Israël en guerre - Jour 497

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Opinion

Jérusalem la sainte, aux prises avec l’impiété religieuse

Des idéologues incendiaires et des provocateurs jouent avec le feu sur le mont du Temple et la ville commence à brûler

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

Des milliers de Palestiniens prient à l'extérieur de la mosquée d'Al-Aqsa, au sommet du mont du Temple dans la Vieille Ville de Jérusalem, lors de la fête musulmane de l'Aïd Al-Adha en octobre 2014. (Crédit : Sliman Khader / FLASH90)
Des milliers de Palestiniens prient à l'extérieur de la mosquée d'Al-Aqsa, au sommet du mont du Temple dans la Vieille Ville de Jérusalem, lors de la fête musulmane de l'Aïd Al-Adha en octobre 2014. (Crédit : Sliman Khader / FLASH90)

Dans son livre intitulé, de manière inquiétante, The End of Days : Fundamentalism and the Struggle for the Temple Mount [La Fin des temps : Le fondamentalisme et la lutte pour le mont du Temple], Gershom Gorenberg relate une conversation stupéfiante qui a eu lieu sur le mont du Temple immédiatement après sa prise par les parachutistes israéliens le 7 juin 1967, pendant que les soldats victorieux « se promenaient sur l’esplanade comme dans un rêve ».

Le Grand Rabin de l’armée, Shlomo Goren, qui deviendra plus tard le Grand Rabbin d’Israël, est allé voir le Général Uzi Narkiss et lui a déclaré : « c’est le moment de mettre une centaine de kilos d’explosif dans la mosquée d’Omar (le dôme du Rocher), et c’est bon, on en aura fini avec, une bonne fois pour toutes ».

« Rabbi, arrêtez », lui rétorque alors Narkiss.

Mais Goren – que l’auteur décrit comme « un homme emporté [par sa foi], le héraut de Dieu » – n’en démord pas : « vous ne comprenez pas l’immense importance que cela a », persiste le rabbin. « C’est une opportunité qui ne peut être exploitée que maintenant, à l’instant même. Demain, cela sera devenu impossible ».

Narkiss lui répond : « Rabbi, si vous ne vous arrêtez pas tout de suite, je vous emmène en prison ».

Contrarié, Goren s’en est allé silencieusement.

Comme le dit Gorenberg, la raison a prévalu dans les moments culminants de cette guerre. Le 10 juin, le ministre de la Défense Moshe Dayan a rencontré les responsables musulmans au sommet du mont, s’est assis avec eux, s’est déchaussé sur les tapis de la mosquée Al-Aqsa, et leur a expliqué que désormais, Israël prendra la responsabilité globale de la sécurité de l’esplanade, mais seulement à l’extérieur.

Les autorités musulmanes garderaient le contrôle de l’intérieur du site. La présence des Juifs sur ce Lieu – le plus saint d’entre tous pour eux – ne serait plus interdite. Cependant, ils n’auront pas l’autorisation de transformer cet endroit en un lieu de culte. Pour cela, ils ont le mur Occidental en bas.

Comme le ministre des Religions, Zerach Warhaftig, l’expliquera à Gorenberg des décennies plus tard, « la ferveur messianique est le secret de l’existence, c’est vrai. Sans cela, le feu s’éteindrait. Cependant, la raison doit la contrôler ».

Près d’un demi-siècle après ces quelques jours qui ont vu une victoire improbable et des décisions capitales totalement improvisées, la décision lucide de Dayan concernant le sort du mont du Temple – à remettre entre les mains des Juifs pour la première fois depuis 1 900 ans, mais pas accessible pour eux pour une utilisation religieuse – vient encore nous hanter.

Les dirigeants israéliens ont réussi en 1967 à interdire les prières juives grâce à une utilisation opportune du consensus de la Halakha, qui préconise que les Juifs ne doivent pas prendre le risque de souiller le Saint des Saints en montant sur le mont du Temple. Ainsi Israël a pu éviter une guerre religieuse entre le judaïsme et l’islam.

Le consensus de la Halakha est toujours vrai, mais il est de plus en plus remis en cause ces derniers temps. Yehuda Glick, qui se remet lentement à l’hôpital Shaare Zedek d’une tentative d’assassinat qui a eu lieu mercredi dernier à Jérusalem, est un éminent défenseur du droit à la prière juive sur le mont du Temple (et non pas – il faut le préciser – en refusant le droit à la prière musulmane).

Plusieurs députés de droite partagent son point de vue. Uri Ariel, le ministre d’Israël du Logement et de la Construction et nationaliste orthodoxe du parti Habayit hayehudi, a promis à ceux qui s’étaient réunis samedi pour prier pour la santé de Glick que le statuquo interdisant la prière juive changera.

Trois députés – Moshe Feiglin, Tzipi Hotovely et Shuli Moalem-Refaeli – se sont rendus sur l’esplanade pour afficher la présence de l’autorité israélienne les jours suivant l’attentat sur Glick. Ils ont imité, à petite échelle, la visite médiatisée d’Ariel Sharon, qui était à l’époque chef de l’opposition, en septembre 2000, au mont du Temple.

Cette visite, il y a 14 ans, avait eu lieu immédiatement après le rejet par Yasser Arafat de la proposition de paix du Premier ministre Ehud Barack à Camp David. Elle a servi de prétexte aux les disciples d’Arafat et d’autres groupes terroristes pour lancer ce qui est devenu la seconde Intifada, une guerre terroriste qui a tué plus de 1 100 civils israéliens.

