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Espionnage présumé sous Bolsonaro, le scandale prend de l’ampleur au Brésil

Le scandale avait éclaté en octobre, quand la police avait inculpé deux hauts fonctionnaires de l'Abin soupçonnés d'avoir utilisé illégalement un logiciel espion israélien

Le président brésilien Jair Bolsonaro lors d'une visite au musée mémoriel Yad Vashem de la Shoah à Jérusalem, le 2 avril 2019. (Noam Revkin Fenton/Flash90)
Le président brésilien Jair Bolsonaro lors d'une visite au musée mémoriel Yad Vashem de la Shoah à Jérusalem, le 2 avril 2019. (Noam Revkin Fenton/Flash90)

Le scandale d’espionnage présumé de personnalités politiques et de journalistes sous l’ex-président brésilien Jaïr Bolsonaro a pris de l’ampleur jeudi, avec un coup de filet contre des suspects et la révélation de l’identité de personnes surveillées illégalement.

Bolsonaro, au pouvoir de 2019 à 2022 et toujours leader incontesté de la droite et de l’extrême droite, n’est pas directement ciblé par cette enquête, contrairement à son fils Carlos, soupçonné d’avoir coordonné à l’époque un « cabinet de la haine » actif sur les réseaux sociaux.

Mais c’est un souci supplémentaire pour l’ancien chef d’État qui, visé par une foule d’enquêtes, dénonce une « persécution » du gouvernement du président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva.

La révélation des noms des personnes qui auraient été victimes d’espionnage illégal donne de plus en plus à cette affaire une allure de scandale d’État.

Parmi elles : l’influent président de la chambre des députés, Arthur Lira (droite), et son prédécesseur, Rodrigo Maia (centre-droit), selon un rapport d’enquête rendu public jeudi par le juge de la Cour suprême Alexandre de Moraes, chargé de l’affaire.

Ce puissant magistrat, bête noire du clan Bolsonaro, est lui-même cité dans ce rapport comme une des personnes espionnées, tout comme trois autres membres de cette Cour, dont son président actuel, Luis Roberto Barroso.

La liste comprend également l’ancien gouverneur de Sao Paulo, Joao Doria (droite), et des journalistes renommés comme Monica Bergamo, chroniqueuse politique du quotidien Folha de S. Paulo, ou Vera Magalhaes, du journal O Globo.

« L’espionnage utilisant l’appareil de l’État contre des personnes considérées comme des adversaires de l’ex-président est un comportement de gouvernement totalitaire et criminel, digne des pires dictatures », a réagi dans un communiqué Maia.

« Milice numérique »

Quelques heures avant ces révélations, la police fédérale (PF) a déclenché jeudi à l’aube une nouvelle opération de grande envergure, munie de cinq mandats d’arrêt et sept mandats de perquisition.

Les mandats d’arrêt visent des influenceurs soupçonnés de désinformation et des policiers qui travaillaient pour l’Agence brésilienne de renseignement (Abin).

Quatre d’entre eux ont été interpellés, a indiqué à l’AFP une source de la PF.

Les influenceurs et policiers ciblés sont soupçonnés d’être membres d’une « organisation criminelle » ayant créé de « faux profils » sur les réseaux ou « diffusé de fausses informations » sur des « membres des trois pouvoirs [exécutif, législatif, judiciaire, ndlr] et des journalistes ».

Ils « ont pris part à une organisation infiltrée dans l’Abin pour obtenir des avantages politiques, produire de la désinformation, attaquer des adversaires politiques […] et déstabiliser les institutions démocratiques », a souligné le juge Alexandre de Moraes dans l’ordre judiciaire qui autorise l’opération policière de jeudi.

Façade du siège de la police fédérale brésilienne, à Brasilia, le 26 avril 2023. (Crédit : Carl de Souza/AFP)

En février, la PF avait perquisitionné une résidence où séjournait la famille Bolsonaro dans la cité balnéaire d’Angra dos Reis, près de Rio de Janeiro, dans le cadre de cette enquête.

Les policiers s’étaient également rendus à des adresses liées à Carlos Bolsonaro.

Le deuxième fils de l’ex-président est soupçonné d’avoir été aux avant-postes d’un « cabinet de la haine », une « milice numérique » chargée de dénigrer des opposants sur les réseaux sociaux, et de disséminer de fausses informations.

Carlos Bolsonaro a répliqué jeudi sur le réseau social X « qu’aucune preuve n’a jamais été présentée » contre lui.

Logiciel espion 

Le scandale a éclaté en octobre, quand une première opération policière s’était soldée par l’arrestation de deux hauts fonctionnaires de l’Abin soupçonnés d’avoir utilisé illégalement le logiciel espion israélien FirstMile.

Acquis par le gouvernement brésilien fin 2018, peu avant l’arrivée au pouvoir de Bolsonaro, ce logiciel permet la géolocalisation d’individus à travers le signal émis par leur téléphone mobile.

En janvier, une autre opération avait ciblé Alexandre Ramagem, ancien chef de l’Abin et homme de confiance de l’ex-président, aujourd’hui député et candidat à la mairie de Rio aux municipales d’octobre.

Le sénateur Flavio Bolsonaro, aîné de la fratrie, a affirmé jeudi sur X que la publication du rapport d’enquête avait pour but « de porter préjudice à la candidature » de Ramagem.

Condamné l’an dernier à huit ans d’inéligibilité, notamment pour diffusion de fausses informations, Bolsonaro est quant à lui cerné par les affaires.

La semaine dernière, la PF a réclamé son inculpation dans un autre dossier : il est soupçonné de s’être approprié des objets de luxe offerts comme cadeaux d’État au Brésil par des pays étrangers, notamment des bijoux reçus de la part du gouvernement saoudien.

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