Eli Waxman : « Nous sommes confrontés à la plus grande crise civile nationale »
"Nous ne pouvons plus interrompre la chaîne d'infection", avertit le professeur, ajoutant que des mesures sérieuses doivent être prises cette semaine
Le chef d’un comité consultatif impliqué dans la lutte du gouvernement contre l’épidémie de coronavirus a averti dimanche qu’Israël avait « perdu le contrôle de la pandémie ».
« En ce qui concerne le nombre de personnes infectées, et le fait qu’elles soient dispersées dans tout le pays, nous ne connaissons pas les sites d’infection pour la plupart des personnes contaminées, donc nous sommes incapables de contrôler les épidémies », a déclaré à la Douzième chaîne le professeur Eli Waxman, un physicien à la tête du groupe d’experts chargé de conseiller le Conseil national de sécurité dans ses délibérations sur la lutte contre la pandémie.
« Dans la situation actuelle, avec 1 000 personnes infectées [chaque jour], nous ne pouvons plus interrompre la chaîne d’infection – même s’il y avait un système qui fonctionnait pour le faire, et il n’y en a pas ».
Et d’avertir : « Nous sommes confrontés à la plus grande crise civile nationale jamais connue par Israël. »
Le ministère de la Santé a annoncé dimanche soir qu’il y avait maintenant 29 958 cas de coronavirus confirmés en Israël depuis le début de la pandémie, dont 788 au cours des dernières 24 heures. Le nombre de cas actifs a augmenté de plus de 600 depuis samedi dernier, pour atteindre
11 677.
Il y avait 86 personnes dans un état grave et 68 patients modérément malades, a précisé le ministère, un jour après qu’une équipe d’experts a averti que le système hospitalier israélien risquait de s’effondrer face aux taux d’infection actuels.
Le nombre de décès a augmenté de un, pour atteindre 331.
Le ministère de la Santé a indiqué qu’il avait effectué 16 749 tests samedi et 16 271 autres avant la fin de la journée de dimanche.
« Le nombre de porteurs confirmés aujourd’hui signifie que même si nous arrêtons la propagation [aujourd’hui], les trois prochaines semaines verront 300 personnes gravement malades », a souligné Eli Waxman. « Si nous stoppons la propagation en une semaine, cela fait 600 de plus, et une semaine après, c’est déjà 1 200 – cela met en danger les capacités de notre système d’hospitalisation, met tout le système en danger d’effondrement ».
« Comme nous avons perdu le contrôle de la pandémie, nous ne pouvons pas l’arrêter, sauf par la distanciation sociale. Nous avons besoin d’ordres de distanciation sociale immédiats afin de minimiser les risques majeurs, mais avec des actions dont le coût économique n’est pas élevé. En d’autres termes, il faut empêcher tous les rassemblements de plus de 20 personnes et toutes les activités sociales et de loisirs. Pendant la période des cours d’été, nous pouvons fermer toutes les classes plus âgées, par exemple à partir du CM1, et maintenir les classes plus jeunes, car elles affectent la capacité des parents à travailler et [les fermer] a un coût économique élevé ».
Le conseiller scientifique de longue date du gouvernement a déploré le manque de préparation malgré les quatre mois qui se sont écoulés depuis que la pandémie a atteint Israël.
Gérer la crise maintenant nécessiterait « la capacité d’activer de nombreux organismes opérationnels selon des calendriers serrés, la collecte de données en temps réel, une prise de décision rapide et la capacité de mettre en œuvre des changements rapidement. Toutes ces capacités n’existent pas aujourd’hui. Quatre mois après le début de la crise, elles n’ont pas encore été mises en place ».
Un élément clé qui manque à la capacité de lutte d’Israël contre le coronavirus, a-t-il dit, est « un organisme d’enquête efficace et fonctionnel… C’est une partie du problème de notre incapacité à faire face à cela. Si un tel organisme est mis en place, et qu’il crée une réelle capacité à collecter des données et à perturber rapidement les chaînes d’infection… alors dès que nous réduisons le nombre de malades à 100 par jour, ce genre d’organisme peut supprimer les épidémies et nous permettre de revenir à une routine presque complète. Si nous ne construisons pas une telle organisation, nous nous condamnons à une troisième, quatrième et cinquième vague ».
Il a insisté pour que l’on se tourne vers l’armée comme solution rapide aux lacunes organisationnelles du gouvernement. « La seule façon de le faire efficacement pour le moment est de rétablir le centre de contrôle que l’armée a construit au sein du ministère de la Santé [au début de la crise], de nommer un général de division pour gérer cet événement, de mettre toutes les ressources de l’armée à contribution et de donner des instructions à tous les organes opérationnels au sein du ministère de la Santé et à l’extérieur, comme la police, le commandement du front intérieur de l’armée, les conseils locaux, etc.
Si le gouvernement ne le fait pas, il a averti que « d’ici deux semaines, nous devrons imposer un confinement ».
« Nous devons comprendre que les alternatives qui s’offrent à nous sont d’agir rapidement maintenant, de supprimer le taux [d’infection] afin d’éviter un confinement général plus tard. Cela aura un coût économique, et le gouvernement devra indemniser ceux qui en souffrent ».
L’armée a déjà commencé à réaffecter des ressources à la lutte contre l’épidémie, a-t-elle déclaré dimanche.
L’armée fournira 300 soldats au ministère de la Santé pour aider à mener des enquêtes épidémiologiques afin de suivre la propagation du virus, a annoncé le porte-parole de l’armée, Hidai Zilberman.
Tous les exercices d’entraînement pour les bataillons, brigades et divisions de réserve seront probablement interrompus, et les permissions des soldats seront réduites à une fois toutes les trois semaines, a ajouté le porte-parole.
De plus, les recrues qui s’engageront dans l’armée le mois prochain devront se rendre dans des centres de recrutement sans leurs parents afin d’éviter les grands rassemblements. Les invités seront également interdits de participer aux cérémonies militaires.
La commission Coronavirus de la Knesset a voté dimanche l’approbation d’une nouvelle réglementation gouvernementale limitant à 50 personnes les rassemblements dans les bars, les salles de fêtes et les synagogues.