Israël en guerre - Jour 350

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La Bibliothèque nationale d’Israël collecte tous les contenus sur le 7 octobre et sur la guerre

L'institution chargée de la mémoire culturelle collective de l'État d'Israël et du peuple juif a relevé le défi de rassembler des contenus en temps réel - à un moment où les événements sont parfois niés

  • La réalisatrice Talia Finkel interroge Yifat Ben Shoshan, une résidente de Netiv HaAsara pour le projet d'histoire orale  'Edut 710'. (Crédit : Kobi Yonatan)
    La réalisatrice Talia Finkel interroge Yifat Ben Shoshan, une résidente de Netiv HaAsara pour le projet d'histoire orale 'Edut 710'. (Crédit : Kobi Yonatan)
  • Vue intérieure de la Bibliothèque nationale d'Israël en 2023. (Crédit : Iwan Baan)
    Vue intérieure de la Bibliothèque nationale d'Israël en 2023. (Crédit : Iwan Baan)
  • Photo aérienne montrant la nouvelle Bibliothèque nationale d'Israël, près du campus de l'université hébraïque, de la Knesset, du musée d'Israël et des bâtiments gouvernementaux à Jérusalem, en 2023. (Crédit :  ©Albatross)
    Photo aérienne montrant la nouvelle Bibliothèque nationale d'Israël, près du campus de l'université hébraïque, de la Knesset, du musée d'Israël et des bâtiments gouvernementaux à Jérusalem, en 2023. (Crédit : ©Albatross)

La Bibliothèque nationale d’Israël a ajouté à sa mission originelle – qui est l’archivage des œuvres juives et israéliennes – la création d’un répertoire central réunissant toute la documentation en lien avec l’attaque brutale qui a été commise par le Hamas, le 7 octobre, dans les communautés du sud d’Israël. Une collection qui porte également sur la guerre opposant Israël et le Hamas qui est actuellement en cours, et sur les événements et les réactions qui ont eu lieu, dans le monde, dans le contexte de ce conflit.

« Nous sommes, de par la loi, l’institution chargée de la mémoire culturelle collective de l’État d’Israël, de la Terre d’Israël et du peuple juif », commente la responsable des collections, la docteure Raquel Ukeles, expliquant la raison pour laquelle il revient à la Bibliothèque de mener à bien cette tâche.

C’est un travail énorme à effectuer – qui devrait prendre cinq ans et qui devrait être conjointement financé par le ministère du Patrimoine et par des partenaires philanthropes. Environ dix employés de l’institution ont d’ores et déjà commencé à travailler sur le projet, qui devrait entraîner d’autres embauches.

Alors que les attaques effroyables du 7 octobre – qui ont entraîné la mort de plus de 1200 personnes, des civils en majorité, et l’enlèvement d’environ 240 otages – et leur suite immédiate ont été enregistrés en temps réel grâce à des moyens numériques uniquement, la Bibliothèque a dû adopter une approche différente, dans le cadre de ce projet, du travail qu’elle mène habituellement lorsqu’elle examine des événements passés de l’Histoire israélienne.

« Tout le monde reconnaît l’importance de ce travail et reconnaît également combien il est différent de la collecte traditionnelle de documentation. Nous avons dû nous demander si le rôle de la Bibliothèque était de documenter des faits en temps réel ou après qu’ils se sont déroulés », explique Ukeles.

Le lit d’un enfant baigné de sang dans le kibboutz Kfar Aza vu dans une photo partagée par le Premier ministre Benjamin Netanyahu le 11 octobre 2023 au lendemain de l’assaut du Hamas contre Israël le 7 octobre. (Crédit : X/Netanyahu)

Ukeles confie que les dirigeants de l’institution avaient débattu en interne sur cette question pendant un certain temps et que le 7 octobre a placé cette problématique sur le devant de la scène.

« Pour ma part, je suis plus du côté de la documentation. Je pense que le monde numérique dans lequel nous vivons dorénavant ne nous permet pas d’attendre que la culture se développe d’elle-même », ajoute-t-elle.

« J’ai le sentiment que nous ne pouvons plus nous payer le luxe de rester là, à attendre. Nous devons faire notre travail de collecte d’information maintenant avant de prendre le temps de voir quels seront les contenus qui auront à la fois un impact et de l’importance à l’avenir », continue-t-elle.

La docteure Raquel Ukeles, cheffe de collections à la Bibliothèque nationale d’Israël. (Crédit : Yorai Liberman)

Pour avancer rapidement et agir en temps réel, la Bibliothèque utilise des technologies de pointe qui lui permettent de capturer tout ce qui est en lien avec l’assaut terroriste brutal du Hamas et avec la guerre sur internet.

« La première initiative que nous avons prise, cela a été d’immédiatement commencer à archiver Internet et réseaux sociaux, parce que c’est très éphémère. C’était important d’avancer rapidement. Les sites internet et les publications, sur les réseaux sociaux apparaissent et disparaissent. Le Hamas a diffusé des vidéos où les terroristes commettaient les atrocités avant de les supprimer ensuite », indique Ukeles.

