Israël en guerre - Jour 471

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Opinion

La complaisance d’avant-guerre a été remplacée par la méfiance sur tous les fronts

Les chefs de la sécurité se méfient des nouveaux dirigeants de la Syrie et ils ne croient pas à la fin du Hezbollah ; ils estiment que l'Iran cherchera à obtenir la bombe, attendant de voir comment Trump agira - et ils sont favorables à un accord sur les otages pour des raisons morales et pratiques

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

Des armes et d'autres équipements qui, selon l'armée israélienne, appartenaient au groupe terroriste libanais du Hezbollah, saisis par l'armée lors de son opération terrestre au Sud-Liban, dans une base militaire du nord d'Israël, le 23 décembre 2024.  (Crédit :Jack Guez/AFP)
Des armes et d'autres équipements qui, selon l'armée israélienne, appartenaient au groupe terroriste libanais du Hezbollah, saisis par l'armée lors de son opération terrestre au Sud-Liban, dans une base militaire du nord d'Israël, le 23 décembre 2024. (Crédit :Jack Guez/AFP)

Presque quinze mois après l’invasion du Hamas, une complaisance politique et militaire qui devait s’avérer être catastrophique, en Israël, à l’égard de la sécurité fondamentale de notre pays dans la région a été remplacée par une prise de conscience : celle de l’instabilité potentielle de tous les fronts qui nous entourent.

Alors qu’une grande partie de la communauté internationale, par exemple, s’est empressée d’accueillir les nouveaux dirigeants jihadistes de la Syrie, l’État d’Israël ne s’est pas contenté de se méfier – il a préféré anticiper de manière à minimiser au mieux d’éventuelles répercussions militaires, et ce au cas où la sympathie apparente des rebelles devait s’avérer être aussi superficielle que les costumes bien coupés qu’ils portent dorénavant. D’où les frappes aériennes qui sont actuellement en cours et qui visent des entrepôts d’armes et des infrastructures, ainsi que la prise de contrôle, par l’armée, de la zone-tampon située à la frontière.

Le Hezbollah est à terre – mais il est néanmoins difficile de considérer ici qu’il a été éliminé de manière définitive. En Israël, personne ne s’attend à ce que le groupe terroriste puisse tomber dans l’oubli ou à ce que des changements intérieurs, au Liban, l’obligent à le faire. Selon les estimations, le Hezbollah pourrait au contraire œuvrer avec assiduité à reconstituer ses capacités et à relancer ses offensives – y compris par le biais d’infiltrations à travers la frontière – et ce indépendamment du nombre d’années que cela nécessitera. Le cessez-le-feu du mois dernier tient pour l’instant, mais Tsahal renforce encore ses défenses à la frontière.

La menace du jour – celle que posent les Houthis au Yémen – souligne la multiplicité des défis auxquels est confronté l’appareil sécuritaire israélien dont les ressources sont limitées, un appareil qui compte en son sein les services de renseignement. Le nouveau ministre de la Défense, Israël Katz, a menacé mardi de prendre pour cible les chefs houthis, mais le fait est que les services de renseignement israéliens ne se sont guère focalisés, jusqu’à présent, sur la nécessité de fournir des informations et d’évaluer les moyens nécessaires pour mener à bien de telles missions.

Au début de cette guerre, les chefs de la sécurité israélienne avaient coutume de dire que les Houthis échappaient au contrôle de qui que ce soit – notamment au contrôle de l’Iran, qui les soutient. Lorsqu’il leur était demandé de quelle manière Israël pourrait les dissuader, ils se contentaient de hausser les épaules en signe d’impuissance. Mais alors que des millions de citoyens sont dorénavant dans l’obligation de se ruer vers les abris antiaériens plusieurs nuits par semaine, la hiérarchie militaire est tout à fait consciente qu’elle ne peut plus se permettre d’être impuissante. Des frappes israéliennes plus nombreuses et plus fortes sont bien au programme, mais il n’est pas certain qu’elles parviendront à arrêter les tirs des Houthis. Comme l’écrit mon collègue Lazar Berman, une coalition internationale plus large aurait plus de chances de réussir.

Entre-temps, en Cisjordanie, le nombre d’attentats et d’attentats manqués a relativement diminué – et l’armée observe l’Autorité palestinienne renforcer ses activités contre les cellules terroristes à Jénine. Contrairement à de nombreuses personnalités de la coalition de Benjamin Netanyahu, les militaires ne considèrent pas qu’il est dans l’intérêt d’Israël de voir s’effondrer l’Autorité palestinienne – mais force est de reconnaître qu’ils ne font pas non plus confiance à cette dernière.

La chute rapide et soudaine du régime de Bachar el-Assad, en Syrie, a également souligné qu’en réalité, tout peut arriver – même pour les régimes en apparence assez stables des deux autres États voisins d’Israël, l’Égypte et surtout la Jordanie, des pays avec lesquels le pays a signé des traités de paix il y a des décennies.

