Facebook interdit les publicités pour les options binaires et les crypto-devises
La décision fait suite aux pressions d'organismes canadiens et américains d'application de la loi, dans leur lutte contre les options binaires et la fraude par crypto-devises
Simona Weinglass est journaliste d'investigation au Times of Israël

Facebook a annoncé qu’il interdisait toute publicité pour les options binaires, les crypto-devises et les offres initiales de pièces de monnaie, (Initial Coin Offering – ICO) après de nombreux mois de pressions exercées par le FBI et les organismes canadiens de réglementation des Titres qui enquêtent sur la fraude en ligne en matière de placement.
« Nous avons créé une nouvelle politique qui interdit les publicités qui font la promotion de produits et services financiers fréquemment associés à des pratiques promotionnelles trompeuses ou mensongères, telles que les options binaires, les offres initiales de pièces de monnaie et les crypto-devises », a écrit mardi Rob Leathern, directeur de la gestion des produits Facebook, dans un blogue annonçant la décision.
« Nous voulons que les gens continuent de découvrir de nouveaux produits et services grâce aux publicités Facebook sans crainte d’escroqueries ou de tromperie », a-t-il précisé.
« Cela dit, il y a beaucoup d’entreprises qui font de la publicité pour des options binaires, des ICO et des crypto-devises qui n’opèrent pas actuellement en toute bonne foi ».
L’objectif, a-t-il dit, est de « faire en sorte qu’il soit plus difficile pour les fraudeurs de profiter d’une visibilité sur Facebook ».

Jason Roy, le président du Groupe de travail sur les options binaires du Canada, a déclaré au Times of Israel que l’interdiction avait été prononcée à la suite de discussions que lui et le FBI avaient eues avec Facebook et Google au sujet de leur acceptation de la publicité pour les options binaires et les sociétés de crypto-devises.
« Nous avions discuté avec Facebook, tout comme le FBI. Je ne sais pas trop ce qui les a incités à prendre la décision finale, mais nous sommes très satisfaits et nous estimons que cela aura un impact et limitera le nombre de victimes. »
Roy et le FBI discutent depuis des mois avec les plateformes de réseaux sociaux de la prévalence de la publicité pour l’industrie des options binaires majoritairement malhonnêtes.
La Knesset a finalement interdit en octobre la fraude basée en Israël, qui a fait des milliards de victimes dans le monde entier au cours de la dernière décennie, à la suite d’une enquête menée par le Times of Israel depuis mars 2016, avec prise d’effet de l’interdiction le week-end dernier.
Certains de ces mêmes escrocs israéliens se sont tournés vers les crypto-devises, d’après le Times of Israel, mais contrairement à la fraude sur les options binaires basée en Israël, l’escroquerie par crypto-devises est pratiquée dans le monde entier.
« Cette politique est intentionnellement globale alors que nous travaillons à mieux détecter les pratiques publicitaires mensongères et frauduleuses, et l’application de la loi commencera à prendre de l’ampleur sur toutes nos plate-formes, y compris Facebook, Audience Network et Instagram », a déclaré Rob Leathern. « Nous réexaminerons cette politique et la manière dont nous l’appliquerons au fur et à mesure que nos signaux s’amélioreront. »
La nouvelle politique stipule que les annonces publicitaires ne peuvent pas promouvoir les options binaires, les crypto-devises et les ICO (offres de pièces initiales), qui sont un moyen de mobiliser des capitaux en vendant de la monnaie numérique qui peut ensuite être échangée. Les pièces ou jetons numériques représentent un intérêt pour certaines entreprises. Facebook a déclaré que les publicités frauduleuses comprenaient des phrases comme « utilisez vos fonds de pension pour acheter des Bitcoin ! ».
La fraude est fréquente dans le monde des monnaies numériques comme le bitcoin. Cette semaine, par exemple, la Securities and Exchange Commission des États-Unis a mis fin à une offre initiale de pièces de monnaie d’une société du Texas appelée AriseBank. AriseBank a été accusé d’avoir utiliser des célébrités comme le boxeur Evander Holyfield et les médias sociaux pour tromper les investisseurs sur 600 millions de dollars avec un objectif de 1 milliard de dollars pour une monnaie qu’il a appelé « AriseCoin.

