Il y a 40 ans, un attentat meurtrier vise la synagogue de la rue Copernic
Quelques jours plus tard, une manifestation contre le fascisme, le racisme et l'antisémitisme avait rassemblé 200 000 personnes à Paris
Vendredi 3 octobre 1980, 18h35. Le grand rabbin Williams est en train de lire la prière des morts à la synagogue de la rue Copernic à Paris, lorsqu’une forte explosion retentit. La communauté juive en France vient d’être visée par le premier attentat mortel depuis la Libération.
En cette veille de Shabbat, le temple de l’Union libérale israélite, à mi-chemin entre l’Arc de Triomphe et le Trocadéro, est comble avec quelque 300 fidèles rassemblés, relatent les dépêches AFP de l’époque.
Lorsque les dix kilos de pentrite, dissimulés dans la sacoche d’une moto garée devant la synagogue, explosent, la salle est plongée dans l’obscurité, le faux-plafond s’écroule.
Quatre personnes sont tuées à l’extérieur : un passant, un motard, le gardien du bâtiment d’en face et une journaliste israélienne en visite à Paris. On dénombre une quarantaine de blessés.
Les dégâts matériels sont très importants dans toute la rue. De nombreuses voitures sont carbonisées, des vitres soufflées, les immeubles des alentours ébranlés.
Des Parisiens accourent sur les lieux, inquiets pour leurs proches. Des jeunes menacent de se venger des « fascistes », la colère monte contre « les autorités ».
Déjà à cinq reprises une semaine auparavant, des institutions juives à Paris avaient été prises pour cibles : des inconnus avaient mitraillé une école, une crèche, deux synagogues et le mémorial du martyr juif inconnu, sans faire de victimes.
Moins d’une heure après l’explosion, un appel téléphonique anonyme à l’AFP revendique l’attentat au nom des Faisceaux nationalistes européens (FNE), une organisation d’extrême droite, comme cela avait déjà été le cas des cinq précédents attentats antisémites. Le dirigeant des FNE dément aussitôt.

« Français innocents »
Dans la soirée, environ 200 à 300 manifestants devant la synagogue scandent « Giscard-Bonnet, complices, assassins », reprochant au président de la République et au ministre de l’Intérieur leur impuissance.
Rentré de Lyon après l’attentat, le Premier ministre Raymond Barre fait des déclarations qui alimentent la colère. Il exprime au micro de TF1 son « indignation » face à « cet attentat odieux qui voulait frapper des israélites qui se rendaient à la synagogue, et qui a frappé des Français innocents qui traversaient la rue Copernic ».
Le lendemain, des milliers de personnes manifestent sur les Champs-Elysées à l’appel de l’organisation « Renouveau juif » pour protester contre l’attentat et demander la « démission » du ministre de l’Intérieur Christian Bonnet. Quelques dizaines de jeunes courent vers les grilles de l’Elysée et un petit groupe prend à partie la présidente du Parlement européen et ancienne ministre Simone Veil, qui doit être dégagée par les forces de l’ordre.
Le 7 octobre, une manifestation contre le fascisme, le racisme et l’antisémitisme rassemble 200 000 personnes à Paris.
La police creuse sans succès la piste de l’extrême droite. Des dizaines de personnes sont arrêtées dans les jours qui suivent l’attentat, puis relâchées.
Les enquêteurs finissent par se concentrer sur le terrorisme palestinien. Quarante ans plus tard, l’unique suspect reste le Libano-Canadien Hassan Diab, un ancien membre du FPLP (Front populaire de libération de la Palestine). Il a bénéficié en 2018 d’un non-lieu, dont le parquet a fait appel.