GB : Un ministre interrogé sur sa rencontre avec un milliardaire israélien
Le secrétaire au Logement Jenrick admet avoir vu l'homme d'affaires Idan Ofer quand il était au Trésor, mais dit s'être retiré de la gestion d'une demande d'aide d'une firme rivale

Le secrétaire d’Etat britannique au Logement Robert Jenrick a reconnu avoir rencontré un milliardaire israélien de l’industrie minière à l’époque où il supervisait une demande d’aide gouvernementale émanant d’une entreprise rivale, mais il a indiqué qu’Idan Ofer était un ami de sa famille et que les deux hommes avaient parlé de véhicules électriques, a fait savoir samedi The Guardian.
Jenrick est actuellement sommé par les députés de l’opposition d’expliquer ce qu’il avait fait – et quand – pour se retirer d’un groupe qui était chargé de réfléchir sur une requête de soutien financier qui avait été soumise par la firme britannique Sirius Minerals en 2018 et 2019 – à un moment où il avait aussi rencontré Ofer.
Au début de la semaine dernière, le journal The Guardian avait révélé la rencontre, au Trésor, avec Ofer qui, aux côtés de son frère, est actionnaire majoritaire au sein d’Israel Corporation.
Israel Corporation est propriétaire d’une filiale, Cleveland Potash, une firme rivale de Sirius Minerals dans l’industrie minière dont le siège se trouve également en Grande-Bretagne.
Au moment de la réunion, Jenrick était secrétaire des Finances au Trésor et il supervisait la demande de Sirius Minerals, avait indiqué le journal.

« Quand il était secrétaire des Finances, M. Jenrick a rencontré un certain nombre d’actionnaires pour discuter de véhicules électriques et de technologies de point de charge », a déclaré un porte-parole de Jenrick, vendredi, selon le Guardian. « Ce qui a compris également un entretien avec M. Ofer, qui a une expérience substantielle dans cette industrie ».
« M. Jenrick s’est retiré du groupe de réflexion chargé des problèmes rencontrés par Sirius Minerals », a ajouté le porte-parole.
« Et il l’a fait avant même que des décisions ministérielles soient prises à ce sujet – des décisions qui sont intervenues après son départ du Trésor de sa majesté, quoi qu’il en soit », a continué le porte-parole. « M. Ofer est un ami de sa famille. M. Jenrick avait évoqué la question avec des responsables du Trésor et il s’est retiré volontairement sur leur conseil ».
Le porte-parole n’a pas précisé quand Jenrick s’était retiré et le Guardian a fait savoir qu’il avait pris cette décision au moins six mois après sa rencontre avec Ofer. Jenrick avait remis le dossier à la secrétaire d’Etat pour le commerce international, Liz Truss, au début de l’année 2019.
Le député Travailliste de l’opposition Steve Reed, qui est également secrétaire des Communautés au sein du cabinet fantôme, a déclaré que « M. Jenrick doit nous dire aujourd’hui s’il avait fait état des relations amicales qui l’unissaient à M. Ofer avant leur rencontre et nous expliquer pourquoi il ne s’est pas immédiatement retiré, et quelles ont été ses conversations avec M. Ofer ».
« Il est temps de faire preuve d’honnêteté », a continué Reed, selon le journal. « M. Jenrick doit se présenter devant la chambre des Communes pour expliquer très exactement ce qu’il a fait, l’opinion publique s’inquiétant dorénavant qu’une nouvelle ère de corruption ait commencé pour de bon ».
La semaine dernière, Ofer a dit à The Guardian qu’il avait rencontré Jenrick pour parler du « climat d’affaires post-Brexit ». Ofer a déclaré qu’il ne se souvenait pas s’ils avaient parlé du projet Sirius, mais il a noté que même si cela avait été le cas, cela avait été « bref ».
Selon l’article, au mois de mars 2019, l’une des firmes d’Ofer, Quantum Pacific UK Corporation, avait fait, pour la première fois, une donation unique de 10 000 livres au parti Conservateur de Boris Johnson, auquel appartient également Jenrick.
Ofer a expliqué qu’une requête de don lui avait été soumise par le groupe des Amis conservateurs d’Israël mais qu’il n’en avait pas discuté avec Jenrick, qui appartient à ce groupe de pression.
La demande soumise par Sirius Mining avait été finalement rejetée au mois de septembre 2019. Ce refus avait placé l’entreprise au bord de l’effondrement. Elle devait être rachetée par la suite par un anglo-américain, au mois de janvier 2020.
Jenrick est actuellement déjà mis en difficulté, accusé d’avoir approuvé précipitamment une opération de promotion immobilière controversée financée par un riche donateur du parti Conservateur. Des appels ont été lancés en faveur de son limogeage auprès de Boris Johnson.
Ces accusations sont liées à la décision prise par Jenrick, au mois de janvier, d’approuver la construction de 1 500 habitations dans les Docklands de Londres, un projet qui avait été initialement rejeté par les inspecteurs des services de planification.

L’approbation donnée par Jenrick avait eu lieu quelques semaines après sa rencontre avec Richard Desmond, un riche promoteur immobilier, lors d’un dîner de levée de fonds du parti Conservateur.
Ce projet proposé concerne un quartier de Londres affichant un fort niveau de pauvreté et dirigé par le Labour de gauche.
Une note rédigée par un responsable du département de Jenrick semble indiquer que le ministre a voulu une approbation rapide de ce plan de développement immobilier. Des documents concernant cette décision prise ont par ailleurs été diffusés par le gouvernement suite aux pressions exercées par l’opposition.
Jenrick avait approuvé ce plan de promotion immobilière et deux semaines plus tard, Desmond, un Juif spécialisé dans les journaux pornographiques et ex-propriétaire du journal Daily Express, avait donné 12 000 livres au parti Conservateur.
Le conseil local s’était opposé à cette approbation, qui avait été ultérieurement annulée.
Mercredi, Jenrick a déclaré que les accusations lancées à son encontre, selon lesquelles il aurait été influencé de manière inappropriée, étaient « scandaleuses ». Il a insisté sur le fait qu’il ignorait tout du don offert par Desmond à sa formation politique.
Pour leur part, les politiciens de l’opposition ont appelé à son limogeage.
Johnson a, jusqu’à présent, défendu Jenrick, mais la controverse impose des pressions supplémentaires à un gouvernement qui s’efforce encore de repousser les critiques sur sa lenteur et sur son manque de préparation dans la lutte contre l’épidémie de coronavirus en Grande-Bretagne.
Plus de 43 000 personnes sont mortes des suites de la COVID-19 en Grande-Bretagne, ce qui en fait le pays le plus touché en Europe et le troisième pays le plus affecté par la pandémie dans le monde après les Etats-Unis et le Brésil.