L’industrie des options binaires est une entreprise basée en Israël qui a prospéré sans presque aucune intervention des forces de l’ordre depuis 2007. Moins de 20 Israéliens ont été arrêtés pour fraude d’options binaires, et aucun n’a été inculpé.
L’industrie utilise régulièrement des plate-formes de réseaux sociaux pour attirer les victimes et recruter du personnel.
La loi israélienne interdisant l’industrie des options binaires a pris forme après que le président de l’ancienne Autorité israélienne des Titres, Shmuel Hauser, a été alerté de l’ampleur de la fraude par le Times of Israel, en août 2016, et a promis qu’il prendrait les mesures nécessaires pour contrecarrer les fraudeurs.
Le même mois, le chef de l’Agence juive Natan Sharansky exhorta le gouvernement à fermer cette industrie « répugnante et immorale ». Le cabinet du Premier ministre a par la suite demandé son interdiction dans le monde entier.
Hauser a rédigé un texte de loi qui a été soumis à l’approbation finale du Comité des réformes de la Knesset en octobre dernier, après une vive opposition des principaux acteurs de l’industrie et de leurs lobbyistes.

Alors que les autorités israéliennes n’ont pas condamné ou même inculpé qui que ce soit, le FBI s’est chargé du travail, et des agents sont venus en Israël au début du mois. Le 8 janvier, les agents du FBI, accompagnés de policiers israéliens, ont visité les bureaux de Ramat Gan du principal fournisseur de plates-formes d’options binaires SpotOption. Le propriétaire de l’entreprise, Pini Peter, a déclaré au quotidien économique The Marker que la visite n’était pas une perquisition, que le FBI avait pris des fichiers sur les ordinateurs de SpotOption et qu’il avait pleinement coopéré avec les autorités américaines.

Le FBI a également interrogé Yossi Herzog, le propriétaire de Yukom Communications Ltd, une société israélienne qui a géré les sites Web Bigoption.com et Binarybook.com. La PDG de la société Herzog, Lee Elbaz, a été arrêtée par le FBI en Septembre quand elle a atterri à l’aéroport JFK, et restera en résidence surveillée aux États-Unis jusqu’à son procès. Elle est soupçonnée de fraude en ligne et de complot en vue de commettre une fraude en ligne, des infractions qui peuvent entraîner jusqu’à 20 ans de prison chacune.
Dans une allocution explosive prononcée lors d’une réunion du Comité des réformes en août dernier, le surintendant de la police israélienne Gabi Biton a déclaré que le crime israélien était à l’origine de l’industrie des options binaires et que le crime organisé dans le pays s’était considérablement enrichi et renforcé en raison de l’incapacité des services de détection et de répression depuis de nombreuses années à saisir l’ampleur du problème.
« Nous avons ouvert les yeux », a déclaré M. Biton, qui enquête sur la fraude financière et le blanchiment d’argent. « Ce que nous voyons ici, c’est une énorme entreprise criminelle organisée. Nous parlons de criminels à divers niveaux d’organisations criminelles, jusqu’au sommet. »
À son apogée, on estime que les options binaires auraient rapporté entre 5 et 10 milliards de dollars par an. Des centaines d’entreprises ont opéré depuis Israël, employant des milliers d’Israéliens, arnaquant des clients partout dans le monde.
Les sociétés israéliennes malhonnêtes d’options binaires offrent ostensiblement aux clients du monde entier un investissement à court terme potentiellement rentable. Mais en réalité – par le biais de plateformes de transactions truquées, le refus de rembourser et d’autres ruses – ces sociétés escroquent la grande majorité des clients de la plupart ou de la totalité de leur argent. Les escrocs dissimulent régulièrement où ils se trouvent, font de fausses déclarations sur ce qu’ils vendent et utilisent de fausses identités.