Iran : un journal suspendu pour avoir fait un lien entre Khamenei et la pauvreté
"Des millions d'Iraniens sous le seuil de pauvreté", peut-on lire sur le graphique publié en Une par le quotidien Kelid

Un journal iranien a été suspendu lundi après avoir publié en première page un graphique montrant un trait rouge représentant le seuil de pauvreté, tracé par la main de ce qui semble être le guide suprême Ali Khamenei, a rapporté l’agence officielle Irna.
Le secrétaire du Conseil de surveillance de la presse, Alaeddin Zohourian, a annoncé à l’agence Irna la suspension du journal Kelid, publié depuis mai 2015, « conformément à la loi sur la presse ».
L’ayatollah Khamenei a un statut politique et religieux qui le rend intouchable en Iran.
« Des millions d’Iraniens sous le seuil de pauvreté », peut-on lire sur le graphique publié en Une par le quotidien pour illustrer un article sur le sujet.
La République islamique avait renoué avec la croissance après la conclusion en 2015 à Vienne de l’accord international sur le nucléaire iranien. Mais elle a plongé dans une violente récession en 2018 avec le rétablissement de sanctions américaines, après le retrait unilatéral de ce pacte des Etats-Unis.
Selon le Fonds monétaire international (FMI), l’inflation s’est envolée en même temps que la monnaie nationale, le rial, s’effondrait. Elle doit passer de 10 % à 39 % cette année, selon les prévisions du FMI.

Téhéran veut par ailleurs un retour irrévocable des Etats-Unis à l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien, conclu en 2015 entre les grandes puissances, et que Washington fasse amende honorable pour s’en être retiré unilatéralement il y a trois ans.
« C’est clair. Ce pays doit garantir qu’aucun autre gouvernement américain ne puisse bafouer le monde, ni la loi internationale et ne répète plus jamais ce qu’il a fait » en se retirant de l’accord multilatéral qu’il avait signé, a déclaré lundi à la presse le porte-parole du ministère iranien des Affaires Etrangères, Saïd Khatibzadeh.
« Les Etats-Unis doivent reconnaitre leur responsabilité dans la situation actuelle, qu’ils reviennent sur ce qu’ils ont fait et qu’ils lèvent définitivement les sanctions injustes et illégales qu’ils ont pris après leur retrait de l’accord nucléaire » en 2018 sous la présidence de Donald Trump, a poursuivi M. Khatibzadeh.
Interrompues depuis juin, les négociations sur le programme nucléaire de Téhéran pour relancer un accord historique de 2015 – limitant drastiquement le programme nucléaire iranien en échange d’un allègement des sanctions économiques frappant le pays – doivent reprendre le 29 novembre à Vienne.
Les pays encore parties prenantes à l’accord (Iran, Allemagne, Chine, France, Royaume-Uni, Russie) se réuniront en présence du négociateur européen Enrique Mora.
Selon M. Khatibzadeh, il n’est cependant pas question que les Etats-Unis participent directement dans un premier temps aux futures négociations, ces derniers n’étant « plus membres de l’accord ».
Et tant que « la République islamique ne pourra pas s’assurer que les sanctions illégales et extraterritoriales des Etats-Unis sont levées de façon totale et effective, après vérification et garanties requises, l’Iran n’arrêtera pas ses mesures compensatoires », a-t-il ajouté.

Après le retrait américain du pacte suivi du rétablissement des sanctions contre lui, Téhéran a progressivement abandonné ses principaux engagements pris.
M. Khatibzadeh a par ailleurs annoncé que le chef des négociateurs iraniens serait le vice-ministre des Affaires Etrangères Ali Bagheri. Ce dernier doit se rendre cette semaine à Londres, Paris, Berlin et « peut-être à Madrid », a-t-il indiqué.