Expo à Paris : quand Luz n’a pu crier qu’au travers d’Albert Cohen
Les illustrations de 'Ô vous, frères humains' sont exposées au Musée d'art et d'Histoire du judaïsme

Il y a un an, le dessinateur Luz adaptait le récit autobiographique d’Albert Cohen, « Ô vous frères humains » en bande dessinée. Ces illustrations sont aujourd’hui exposées au Musée d’art et d’histoire du judaïsme (Mahj) jusqu’au 28 mai.
« Courant 2015, j’ai ressenti le besoin de relire Ô vous, frères humains, expliquait Luz en février 2016. J’ai été plus puissamment encore frappé par le calvaire psychologique de ce petit garçon, déambulant à la lisière de la folie, par le message d’Albert Cohen » que lors de sa première lecture.
Il dit s’être appuyé sur une oeuvre faîte par un autre car il ne pouvait plus créer tout seul. Interviewé par Michel Zlotowski sur Akadem, il décrit ce travail comme « un cri graphique poussé avec les cordes vocales d’un autre ».
Ô vous, frères humains : ce récit publié en 1972 revient sur un événement marquant de l’enfance d’Albert Cohen.
A seulement 10 ans, alors qu’il est à la recherche d’un cadeau pour sa mère, le jeune Albert se fait insulter de « sale youpin » par un camelot dans les rues de Marseille. Cette découverte de l’antisémitisme est décrite dans cet ouvrage à travers la vision d’un jeune enfant qui d’un coup se sent honteux de quelque chose qui lui échappe.
Ce récit se présente sous la forme d’une longue quête afin de comprendre la violence de cette agressions verbale traumatisante. Ce récit intemporel illustre les blessures de son auteur plus de soixante ans après les faits.
C’est ce récit autobiographique que Luz, ancien dessinateur de Charlie Hebdo, reprend sous une forme illustrée en restant fidèle au texte initial.
Très marqué par les attentats de 2015, ou Luz a perdu de nombreux proches, il déclare en décembre dernier c’est « un livre qui nous explique comment sortir de la haine par la folie, et de la folie par l’amour, » rapporte BFMTV.
Pour Luz, la haine est la source des attentats perpétrés à Paris en janvier et en novembre 2015. C’est cette même haine qui est abordée dans le livre d’Albert Cohen et qu’il souhaite combattre avec des dessins engagés.
« Je pense que c’est arrivé à plein de gens de pleurer dans les chiottes quand on est un gamin parce qu’on est trop gros pour les autres, ou trop délictuel ou trop petit ou trop différent. Et quand je l’ai relu, ça m’a paru d’une telle évidence, que cette espèce de quête du petit Albert Cohen de 10 ans en 1905 avait des liens pas seulement avec ce que j’avais vécu quand j’étais gamin mais avec ce que je vivais aussi maintenant, » a déclaré Luz sur France Inter.
« L’exposition des 130 dessins du roman graphique de Luz, prêtés par l’artiste, permet de faire redécouvrir au public l’un des textes les plus forts et les plus émouvants d’Albert Cohen, explique le Mahj sur son site. En regard de ce manifeste humaniste, l’exposition présente des archives issues du fonds Albert Cohen récemment acquis par le [musée]. »