Echanges soft et admiratifs pour Netanyahu à des questions-réponses à la Knesset
Journalistes internationaux et experts des réseaux sociaux au Sommet des médias juifs rencontrent les dirigeants israéliens et parlent de tout sauf des sujets épineux
Amanda Borschel-Dan édite la rubrique « Le Monde Juif »
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a joué sur du velours mercredi à la Knesset alors qu’un groupe de journalistes juifs internationaux et des blogueurs ont eu l’occasion – rare – de poser des questions « sur n’importe quel sujet » au dirigeant israélien.
Alors que pour les journalistes israéliens nationaux, ce « n’importe quel sujet » aurait certainement inclus des questions concernant les enquêtes de corruption et les querelles de coalition, ce groupe était plus préoccupé par l’antisémitisme et le mouvement Boycott, désinvestissement et sanctions (BDS), des questions plus préoccupantes pour leur pays d’origine.
Le groupe de 150 journalistes issus de 30 pays a participé au troisième Sommet des médias juifs, une rencontre de quatre jours organisée en coopération avec le ministère des Affaires de la diaspora, le ministère des Affaires étrangères et le ministère de Jérusalem. Parmi les invités figuraient des responsables des médias juifs internationaux, ainsi que des blogueurs et des spécialistes des réseaux sociaux.
En quelques jours, les participants ont été accueillis et rassasiés grâce aux mets des meilleurs traiteurs d’Israël. Une poignée de membres de la Knesset se sont adressés au groupe, ainsi que des directeurs ministériels de premier plan et d’autres professionnels juifs de renom. Avec un cerveau trop rempli à l’image de son estomac plein, une participante a dit qu’elle était stupéfaite de la quantité de contenu qu’elle avait ingurgité en une journée.

Il y a eu quelques loupés : Le discours promis lundi soir du ministre des Affaires de la diaspora et de l’Éducation, Naftali Bennett, a été annulé à la dernière minute. De même, le discours vidéo du Premier ministre n’a pu être diffusé lors du gala d’ouverture.
Cependant, le dernier jour du sommet, les participants ont commencé leur mercredi avec le président Reuven Rivlin à sa résidence et ont poursuivi par une visite de la Knesset, avec une séance surprise de questions et réponses avec Netanyahu, qui participe très rarement aux conférences de presse publiques avec des médias israéliens.
La deuxième star politique israélienne n’a pas été oubliée par le public. Une participante a dit du sympathique président qu’il est notre “grand-père à tous”.
Dans ses déclarations préparées, le président a mentionné certains des plus grands dirigeants sionistes, dont le visionnaire Theodor Herzl et Nahum Sokolov. « Nous, les Juifs, sommes le peuple du Livre. Nous sommes un peuple de mots. Dès nos premiers jours, nos mots ont défini qui nous sommes. Nous avons porté nos paroles dans nos cœurs, dans nos livres, sur le long voyage du peuple juif. Vous aussi, vous êtes des gens de mots et d’images », a-t-il poursuivi. « Aujourd’hui, vous travaillez sur différentes plate-formes : Twitter, Instagram, Facebook, YouTube, blogs, mais la tâche est toujours la même : raconter des histoires, nous aider à comprendre, apporter lumière et vérité. »
Lorsqu’il a lâché ses notes, Rivlin a évoqué son modèle des quatre tribus d’Israël, dans lequel les Juifs ultra-orthodoxes, les Arabes, les Juifs laïcs israéliens et les Juifs religieux nationalistes représentent chacun un quart du gâteau démographique de l’État. Se référant à la dérision à laquelle sont confrontés les Juifs israéliens libéraux et réformés, il a déploré : « Nous avons une véritable guerre culturelle ici, en Israël ».
La diaspora occupe une place importante dans son paradigme, a-t-il dit. « Le monde est un petit village et le peuple juif est la cinquième tribu. « Que cela nous plaise ou non, la diaspora et Israël y sont tous ensemble, avec les mêmes objectifs, les mêmes besoins ». A cette fin, il a été annoncé que le président soutenait un projet sous la direction de Tzvika Klein, journaliste des affaires de la diaspora israélienne, qui aidera à expliquer le judaïsme dans le monde aux Israéliens influents.

Président du fan club de Bibi
L’affection du groupe de médias pour le Premier ministre dépassait même leur lien avec le « grand-père » Rivlin, car les questions qu’ils lui posaient lui donnaient l’occasion de développer ses points de vue favoris et de recycler des phrases bien huilées.
Un journaliste basé à Londres a demandé ce qu’il pense de l’idée d’une Grande-Bretagne dirigée par Jeremy Corbyn. Après une phrase sur le sujet, on a pu entendre que l’Iran est le gouvernement le plus antisémite au monde. « Tout en niant la Shoah, ils préparent la prochaine Shoah », expliqua Netanyahu.
Selon le Premier ministre, une personne se déclarant non antisémite, mais simplement critique à l’égard du gouvernement israélien, reviendrait à dire : « Je ne suis pas contre les Français, mais je ne pense pas que la France devrait exister, ce qui est absurde », a-t-il dit.
On demanda à Netanyahu si Israël devait garder le Golan. « Bien sûr que nous le gardons », répondit-il à un auditoire ravi.
Interrogé sur l’état des relations entre Israël et la diaspora, le Premier ministre a abordé un autre sujet favori : la Shoah et la démographie.

L’assimilation, a-t-il dit, « est en train de réduire notre nombre » dans la diaspora, ajoutant que nous n’avons pas encore récupéré la population juive d’avant la Deuxième Guerre mondiale. Cependant, il prévoyait que très bientôt, la majorité du peuple juif vivra en Israël « pour la première fois depuis le Second Temple ».
Il a reproché aux journalistes de ne pas savoir que la population juive laïque en Israël a le taux de croissance le plus élevé du monde sioniste. « Vous devriez le savoir, vous êtes des journalistes », dit-il en riant. Se félicitant de la « base démographique robuste » du pays, a-t-il poursuivi, « le mauvais côté est le rétrécissement de la diaspora… La disparition de l’identité juive est ce qui me préoccupe ».
M. Netanyahu a également fait rire après une question d’un journaliste ukrainien, qui se demandait si le Premier ministre, qui selon lui est très bon sur ses réseaux sociaux russes, envisagerait un jour de jouer dans un film en langue russe. « Non », répondit brièvement Netanyahu.
Après avoir dit à un journaliste latino-américain qu’il avait l’intention de resserrer les liens avec la région, il a ajouté que le pays avait beaucoup à offrir : « Israël est comme un supermarché mondial de la technologie », avec des « rayons » pour chaque secteur de la high-tech.
Une journaliste sud-africaine qui, « se sentant seule à la pointe sud de l’Afrique du Sud », a demandé comment combattre le « ground-zero du BDS » (Boycott, désinvestissements et sanctions) dans son pays.
« Dites la vérité » sur Israël, conseilla Netanyahu. « Le BDS utilise la distorsion et le mensonge », a-t-il dit. « Vous ne devriez pas seulement vous défendre, mais attaquer. Attaquez, attaquez », répéta-t-il. « Vous devez délégitimer ceux qui délégitiment », a-t-il précisé.
En partant précipitamment pour un vote en séance plénière de la Knesset, Netanyahu a été assailli par des admiratrices. Une blogueuse excitée a lancé au Premier ministre qui quittait la tribune : « Je t’aime, Bibi ! »
Abasourdie, elle a dit au groupe qui n’en revenait pas : « Je n’y peux rien. J’adore ce type ». Et une autre participante a admis timidement : « Oui, moi aussi ».