Israël et l’AP débloquent 500 M de $ de recettes fiscales palestiniennes retenues
Les fonds serviront à rembourser la dette due à l'IEC ; les deux parties disent avoir obtenu gain de cause après avoir convenu d'un mécanisme négocié par Washington
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

Israël et l’Autorité palestinienne (AP) ont annoncé dimanche la conclusion d’un accord qui permet de débloquer environ 500 millions de dollars de recettes fiscales palestiniennes qui seront utilisés pour régler les notes d’électricité et de carburant dues à Israël.
Les deux parties ont présenté l’accord comme une victoire après des mois de négociations, auxquelles l’administration du président américain Joe Biden a contribué en tant que médiateur, selon un diplomate occidental de haut rang bien informé de la question. Ce responsable a déclaré que l’objectif était d’utiliser l’accord comme cadre pour le déblocage de fonds supplémentaires qu’Israël retenait de l’AP
En vertu des accords de paix provisoires conclus dans les années 1990, le ministère israélien des Finances perçoit des recettes fiscales pour le compte de l’AP et effectue des transferts mensuels à Ramallah, mais un différend a éclaté au sujet des paiements suite aux massacres perpétrés par le Hamas le 7 octobre 2023.
Le cabinet israélien a refusé de transférer la partie des fonds que Ramallah utilise pour payer les services et les employés à Gaza, au motif que l’argent était susceptible de parvenir au groupe terroriste du Hamas. Cette somme, qui avoisine les 75 millions de dollars de recettes, représente près d’un quart de l’ensemble du montant du transfert mensuel.
Pour protester contre cette décision, l’AP a refusé d’accepter les recettes fiscales dans leur ensemble, qui constituent pourtant la majeure partie de son budget annuel. Mais cette décision a placé l’AP dans l’incapacité de payer l’intégralité de ses employés depuis des mois, et Ramallah est désormais au bord de l’effondrement financier.
En janvier 2024, le cabinet a approuvé un cadre selon lequel la partie des fonds destinée à Gaza serait transférée à la Norvège, qui serait alors tenue de conserver les fonds jusqu’à ce que le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, approuve leur versement à l’AP.

Ce mécanisme a fonctionné pendant plusieurs mois et Smotrich a donné son accord pour le versement d’une partie de ces fonds de la Norvège à l’AP.
Mais en mai, la Norvège s’est jointe à l’Espagne et à l’Irlande pour reconnaître officiellement un État palestinien, ce qui a exaspéré Jérusalem. Smotrich a alors annoncé la fin de l’accord avec la Norvège.
Oslo disposait encore d’environ 420 millions de dollars de recettes fiscales palestiniennes, mais le ministère des Finances israélien a prévenu que si ces fonds étaient transférés à l’AP, Israël les prélèverait sur les transferts mensuels ultérieurs de recettes fiscales.

Dans l’année qui a suivi le massacre du 7 octobre perpétré par le Hamas, la situation financière de l’AP s’est avérée particulièrement mauvaise et les États-Unis ont déployé des efforts considérables pour obtenir le déblocage de ces fonds. Washington a cherché à recruter le Maroc pour remplacer la Norvège, mais cette idée a finalement été abandonnée en faveur de la formule actuelle qui a supprimé l’intermédiaire, a déclaré le diplomate occidental.
Plus récemment, Israël a proposé d’autoriser le déblocage des fonds s’ils étaient utilisés pour rembourser les énormes dettes de l’AP envers les compagnies israéliennes d’électricité et de carburant, dettes qui se sont accumulées au fil du temps en raison de l’incapacité des différentes municipalités palestiniennes à effectuer leurs paiements.
Dans un premier temps, Ramallah s’est montré réticent à cette idée, souhaitant disposer d’une plus grande autonomie quant à la manière de dépenser les fonds. Mais elle a fini par céder après qu’Israël a clairement indiqué qu’il n’accepterait pas le déblocage de l’argent bloqué en Norvège dans le cadre d’autres circonstances, a déclaré le diplomate.

Le paiement de la dette envers les compagnies israéliennes de carburant et d’électricité améliore la position de Ramallah auprès des banques palestiniennes, qui considèrent désormais que l’AP est capable de rembourser de telles dettes lors de l’examen de futures demandes de prêt, ce qui rend cet accord encore plus intéressant pour l’AP.
Les fonds débloqués, qui ont généré des intérêts au fil du temps, serviront à rembourser les dettes de carburant et d’électricité et à couvrir les paiements des mois à venir, ont indiqué les ministères des Finances d’Israël et de l’AP dans leurs communiqués respectifs. Le bureau de Smotrich a déclaré que l’accord a permis de rembourser 544 millions de dollars de dettes à Israël. Il a informé le cabinet de l’accord dimanche.
« La dette de l’Autorité palestinienne envers [la Compagnie israélienne d’Electricité (IEC)] a entraîné une augmentation des prêts et des taux d’intérêt, ainsi qu’une détérioration du crédit de l’IEC, qui a finalement impacté les citoyens israéliens », a déclaré Smotrich au conseil des ministres, selon la déclaration de son bureau.
L’accord ne prévoit pas le déblocage la partie des recettes fiscales palestiniennes qui revient à Gaza et qu’Israël continue de retenir depuis l’échec de l’accord passé avec Oslo. Toutefois, le diplomate occidental a déclaré que l’objectif était d’utiliser le nouveau cadre pour que ces fonds puissent être utilisés à l’avenir pour le paiement de l’électricité et du carburant.

Smotrich s’est opposé à l’envoi de fonds à l’AP, qui les utilise pour payer les salaires du secteur public. Les fonds retenus ont contraint l’AP à réduire considérablement les salaires du secteur public pendant des mois.
Israël déduit par ailleurs des fonds équivalents au montant total des paiements dits « martyrs », que l’AP verse aux familles de terroristes palestiniens ou aux familles de terroristes tués.
Le ministère des Finances de l’AP a déclaré que 570 millions de dollars restent aux mains d’Israël, ce qui porte le total des fonds retenus à plus de 980 millions de dollars à compter de 2024.
« Cela a exacerbé la crise financière, car le gouvernement continue de transférer ces allocations directement sur les comptes des fonctionnaires à Gaza », a déclaré le ministère, ajoutant qu’il travaillait avec des partenaires internationaux pour obtenir le déblocage de ces fonds dès que possible.
Reuters a contribué à cet article.