Implantations en Cisjordanie : Amnesty renforce sa campagne contre TripAdvisor
L'ONG a écrit une lettre ouverte demandant aux employés d'exercer des pressions sur leurs dirigeants pour boycotter le tourisme de l'autre côté de la Ligne verte
Mercredi, Amnesty International a fait monter d’un cran sa campagne en faveur du boycott du tourisme dans les implantations israéliennes de Cisjordanie, recommandant vivement aux employés de TripAdvisor d’exercer des pressions sur les dirigeants du site pour qu’ils cessent de « profiter des crimes de guerre ».
« Nous vous écrivons pour vous demander de nous rejoindre dans la dénonciation du rôle tenu par TripAdvisor dans les violations des droits humains dans les territoires palestiniens occupés », peut-on lire dans cette lettre ouverte d’Amnesty envoyée au site spécialisé dans le tourisme.
L’ONG, basée en Grande-Bretagne, explique que TripAdvisor – qui répertorie des hébergements touristiques, des avis d’utilisateurs et autres contenus – est un moteur commercial majeur pour les implantations.
« En faisant la promotion du tourisme dans ces implantations illégales, TripAdvisor contribue à renforcer leur économie et à l’immense souffrance des Palestiniens qui ont été déracinés de leurs terres, dont les habitations ont été détruites et dont les ressources naturelles sont pillées au profit des implantations », affirme ainsi Mark Dummett, chef des droits commerciaux et des droits humains au sein d’Amnesty International.
L’ONG recommande vivement aux employés de s’exprimer pour exercer des pressions sur leurs dirigeants.
« Nous pensons qu’en tant qu’employés de TripAdvisor, vous avez également le véritable pouvoir de faire la différence en vous exprimant et en demandant que l’entreprise cesse de répertorier des hébergements et des attractions touristiques basées dans les implantations israéliennes », continue la lettre.
À l’heure de cette publication, TripAdvisor ou le gouvernement israélien n’avaient pas encore réagi à la missive, diffusée dans l’Etat juif à deux heures du matin.
Au mois de janvier, Amnesty avait prôné le boycott des implantations israéliennes en Cisjordanie et mis en cause Airbnb, Booking.com, Expedia et TripAdvisor, les géants du tourisme sur internet.
Amnesty avait noté que TripAdvisor se trouvait « au centre de sa campagne en raison de l’importance relative de la firme pour l’industrie du tourisme dans les implantations israéliennes ».
Les ministres israéliens avaient condamné la campagne, estimant qu’elle était « antisémite » et « une tentative scandaleuse de dénaturer les faits, de nier le patrimoine juif et de délégitimer Israël ».
Israël a capturé la Cisjordanie à la Jordanie lors de la guerre des Six-Jours, en 1967. Aujourd’hui, plus de 400 000 Israéliens vivent en Cisjordanie.
La plus grande partie de la communauté internationale considère les implantations comme illégales, jugeant qu’elles entravent la création d’un État palestinien indépendant.
Israël, pour sa part, considère ce territoire comme étant le cœur historique du peuple juif, disant qu’il est « disputé ». Pour l’État juif, le sort des implantations devra être résolu par le biais de négociations de paix avec les Palestiniens.
Israël a annexé Jérusalem-Est, notamment la Vieille Ville et les lieux saints, et considère la ville toute entière comme sa capitale indivisible. Les Palestiniens, pour leur part, en revendiquent la partie orientale pour y établir la capitale de leur futur État.
Airbnb avait annoncé au mois de novembre que l’entreprise supprimerait de son site 200 hébergements répertoriés dans les implantations de Cisjordanie, soutenant que les implantations « se trouvent au cœur du conflit entre Israéliens et Palestiniens ».
Le mouvement de boycott d’Israël avait considéré cette décision comme une victoire.
Toutefois, au mois d’avril, l’entreprise était revenue sur sa politique après une procédure judiciaire intentée par des Juifs américains.
Ce changement de politique était intervenu dans un arrangement judiciaire entre l’entreprise de location d’hébergements saisonniers et une douzaine de plaignants juifs américains qui avaient porté plainte contre la firme, avec à leur tête le Shurat Hadin-Israel Law Center, une organisation juridique pro-israélienne.
Dans la plainte, ces derniers avaient affirmé qu’Airbnb était coupable de discrimination à leur encontre due à leur judéité dans la mesure où le site acceptait encore de proposer les locations de vacances des musulmans palestiniens et des chrétiens en Cisjordanie.
Une copie de l’arrangement judiciaire, obtenue par JTA, indiquait qu’Airbnb permettrait dorénavant les locations dans les secteurs palestiniens comme dans les implantations juives de Cisjordanie.
Airbnb avait néanmoins fait savoir que le site verserait les bénéfices issus de la Cisjordanie à des groupes humanitaires, ajoutant que la même politique serait appliquée à l’Abkhazie et à l’Ossétie du sud, deux territoires disputés adjacents à la Géorgie, et qu’il évaluerait la situation dans d’autres zones elles aussi contestées.
Airbnb avait clamé dans son communiqué ne pas soutenir le mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions) anti-israélien.