La première initiative que nous avons prise, cela a été d’immédiatement commencer à archiver Internet et réseaux sociaux, parce que c’est très éphémère

La Bibliothèque nationale procède à son propre ouvrage de documentation et elle sert également de registre pour les contenus réunis par des dizaines de projets lancés au sein de l’État et dans le monde. Parmi ces contenus, des témoignages, des enregistrements audios et vidéos, des messages sur internet, des vidéos diffusée s par les médias et des publications éphémères rassemblées notamment sur les réseaux sociaux, des publications qui ont été écrites par des institutions civiles, par l’armée, par des gouvernements, etc…

Alors que la grande majorité de ces contenus sont numériques, Ukeles précise que l’institution est également prête à numériser tous les types de supports imprimés, comme les posters, les prospectus ou les cartes écrites aux soldats par les enfants des écoles.

La Bibliothèque a de nombreux partenaires dans le cadre de cette initiative, dont l’Israel Oral History Association, l’Oral History Division au sein de l’Avraham Harman Institute of Contemporary Jewry, à l’université hébraïque de Jérusalem ; l’Association of Israeli Archivists, la Zvi Yavetz School of Historical Studies de l’université de Tel Aviv ; l’USC Shoah Foundation, l’Association of Jewish Libraries (AJL), et les Berman Archive à l’université de Stanford.

La Bibliothèque coordonne étroitement ses efforts avec des centaines de spécialistes et de praticiens de l’Histoire orale et elle se sert des témoignages figurant dans les collections de ses partenaires, et autres. Ce sont des centaines d’experts qui se sont rassemblés pour créer ce qui a été appelé le Collaborative Forum for Leaders of Collection Efforts.

Les contenus collectés et produits pour ce répertoire central sont les œuvres de bénévoles et de professionnels. Selon Ukeles, les plus rapides à se tourner vers ce travail de documentation ont été les groupes civiques, très organisés, qui s’étaient formés lors du mouvement d’opposition au projet de refonte radicale du système de la justice israélien qui était avancé par le gouvernement, cette année.

Vue extérieure de la nouvelle Bibliothèque nationale d’Israël, en 2023. (Crédit : Iwan Baan)

Parmi les initiatives de terrain qui se sont rapidement mises en place, le Civic Headquarters, un groupe d’experts des secteurs des renseignements et de la cybersécurité qui avaient exploité des vidéos pour parvenir à retenir 200 000 images qui avaient permis de rassembler des informations sur les personnes portées-disparues, assassinées ou enlevées.

Un autre projet appelé Edut (Témoignage) 710 a réuni des réalisateurs de documentaire qui ont filmé et archivé les témoignages de cette journée dorénavant connue au sein de l’État juif sous le nom de Shabbat noir.

Une troisième initiative, intitulée « Waiting for You at Home », est annoncée sur le site de l’Académie de la langue hébraïque. Elle donne des informations sur les noms et les origines de tous les otages.

« Alors que nous nous concentrons sur la collecte, en même temps, nous avons une équipe juridique spécialiste de la propriété intellectuelle qui travaille sur les protocoles et sur des formulaires relatifs au droit et à l’accès à ces contenus », explique Ukeles.

Et il y a beaucoup de choses à examiner alors que l’institution est en train de déterminer ses politiques concernant cette collection unique, notamment en matière de droit d’accès aux contenus. Il y a des questions de confidentialité pour les personnes qui apparaissent dans les vidéos et qui partagent leurs témoignages, et il y a aussi des inquiétudes liées à la nécessité d’empêcher des mineurs d’être exposés à des contenus qui sont parfois d’une grande violence.

Vue intérieure de la Bibliothèque nationale d’Israël en 2023. (Crédit : Iwan Baan)

« Notre principe général est de nous ouvrir autant que possible. Contrairement aux archives gouvernementales, où les règles sont beaucoup plus strictes, nous sommes très souples tout en gardant bien à l’esprit cette question de la vie privée des gens, une question qui peut être également très sensible », ajoute-t-elle.

Comme toutes les collections de l’institution, celle-ci est aussi destinée aux archives historiques. Elle est toutefois différente dans la mesure où elle est créée à un moment où les événements en cours s’accompagnent d’un déni simultané de leur réalité.

« Je pense que tout le monde, dans ce pays, comprend l’importance de collecter ces contenus et de les préserver dans un répertoire stable et fiable, en offrant un accès à ce répertoire au public de manière à ce que les gens puissent l’utiliser pour raconter l’histoire – ou les infinités d’histoires – qu’il met à la disposition de tous », note Ukeles.

La Bibliothèque nationale a une page en hébreu consacrée à ce projet de documentation et de collecte. Vous trouverez de nombreuses informations à ce sujet ici, ainsi que les moyens de vous impliquer.

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