il a reconnu que certains considéraient la question palestinienne comme étant sous contrôle et donc moins urgente que la situation en Syrie et en Irak. « Mais je pense, au contraire, que ces changements rendent encore plus urgente la nécessité de résoudre le conflit », a-t-il déclaré, « et que les bouleversements régionaux créent des obligations nouvelles pour la communauté internationale et pour la poursuite de la paix ».

Le président français François Hollande parle au cours d'une réunion interministérielle dans le but de relancer le processus de paix israélo-palestinien, à Paris, le 3 juin 2016. (Crédit : AFP POOL/ STEPHANE DE SAKUTIN)
Le président français François Hollande parle au cours d’une réunion interministérielle dans le but de relancer le processus de paix israélo-palestinien, à Paris, le 3 juin 2016. (Crédit : AFP POOL/ STEPHANE DE SAKUTIN)

Hollande n’est pas seul dans son analyse. Dans leurs déclarations sur le bain de sang de Tel Aviv, ils ne l’ont peut-être pas exprimé cette fois, mais de nombreux dirigeants du monde sont convaincus que cette attaque – et la réponse attendue d’Israël, qui est susceptible de frustrer davantage le public palestinien – rendent encore plus urgente une nouvelle initiative pour la paix.

Le plan français pour un sommet international de paix plus tard cette année est donc toujours sur la table, tout comme le spectre d’une résolution en faveur d’un Etat palestinien à l’ONU à l’automne que les États-Unis pourraient soutenir ou auquel il pourraient refuser d’opposer leur veto.

Au lendemain de la fusillade de mercredi, on peut s’attendre à ce que Netanyahu parle moins de son empressement à mener des négociations de paix, comme il l’a fait ces dernières semaines, et plus de sa détermination à lutter contre le terrorisme. Mais la pression internationale va reprendre assez tôt. Netanyahu fera de son mieux pour l’éviter, mais cette fois il sera plus difficile d’affirmer que le monde ignore l’incitation palestinienne à la violence.

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