La Haute Cour demande une explication sur l’interdiction des manifestations
Les juges remettent en question le pouvoir de l'Etat en la matière ; l'organisation anti-Netanyahu salue une "étape importante pour la démocratie et l'Etat de droit en Israël"
Mercredi, la Haute Cour de justice a ordonné au gouvernement d’expliquer pourquoi une loi d’urgence controversée sur le coronavirus permettant au gouvernement de limiter les protestations n’a pas été annulée.
La décision de la cour est intervenue alors même que les restrictions controversées sur les manifestations ont expiré mardi soir et n’ont pas été renouvelées par le gouvernement.
La cour a contesté les prémisses de la loi, réprimandant le Parlement de l’avoir adoptée le mois dernier malgré le manque de données sur le nombre d’infections survenues lors des manifestations anti-gouvernementales de ces derniers mois.
Elle a remis en question l’autorité du gouvernement à inclure une interdiction générale des manifestations de masse.
Israël a imposé un confinement national avant les fêtes de fin d’année le mois dernier pour contenir l’épidémie de coronavirus, qui a atteint à un moment donné quelque 9 000 cas par jour. Le gouvernement a depuis déclaré l’état d’urgence, limitant tous les rassemblements publics, y compris les protestations et les prières, à un kilomètre du domicile.
Le panel de juges – la présidente de la Cour suprême Esther Hayut et les juges Hanan Melcer et Neil Hendel – a déclaré que la réponse de l’État et les discussions qui s’ensuivront auront lieu devant un panel de neuf juges.
Le Mouvement pour un gouvernement de qualité, l’un des groupes qui ont déposé la requête auprès de la Haute Cour, a salué l’ordonnance du tribunal.
« C’est un pas de géant et important pour la démocratie et l’Etat de droit en Israël », a déclaré le groupe. « Alors que les responsables politiques essayaient de réprimer les protestations, la cour est venue les remettre à leur place et ne les a pas laissés nuire à la liberté de protester ».
Le groupe a également demandé à la police d’annuler les amendes infligées aux manifestants pour infraction aux règles de confinement.
La décision de l’État est intervenue en réponse aux pétitions de plusieurs groupes antigouvernementaux contre les limitations.
Le gouvernement a informé la Cour suprême, lundi soir, qu’il ne prolongerait pas les mesures d’urgence controversées qui avaient interdit les rassemblements massifs anti-Netanyahu.
Les groupes à la tête du mouvement anti-Netanyahu – qu’ils dénoncent pour ses mises en examen pour corruption et pour sa mauvaise réponse présumée à la pandémie – ont salué la nouvelle de la non-prolongation des mesures d’urgence.
Le mouvement des « Drapeaux noirs » a fait savoir que ses activistes retourneraient manifester aux abords de la résidence du Premier ministre à Jérusalem, un lieu qui a été au cœur du mouvement de protestation avant que les restrictions ne soient imposées.
Le groupe du « Ministère du Crime » a lui aussi fait savoir que ses militants se donneraient rendez-vous au même endroit dans la soirée de samedi.
« La réponse apportée par l’Etat est un signe annonciateur de la fin du confinement politique et de la fin des régulations dictatoriales », a-t-il commenté.
Un rassemblement de plus grande ampleur est prévu le samedi 24 octobre, d’après la Douzième chaîne.
Netanyahu avait affirmé que ces limitations avaient été décidées par souci de sécurité dans le contexte de la lutte menée par le pays contre la pandémie, mais ses détracteurs et les manifestants l’avaient accusé d’avoir renforcé le confinement pour tenter de réduire au silence ses opposants.
L’interdiction des manifestations semble finalement avoir encore davantage motivé les manifestants. D’après les organisateurs, 200 000 personnes se sont ainsi rassemblées, la semaine dernière, dans tout le pays.
Défendant le confinement – qui a compris l’interdiction de manifester – Netanyahu avait dit, dimanche, que le confinement du pays « nous a épargné une hausse géométrique de la morbidité, de la mortalité et du nombre de personnes gravement malades », tout en avertissant qu’il était prématuré de considérer la lutte contre la pandémie comme terminée.
Selon les chiffres du ministère de la Santé mercredi, 297 501 personnes ont été infectées depuis le début de la pandémie, dont 46 491 cas actifs.
Par ailleurs, 1 428 personnes atteintes de la Covid sont hospitalisées, dont 780 dans un état grave et 244 sous assistance respiratoire.
Le nombre de décès s’élevait à 2 067 mercredi matin, soit quatre de plus que la nuit précédente.