Kafr Kanna : Des images vidéo contredisent les propos de Jamal Hakrush
Des images montrent le policier quitter le parking, laissant l'homme blessé au couteau et son agresseur en liberté ; il avait dit être parti pour sécuriser la scène du crime
Des images qui ont été rendues publiques, mardi, semblent démentir les affirmations d’un haut-responsable de la police qui avait déclaré de manière répétée ne pas avoir fui la scène d’une attaque au couteau meurtrière. Une vidéo le montre partir immédiatement après l’agression en voiture, alors qu’il n’avait cessé de dire qu’il était resté pour sécuriser les lieux.
Jamal Hakrush, le policier arabe le plus haut-gradé d’Israël, a été placé en congé dans la journée de lundi après la diffusion par Haaretz de ces images – où il apparaît en train de quitter précipitamment l’endroit où venait de se produire une agression au couteau à Kafr Kanna, au mois de septembre 2020. La vidéo le montre même en train de trébucher sur la victime, qui gît dans une cage d’escalier.
Hakrush — commissaire-adjoint en charge d’une unité chargée de combattre le crime dans la société arabe israélienne – a, de son côté, insisté sur le fait qu’il avait respecté les procédures en place, disant au micro de la station de radio Kan, lundi soir, qu’il avait quitté le bâtiment pour « sécuriser les lieux » et pour préserver en l’état la scène du crime.
Hakrush a ajouté qu’en tant que policier, ses principales préoccupations étaient de s’assurer que le criminel ne pourrait pas frapper une nouvelle fois et de placer le suspect en état d’arrestation, tout en appelant des renforts.
Mais de nouvelles images publiées par Haaretz, mardi, semblent montrer le véhicule de Hakrush en train de quitter les lieux du crime exactement une minute après avoir quitté le bâtiment – avant que l’attaquant n’ait été arrêté ou que le blessé n’ait été évacué à l’hôpital, où il avait été déclaré mort.
Sur cette vidéo du 12 septembre 2020, le véhicule conduit par Hakrush sort du parking alors que d’autres personnes transportent le blessé, Ghazi Amara, vers une voiture pour l’emmener à l’hôpital.
Mardi encore, Haaretz a publié une nouvelle vidéo tournée par la caméra mobile d’un policier arrivé ultérieurement sur les lieux pour appréhender l’attaquant, et qui montre les agents réagir avec confusion lorsqu’ils sont informés du départ de Hakrush.
Une femme a expliqué aux policiers que Hakrush, qui n’était pas en service pendant l’agression, était venu à l’usine Kanna Iron payer une facture et qu’il était parti.
« C’est par coïncidence que tout est arrivé devant ses yeux », explique la femme à l’agent. « Il a assisté à l’attaque au couteau ? », lui demande alors un policier. Elle lui répond qu’il était là mais qu’il n’a pas été témoin direct de l’agression.
D’autres images de caméra mobile montrent l’agent interroger un autre membre des forces de l’ordre sur la présence de Hakrush. « Mais où est-il ? Il était là, il était présent, c’est ce que disent les témoins », dit le deuxième policier.
Hakrush est revenu sur les lieux environ dix minutes plus tard, après que la police a arrêté Fadi Amara, l’oncle de Ghazi, qui s’était enfermé dans la cuisine après poignardé son neveu.
Hakrush a indiqué aux policiers qu’il était venu pour payer une facture.
Suite à la publication des images tournées par les caméras de sécurité, lundi, montrant Hakrush trébuchant contre Ghazi, blessé, alors qu’il quitte le bâtiment, le chef de la police israélienne Kobi Shabtai a ordonné l’ouverture d’une enquête indépendante sur l’affaire. Hakrush, pour sa part, a été mis en congé.
Hakrush a déclaré aux journalistes, lundi soir, qu’il avait la certitude que les autorités parviendraient à éclaircir les événements et qu’il avait bien l’intention de continuer à servir dans la police.
Selon certaines informations, les hauts-responsables de la police connaissaient l’existence de ces vidéos filmées par les caméras de sécurité et pourtant, aucune action n’avait été entreprise jusqu’aux révélations des médias, lundi. De son côté, le ministre de la Sécurité intérieure, Omer Barlev, a donné pour instruction à Shabtai de s’assurer que l’enquête examinerait également ces accusations.
Un communiqué du bureau de Barlev a indiqué qu’il avait demandé à Shabtai d’établir clairement qui avait eu connaissance de ces images et quand, de déterminer à quel niveau de la hiérarchie l’incident avait été connu et quelles mesures avaient été éventuellement prises.
Selon la Treizième chaîne, parmi ceux qui auraient eu connaissance des agissements de Hakrush, il y aurait eu les employés du bureau de l’ancien chef de la police Motti Cohen, ainsi que les employés du bureau du porte-parole de la police. La station de radio Kan a cité des sources qui ont affirmé que Cohen et Shimon Lavi, Commandant du district du nord, avaient vu les vidéos tournées par les caméras de surveillance.
De hauts-responsables des forces de l’ordre auraient expliqué avoir été choqués par ces informations, certains allant jusqu’à insister sur le fait que Hakrush ne devrait plus continuer à servir dans la police.
« Il est attendu de la part d’un policier d’un tel grade de fournir au moins une assistance au blessé – son comportement n’est pas celui qu’on est en droit d’attendre d’un officier de police », aurait confié un responsable des forces de l’ordre à Haaretz.