Israël/Hamas : l’UE réclame des pauses humanitaires mais pas de cessez-le-feu
Un navire turc transportant des fournitures destinées à la construction d'hôpitaux de campagne arrive au port égyptien d'El-Arish ; Tsahal cherche à détruire les centres de commandement du Hamas situés dans les hôpitaux
Les 27 Etats-membres de l’Union européenne ont condamné l’utilisation par le Hamas d’hôpitaux et de civils comme « boucliers humains » à Gaza, dans un communiqué publié dimanche. Ils ont également appelé Israël à une « retenue maximale » afin de protéger les civils dans la guerre en cours.
Lors d’une réunion des ministres des Affaires étrangères du bloc, M. Borrell a brandi une déclaration qu’il a publiée au nom des 27 nations en signe d’unité après des semaines de déclarations souvent divergentes sur la manière dont le groupe devait aborder la guerre entre Israël et le Hamas.
« Vous savez combien il a été difficile les dernières fois, après le vote aux Nations Unies, où les pays ont voté de différentes manières, de présenter une approche complètement unie », a déclaré Borrell. Quelques heures seulement après que les dirigeants de l’UE avaient proclamé leur unité face à la guerre entre Israël et le Hamas le 28 octobre, les États membres étaient totalement divisés lors du vote d’une résolution de l’Assemblée générale appelant à une trêve humanitaire à Gaza conduisant à une cessation des hostilités entre Israël et le Hamas.
Aujourd’hui, cependant, les nations de l’UE ont déclaré dans un communiqué qu’elles se joignaient aux « appels à une pause immédiate dans les hostilités et à la mise en place de corridors humanitaires, notamment par le biais d’une capacité accrue aux postes frontières et d’une route maritime dédiée, afin que l’aide humanitaire puisse atteindre en toute sécurité la population de Gaza ».
Et ils ont réitéré leur « appel au Hamas pour la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages. Il est essentiel que le Comité international de la Croix-Rouge ait accès aux otages ».
Les pays n’ont pas appelé à un cessez-le-feu, qui, selon Israël et ses partisans, profiterait largement au Hamas.
Et comme principe clé, ils ont déclaré l’UE « condamne l’utilisation par le Hamas d’hôpitaux et de civils comme boucliers humains »
L’un des principaux centres de commandement du Hamas serait situé sous l’hôpital Shifa, dans la ville de Gaza, dont les forces de défense israéliennes se sont rapprochées ces derniers jours.
Le commissaire européen à l’Aide humanitaire, Janez Lenarcic, a appelé lundi Israël à mettre en œuvre de « véritables » pauses humanitaires dans sa guerre contre le Hamas.
« Il est urgent de définir et de respecter les pauses humanitaires (…). Ces pauses doivent être de véritables pauses », a affirmé M. Lenarcic à son arrivée à une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne à Bruxelles.
« En premier lieu, elles doivent être annoncées à l’avance » et « clairement définies », ce qui « n’a pas été le cas jusqu’à présent », a-t-il insisté.
« Le carburant doit entrer. Comme vous pouvez le voir, plus de la moitié des hôpitaux dans la bande de Gaza ont cessé de fonctionner, essentiellement par manque de carburant », a-t-il encore affirmé.
Le patron de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a de son côté insisté sur la nécessité que ces pauses humanitaires soient « immédiates » afin de garantir l’acheminement de l’aide indispensable, notamment du carburant pour les hôpitaux.
« Ces pauses doivent être immédiates et de longue durée », a souligné de son côté la ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna. Elle a également insisté sur la « nécessité absolue de faire parvenir l’aide humanitaire aux populations civiles de Gaza qui n’ont pas à subir les conséquences des crimes des terroristes ».
Sur le terrain, les combats se concentrent au cœur de la ville de Gaza, dans le Nord du territoire, notamment autour de plusieurs hôpitaux soupçonnés par l’armée israélienne d’abriter des infrastructures de commandement du Hamas qui se sert selon elle de la population comme de « boucliers humains ».
Israël a annoncé qu’un « couloir » d’évacuation resterait en place lundi pour permettre aux civils de quitter l’hôpital Al-Chifa, tout en admettant que ce secteur était en proie à « d’intenses combats ».
Les hôpitaux ne « doivent pas devenir des champs de bataille », a déclaré de son côté le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, Jean Asselborn. « Les patients en soins intensifs n’ont aucune chance de survie », a-t-il martelé.
