La présence américaine en Irak, « source d’insécurité », selon Khamenei
"La République islamique souhaite que le gouvernement irakien décide d'expulser les Américains", a déclaré le guide suprême iranien au Premier ministre irakien
Le guide suprême iranien Ali Khamenei a indiqué mardi au Premier ministre irakien, en visite en Iran, que Téhéran n’interfèrerait pas dans les relations entre Bagdad et Washington, tout en estimant que la présence américaine en Irak était « source d’insécurité ».
Le Premier ministre irakien Moustafa al-Kadhimi a rencontré l’ayatollah Ali Khamenei mardi à Téhéran à l’occasion de sa première visite à l’étranger depuis sa prise de fonction en mai.
« L’Iran ne se mêlera pas des relations entre l’Irak et les Etats-Unis », a affirmé le guide suprême. Mais « la République islamique souhaite que le gouvernement irakien (…) décide d’expulser les Américains puisque leur présence est source d’insécurité », a-t-il ajouté.
Les Américains maintiennent plusieurs milliers de soldats en Irak.
Le guide suprême a pris pour exemple l’élimination en janvier par les Américains du général Qasem Soleimani, commandant de la Force Qods – unité d’élite chargée des opérations extérieures des Gardiens de la Révolution –, tué par une frappe de drone près de l’aéroport de Bagdad.
« Ils ont tué votre invité dans votre maison et l’ont ouvertement assumé », a relevé Ali Khamenei.
En riposte à l’assassinat de Soleimani, Téhéran avait lancé des missiles contre des bases militaires irakiennes abritant des Américains, provoquant d’importants dégâts matériels sans faire de victimes, selon Washington.
Rencontre avec Rouhani
M. Kadhimi avait rencontré plus tôt le président iranien Hassan Rouhani.
Leurs discussions ont porté sur les moyens de renforcer les liens commerciaux, sur la lutte contre le nouveau coronavirus et sur les efforts destinés à assurer la stabilité de la région, a dit M. Rouhani lors d’une conférence de presse conjointe.
« Les deux gouvernements souhaitent élargir les relations bilatérales pour atteindre 20 milliards de dollars » (17 milliards d’euros), a-t-il indiqué, après sa rencontre d’une heure avec le dirigeant irakien.
L’Irak est l’un des principaux marchés pour les exportations non pétrolières de l’Iran mais le commerce bilatéral a récemment baissé en raison de la pandémie qui a entraîné une fermeture des frontières.
Le président iranien a aussi promis d’aider Bagdad en lui « fournissant autant que possible tous les produits sanitaires et médicaux nécessaires » pour lutter contre le coronavirus.
L’Iran est le pays le plus touché du Moyen-Orient avec plus de 14 600 décès et plus de 278 800 cas. L’Irak voisin a rapporté environ 4 000 décès et 97 000 cas.
Exercice d’équilibriste
M. Kadhimi devait se rendre lundi en Arabie saoudite, grand rival régional de l’Iran, avant d’aller à Téhéran mais sa visite à Ryad a été reportée en raison de l’hospitalisation lundi du roi Salmane.
L’enchaînement des deux visites devait être un exercice d’équilibriste pour le dirigeant irakien, qui pourrait devenir un médiateur entre Ryad et Téhéran.
M. Kadhimi a reçu dimanche à Bagdad le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif.
L’Arabie saoudite et son allié américain sont à couteaux tirés avec l’Iran, auquel ils reprochent entre autres de vouloir étendre son influence dans la région notamment en Irak depuis l’invasion américaine de 2003.
Et l’Irak est régulièrement le théâtre de tensions entre l’Iran et les Etats-Unis, qui entretiennent tous deux des liens étroits avec Bagdad.
M. Kadhimi est devenu Premier ministre en mai après environ quatre ans à la tête du renseignement irakien.
Il est réputé respecté des services de renseignements iraniens et des cercles du gouvernement mais aussi apprécié de Washington où il est attendu d’ici début août pour poursuivre le dialogue stratégique entre l’Irak et les Etats-Unis.