Israël prend pour la première fois la présidence d’une commission de l’ONU
Danny Danon salue une “réussite historique”, il présidera la commission juridique de l’Assemblée générale, qui traite aussi du contre-terrorisme
Raphael Ahren est le correspondant diplomatique du Times of Israël
Pour la première fois de son histoire, Israël a obtenu la présidence d’une des six commissions spécialisées de l’Assemblée générale (AG) de l’ONU, au grand dam des pays arabes et des Palestiniens.
Dans le cadre du renouvellement des instances de l’Assemblée en prévision de sa 71e session, qui commence en septembre, l’ambassadeur israélien Danny Danon a été élu à la présidence de la Sixième commission chargée des questions juridiques.
Dans un vote à bulletin secret organisé lundi à New York, Danon a recueilli 109 voix parmi les 193 pays membres lors d’un scrutin à bulletins secrets, alors que les instances des commissions sont généralement choisies par consensus, et a été élu président de la Sixième commission de l’AG, qui traite des sujets juridiques.
« C’est une réussite historique pour l’Etat d’Israël. Nous avons brisé le plafond de verre : malgré l’opposition de nombreux pays, dont l’Iran et d’autres qui ont essayé d’empêcher le vote, nous avons réussi à être élu pour la première fois à la tête d’une commission de l’ONU », a déclaré Danon.
« Je suis très fier d’être le premier Israélien à être élu à la présidence d’une commission », a-t-il commenté devant des journalistes.
« Comme président, je travaillerai avec tous les Etats membres, y compris ceux qui n’ont pas voté pour moi et je continuerai de soutenir les vrais objectifs de l’organisation ».
Dans un communiqué, la mission israélienne a salué « une réussite historique pour Israël », souvent cloué au pilori par l’ONU pour sa politique d’implantation en Cisjordanie ou ses opérations militaires à Gaza.
« C’est la première fois depuis que l’Etat hébreu à rejoint l’ONU en 1949 qu’un représentant israélien va présider une commission permanente », souligne le communiqué.
Dans le passé, des diplomates israéliens ont présidé d’autres commissions de l’ONU, moins prestigieuses, et même coprésidé l’AG, mais jamais l’une des six commissions principales de l’AG. « La Sixième commission est le forum principal pour l’étude des questions légales à l’Assemblée générale », selon l’ONU.
Parmi les sujets qu’elle devrait traiter pendant l’AG de cet automne, on trouve les « mesures pour éliminer le terrorisme international » et « la règle de la loi aux niveaux national et international ».
« L’une des premières tâches de l’ambassadeur Danon à son nouveau poste sera de promouvoir la Convention d’accord sur le terrorisme international », a annoncé dans un communiqué de presse la délégation israélienne.
Israël entend profiter de cette tribune pour renforcer les textes de l’ONU sur la lutte contre le terrorisme. « Israël est un leader mondial dans la loi internationale et dans le combat contre le terrorisme. Nous sommes ravis d’avoir l’opportunité de partager notre connaissance avec les pays du monde », a déclaré Danon.
Il a été nominé à ce poste par le groupe des pays occidentaux et autres à l’ONU, dont c’était le tour de choisir un président pour la commission. Israël est membre temporaire du groupe des pays occidentaux et autres depuis 2000 et a rejoint le groupe de manière permanente en décembre 2013.
Les présidences des commissions principales de l’AG sont attribuées par roulement et sont en général confirmées sans vote. Dans ce cas, le Yémen a cependant défié, au nom du groupe arabe, la nomination d’Israël et a demandé un vote. Israël a été élu par un vote à bulletin secret lundi. Les félicitations ont immédiatement commencé à affluer de la part des états occidentaux qui soutenaient le pari de Jérusalem.
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Les Palestiniens avaient commencé à protester contre la nomination d’Israël la semaine dernière. « Il est ironique qu’Israël, un état qui continue à violer la loi et les conventions internationales, les lois humanitaires internationales et nombre de résolutions de l’ONU, soit nominé pour diriger une commission juridique dont l’objectif est de promouvoir la législation internationale et de protéger les libertés et les droits fondamentaux de l’Homme », a déclaré mercredi Hanan Ashrawi, haut fonctionnaire de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP).
En nominant Israël, le groupe des pays occidentaux et autres, qui comprend l’Australie et la Nouvelle-Zélande, « tourne en dérision le système légal international et récompense Israël pour ses violations flagrantes de la législation internationale et pour ses actes de punition collective et de violence », a ajouté Ashrawi.
Le représentant palestinien à l’ONU, Riyad Mansour, a pour sa part dénoncé une élection « négative et source de division ». Il a estimé que l’ambassadeur israélien « représente l’occupation et n’est pas qualifié pour présider la Sixième commission », et averti que les pays arabes allaient se concerter pour évaluer comment réagir.
Il a aussi fait valoir que le bureau qui assiste le président de la commission est formé de représentants de pays favorables à la cause palestinienne (Pakistan, Venezuela, Hongrie, Zambie).
Dimanche, la Ligue arabe avait convoqué les diplomates des pays prévoyant de voter pour Israël à la présidence de la Sixième commission, et les a informé du mécontentement du monde arabe. Il n’est pas logique qu’Israël préside la commission juridique de l’AG tant que le pays continue de violer les droits fondamentaux des Palestiniens, a déclaré aux diplomates occidentaux le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil Elaraby.
« Nous n’acceptons pas qu’un pays qui viole les lois internationales comme Israël puisse statuer sur des questions juridiques à l’ONU », a affirmé à la presse l’ambassadeur yéménite, Khaled Alyemany, qui préside actuellement le groupe arabe à l’ONU.
L’organisation terroriste palestinienne du Hamas a critiqué la nomination d’Israël, qui est selon lui « honteuse et irrespectueuse des règles et des statuts de l’ONU ». Le porte-parole du groupe, Sami Abu Zuhri, a appelé l’ONU à revenir sur cet acte « catastrophique ».
« Cette nomination encourage l’occupation à continuer ses politiques terroristes contre le peuple palestinien », a-t-il affirmé dans un communiqué de presse.
D’autres acteurs ont également pris des mesures pour lutter contre la nomination d’Israël, comme le mouvement des non alignés. L’Iran, par exemple, a essayé d’envoyer une lettre aux états membres de l’ONU pour les appeler à rejeter la candidature israélienne. « La lettre iranienne n’a pas été publiée et leur tentative a échoué », selon la délégation israélienne, qui crédite elle-même et le ministère des Affaires étrangères à Jérusalem pour une « bataille diplomatique longue et difficile » pour assurer le succès du vote.
« Nous ne permettrons pas à des pays dictatoriaux et anti-Israël de nuire à nos standards dans la communauté internationale. Ceux qui ont essayé de bloquer notre nomination seraient bien avisés de prendre note de la juridiction de cette commission, puisqu’ils ont beaucoup à apprendre sur la loi internationale », a déclaré Danon.
La réaction « hystérique » des Palestiniens à la nomination d’Israël n’a rien de nouveau, a déclaré lundi au Times of Israël Daniel Meron, qui dirige la division ONU et organisations internationales au ministère des Affaires étrangères.
« A maintes reprises, quand Israël présente sa candidature à un poste ou une initiative, il y a une tentative du groupe arabe de défier Israël », a-t-il déclaré. Même quand Israël propose des actions pour faire progresser les pays en voie de développement, les arabes essaient toujours de la saboter, a-t-il ajouté.
« C’est un comportement ridicule. Cela les isole eux, pas Israël. »
L’AFP a contribué à cet article.