Plusieurs pays européens veulent aller plus loin et appellent, comme la France, à la mise en œuvre d’un cessez-le-feu. « Le niveau de souffrance auquel nous assistons pour l’instant à Gaza est intolérable », a ainsi déclaré la ministre belge des Affaires étrangères, Hadja Lahbib, appelant à un « cessez-le-feu humanitaire ».
« Je comprends la demande pour un cessez-le-feu, mais de telles demandes ne sont pas suffisantes pour garantir la paix », a cependant affirmé sa collègue allemande, Annalena Baerbock, à son arrivée à Bruxelles.
Mais elle a ajouté que ceux qui cherchent à obtenir un cessez-le-feu doivent répondre à des questions, « par exemple, comment l’exigence d’un cessez-le-feu, de manière aiguë et maintenant dans cette terrible situation, peut-elle garantir la sécurité d’Israël ? Qu’advient-il des 200 otages et qui les négocie dans une situation où les négociations semblent à peine possibles ? »
Le ministre letton des Affaires étrangères, Krisjanis Karins, a déclaré que « le Hamas utilise malheureusement des infrastructures civiles et des civils comme boucliers contre les forces israéliennes. La situation n’est donc pas du tout noire ou blanche ».
Il a ajouté que « personne en Occident ne souhaite soutenir une organisation terroriste ».
Dimanche, l’armée israélienne déclaré avoir fourni 300 litres de carburant à l’hôpital Shifa, en coordination avec son personnel, mais que le Hamas avait empêché le centre hospitalier en difficulté de les accepter. On ne sait pas exactement de quelle quantité de carburant l’hôpital aura besoin pour assurer ses services essentiels.
Israël a juré d’éliminer le Hamas à Gaza après que le groupe terroriste a déclenché la guerre par un massacre dans le sud d’Israël le 7 octobre, tuant environ 1 200 personnes, pour la plupart des civils, et faisant quelque 240 captifs.
Le ministère de la Santé, contrôlé par le Hamas, affirme que plus de 11 000 personnes ont été tuées depuis le début de la guerre. Ces chiffres ne peuvent être vérifiés de manière indépendante et ne font pas de distinction entre les civils et les agents du Hamas, ni entre les personnes tuées par les frappes aériennes israéliennes et celles tuées par des tirs de roquettes palestiniennes ratés.
Arrivée au port égyptien d’Al-Arish d’un navire turc transportant des hôpitaux de campagne
Par ailleurs, Un navire humanitaire turc transportant des hôpitaux de campagne pour la bande de Gaza est arrivé au port égyptien d’Al-Arish, proche du terminal de Rafah frontalier du territoire palestinien, a déclaré lundi à l’AFP un responsable du port.
Il s’agit du premier navire de secours transportant des hôpitaux de campagne pour Gaza à arriver en Egypte. L’Italie et la France envoient également des navires-hôpitaux qui devraient également être stationnés près de Gaza.
« Le navire qui est arrivé à l’aéroport d’Al-Arish transporte du matériel, des générateurs, des ambulances pour établir 8 hôpitaux de campagne », a déclaré à l’AFP un responsable du ministère turc de la Santé.
La Turquie attendait le feu vert des autorités égyptiennes pour mettre en place des hôpitaux de campagne à l’aéroport d’Al-Arish, a-t-il expliqué. « Nous avons reçu le feu vert des autorités égyptiennes. »
#Turkey sent a ship loaded with field hospital equipment, ambulances, and generators to #Egypt carrying humanitarian aid for #Palestinians in #Gaza, Turkish Health Minister Fahrettin Koca said on Friday pic.twitter.com/oqlCIzz9HQ
— DD India (@DDIndialive) November 10, 2023
« Nous installerons ces hôpitaux dans les zones indiquées par les autorités égyptiennes », a-t-il ajouté.
Cette livraison intervient alors que des responsables du Hamas ont déclaré que tous les hôpitaux du nord de la bande de Gaza étaient « hors service » en raison d’une pénurie de carburant due aux combats avec les forces israéliennes.
Le vice-ministre de la santé du Hamas, Youssef Abu Rish, a affirmé lundi que le nombre de morts à Shifa était passé à 27 adultes en soins intensifs et à sept bébés depuis le week-end, l’établissement ayant souffert d’une pénurie de carburant. Ces chiffres n’ont pas pu être vérifiés de manière indépendante.
Israël a fait pression pour que soient mis en place des hôpitaux de campagne et d’autres alternatives aux centres médicaux existants à Gaza, en raison de la présence de centres de commandement du Hamas en dessous des hôpitaux.