Il devrait paraître évident que les successeurs de Sharon qui se rendent sur le mont du Temple jouent avec le feu. Soit ils ont la mémoire courte, soit ils sont aux prises avec cette sorte de ferveur messianique que les dirigeants israéliens de 1967 ont cherché à désamorcer avec sagesse.

Et puis, il y a une autre partie dans ce regain incendiaire des tensions qui se reflète aussi dans les effets des décisions importantes prises en juin 1967.

En choisissant d’abandonner tout le butin de la victoire, en décidant de ne pas abuser de la possibilité donnée au vainqueur d’imposer sa volonté, les dirigeants de la nation juive ont à l’évidence sapé la revendication des Juifs sur le mont du Temple aux yeux du monde musulman.

Comme ils ont vu le puissant Israël choisir le compromis plutôt qu’un incendie potentiel, de nombreux musulmans ont peut-être apprécié la retenue, mais beaucoup aussi ont pu l’interpréter comme la preuve d’un manque d’attachement des Juifs au site.

Cela a ainsi renforcé la croyance des Palestiniens et du monde musulman dans le faux récit de Yasser Arafat selon lequel « historiquement le Temple n’était pas en Palestine » et qu’historiquement, par une analogie pernicieuse, la nation juive n’avait aucune légitimité souveraine dans cette partie du monde.

En plein regain de terrorisme et de violence à Jérusalem – la tentative d’assassinat de Yehuda Glick, les vagues d’attentats à la voiture bélier, les émeutes dans les quartiers arabes de Jérusalem-Est, les affrontements sur le mont du Temple – il est profondément consternant de voir encore et encore à la télévision des quartiers arabes jonchés de pierres, des passants palestiniens, et des hommes âgés qui n’ont rien à voir avec la violence, exhorter Israël à rester à l’écart d’Al-Aqsa, de ne pas prier à Al-Aqsa, de faire tout ce qu’ils veulent sauf empiéter sur Al-Aqsa.

Le mont du Temple, le lieu le plus saint du judaïsme, il est clair pour beaucoup de Palestiniens que les Juifs n’y ont aucune légitimité.

Le Hamas, pour qui Israël n’a aucune légitimité, fait tout pour attiser les passions autour de fausses allégations concernant le danger contre Al-Aqsa, en gonflant, en exagérant et en déformant chaque étincelle dans l’espoir d’enflammer le feu de la guerre sainte qu’il souhaite propager afin de provoquer la disparition d’Israël.

Les provocateurs de la communauté arabe d’Israël – notamment la branche du nord du Mouvement islamique – les députés arabes de la Knesset sont, eux aussi, coupables d’exagération et de falsification des véritables dimensions de ce qui arrive dans et autour du mont du Temple depuis ces dernières semaines. Le président de l’Autorité Palestinienne Mahmoud Abbas – qui prend des positions de plus en plus extrémistes – ajoute, lui aussi, de l’huile sur le feu.

Les garanties quasi-quotidiennes données par le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, sur le fait que le gouvernement n’a aucunement l’intention de changer les paramètres mis en place par Dayan en 1967 sont ignorées, peu signalées ou rapportées de manière biaisée.

Mercredi, le mouvement d’Abbas, le Fatah, a exhorté les Palestiniens à défendre Al-Aqsa, le troisième Lieu saint de l’islam, face à une visite prévue des partisans de Yehuda Glick.

Les affrontements auraient amené les forces israéliennes de sécurité à poursuivre les émeutiers dans la mosquée (où les policiers auraient vu des bouteilles et des cocktails Molotov préparés de façon impie).

Cette incursion atypique a, à son tour, entraîné des plaintes acerbes des autorités musulmanes, poussant la Jordanie à revoir ses positions sur le Traité de paix avec Israël en place depuis 20 ans.

Cela a, sans aucun doute, fourni une autre raison meurtrière à Ibrahim al-Akary, le membre du Hamas auteur de l’attaque à la voiture bélier de mercredi, dont la page Facebook est remplie de critiques contre la présence juive sur le mont du Temple. Le dernier message posté par Akary mardi soir, indique le Times of Israel, est la photo d’un document délivré par l’Islamic Supreme Committee of Jerusalem [le Comité islamique suprême de Jérusalem], avec la liste les horaires et des Palestiniens volontaires pour protéger la mosquée mercredi.

Ceux qui haïssent Israël « veulent simplement nous déraciner de là-bas », a déclaré Netanyahu à la Knesset mercredi après-midi.

« Ils veulent réécrire l’Histoire, renier notre courageuse affinité avec Jérusalem et ils affirment que nous essayons de changer le statu quo sur le mont du Temple, ils répandent des mensonges sur le fait que nous voulons endommager ou détruire la mosquée Al-Aqsa ou modifier les dispositions prises pour les prières des musulmans sur l’esplanade. Il n’y a pas de plus grands mensonges que cela ».

Cependant, en l’absence d’un dialogue israélo-palestinien constructif, avec le vide rempli ces derniers mois par les discours des provocateurs et des idéologues religieux incendiaires, les mensonges se propagent. Comme toujours, les solutions se trouvent dans l’enseignement de la tolérance, dans des médias responsables, dans une plus grande sensibilité du monde politique et une autorité spirituelle sage. Comme toujours, tous ces éléments sont en nombre insuffisant.

Jérusalem est en train de brûler. La ferveur religieuse s’intensifie. La raison, comme l’a si justement dit Zerach Warhaftig en 1967, « doit la contrôler », en urgence.

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