La Turquie, elle aussi, s’est inscrite plus profondément dans les calculs israéliens – en raison de la haine intense que ressent le Recep Tayyip Erdogan à l’égard d’Israël et à l’égard de la puissance de son armée. En ce qui concerne Ankara, l’état d’esprit israélien pourrait bien être le suivant : coopérer lorsque c’est possible – mais se méfier en toutes circonstances.

Concernant l’Iran, l’évaluation israélienne semble désormais être que les ayatollahs – blessés et humiliés par les dommages terribles qui ont été essuyés par leurs deux principaux mandataires , le Hezbollah et le Hamas – sont susceptibles d’essayer dorénavant d’obtenir une arme atomique. De surcroît, Israël semble avoir la conviction que l’État juif sait ce que l’Iran fait – ou ne fait pas – en matière d’armement.

Et comme sur un grand nombre de ces fronts de guerre actifs et potentiels, Israël semble attendre le retour au pouvoir du président américain élu Donald Trump. Si tout le reste devait échouer, Israël a toujours affirmé que les militaires feraient tout ce qui est nécessaire pour empêcher l’Iran d’obtenir la bombe atomique. Mais comme l’a fait remarquer David Sanger, le journaliste du New York Times, dans un article paru mardi, « détruire les infrastructures nucléaires iraniennes serait extrêmement difficile pour Israël, à moins que Trump n’autorise à apporter cette aide que ses prédécesseurs ont refusé d’offrir ».

Un tournant pour Gaza

L’attitude qu’adoptera Trump à l’égard de la région influencera également la politique actuelle d’Israël à Gaza – où cent otages sont toujours en captivité, 446 jours après le pogrom commis par le Hamas et d’autres factions terroristes dans le sud d’Israël, le massacre pendant lequel ils avaient été enlevés. 1 200 personnes avaient aussi perdu la vie ce jour-là.

L’armée continue à rechercher des informations, tentant de trouver des opportunités qui ouvriraient la porte à des opérations de sauvetage des captifs. Toutefois, la mise à mort de six otages par leurs ravisseurs, à la fin du mois d’août dernier, semble avoir marqué un tournant.

Comme l’a confirmé la propre enquête de Tsahal dont les résultats ont été rendus publics mardi, les soldats de disposaient pas d’informations concrètes et en temps réel concernant ces six otages – et ils avaient même estimé à tort, avec des conséquences qui devaient s’avérer être fatales, qu’aucun otage n’était conservé en captivité dans le secteur spécifique de Tel Sultan, à Rafah. La détermination à faire en sorte que cette tragédie ne se reproduise pas limite dorénavant radicalement les capacités des militaires à lancer des opérations de sauvetage d’otages et à combattre le Hamas, même dans les zones de Gaza où elles savent – ou supposent – que des otages sont conservés en détention.

Cette combinaison de six photos non datées des otages, en haut à gauche, Hersh Goldberg-Polin, Ori Danino, Eden Yerushalmi ; en bas à gauche, Almog Sarusi, Alexander Lubnov, et Carmel Gat. (Crédit : Forum des familles des otages et disparus via AP)

Dans l’état actuel des choses, Tsahal se concentre donc sur la lutte contre les guerilleros du Hamas dans l’extrême nord de Gaza – un secteur qui a été évacué par la quasi-totalité des civils – en prévision d’un éventuel projet-pilote qui permettrait à une ou plusieurs sociétés de sécurité privées américaines d’intervenir pour prendre en charge la distribution des aides humanitaires. Sauf que pour l’instant, rien n’indique que cela puisse se produire.

Extrêmement limités dans leurs opérations dans le sud de la bande de Gaza, les chefs de la sécurité considèrent qu’un accord sur les otages présente un grand intérêt pour Israël – conformément aux objectifs officiels de la guerre, à l’obligation sacrée qui les lie aux otages, à leurs familles et à la nation, et à la possibilité de déployer des efforts plus énergiques encore pour empêcher le Hamas de faire son retour dans la bande de Gaza, une fois que les otages auront été rendus. Pour dire les choses de manière plus brutale, plus vite tous les otages vivants seront libérés – voire la quasi-totalité des captifs – plus grande sera la capacité des militaires à intensifier leurs opérations contre le Hamas dans le sud de la bande de Gaza. Malheureusement, c’est une équation que le Hamas ne comprend que trop bien.

L’enquête vitale sur l’État

Un dernier mot : il est scandaleux que, près de 15 mois après que le Hamas a pu prendre d’assaut la frontière, aucune commission d’enquête d’État n’ait encore été mise en place – sans même parler de publier ses conclusions sur ce qui a mal tourné et sur les responsables de ce désastre sans précédent.

Le Premier ministre est, jusqu’à présent, parvenu à empêcher la mise en place d’une telle Commission parce qu’il sait pertinemment que ses conclusions et ses recommandations seraient politiquement catastrophiques pour lui. Cette incapacité à faire toute la lumière sur le pogrom et par conséquent – et c’est crucial – à optimiser les capacités des dirigeants politiques et des responsables de la sécurité à prévenir d’autres assauts de ce type est profondément dangereuse et potentiellement dévastatrice pour tout d’Israël.

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