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La violence, la radicalité et l’antisémitisme de l’assassin de Samuel Paty mis en lumière

Abdoullakh Anzorov n'avait pas de mots assez durs pour parler des femmes, des Juifs, des chiites, du gouvernement français, indique un enquêteur

Des manifestants tiennent une pancarte indiquant « J'enseigne donc je suis » et un portrait du professeur d'histoire Samuel Paty alors qu'ils se rassemblent place de la République à Paris, le 18 octobre 2020, deux jours après que l'homme a été décapité par un terroriste abattu par les policiers. (Crédit : Bertrand GUAY / AFP)
Des manifestants tiennent une pancarte indiquant « J'enseigne donc je suis » et un portrait du professeur d'histoire Samuel Paty alors qu'ils se rassemblent place de la République à Paris, le 18 octobre 2020, deux jours après que l'homme a été décapité par un terroriste abattu par les policiers. (Crédit : Bertrand GUAY / AFP)

Le goût pour la violence et l’intérêt de plus en plus marqué pour la religion d’Abdoullakh Anzorov, le jeune islamiste radical tchétchène de 18 ans qui a décapité Samuel Paty, ont été mis en lumière jeudi devant la cour d’assises spéciale de Paris.

Même si plusieurs témoins, proches d’Anzorov, ont choisi de ne pas répondre aux convocations de la cour, deux de ses amis et un enquêteur de la sous-direction antiterroriste (SDAT) – qui a témoigné mercredi soir – ont pu dresser un portrait assez effrayant du jeune homme connu dans son quartier d’Evreux comme « le Tchétchène qui ne se laisse pas faire ».

Intervenant en visioconférence et identifié sous le matricule « SDAT 259 », l’enquêteur a dépeint un jeune homme imprégné d’une vision rigoriste de l’islam dès sa petite enfance (il est arrivé en France à l’âge de 3 ans), refusant notamment de serrer la main des femmes ou d’écouter de la musique sauf religieuse.

Anzorov n’a pas de mots assez durs pour parler des femmes, des Juifs, des chiites, du gouvernement français, indique l’enquêteur qui situe son passage vers le « radicalisme violent » au printemps 2020.

Sur les réseaux sociaux, il fait l’éloge de Ben Laden, se renseigne sur les moyens de faire sa « hijra » (s’établir dans un pays musulman).

L’enquêteur cite le témoignage d’une personne anonyme qui a vu, en mars 2020, Anzorov et son frère jumeau « jouer au foot avec une tête de chaton ».

Il indique encore que, sur le téléphone d’Anzorov, a été retrouvée la trace de vidéos montrant des abattages d’animaux ou des cours de décapitation provenant de la propagande de l’organisation État islamique. Ces vidéos ont été visionnées la veille et le jour de l’attentat, précise l’enquêteur.

Anzorov a-t-il vu la vidéo postée par Brahim Chnina (sur le banc des accusés) qui donnait le nom de Samuel Paty et de son collège ? « Oui », répond l’enquêteur.

Tofigue C. dit Toufik, 24 ans, qui fréquentait une salle de musculation avec Anzorov et Naïm Boudaoud (accusé de complicité dans l’assassinat du professeur d’histoire), parle quant à lui de « quelqu’un qui aimait bien se battre, dans un cadre sportif mais aussi à l’extérieur ».

Enterré avec les honneurs en Tchétchénie

Visiblement impressionné à la barre, Tofigue C. fait attention à chacun de ses mots, préférant le plus souvent répondre par des « oui » ou des « non » prudents. Il se souvient néanmoins que « trois ou quatre semaines » avant l’attentat, il a vu Anzorov et Naïm Boudaoud faire une prière sur le parking de la salle de musculation.

Interrogé sur l’attentat, il dit avoir été « choqué » par cet acte « abject ». « J’ai jamais adhéré » aux idées d’Anzorov, se défend-il, provoquant des moues dubitatives sur le visage d’avocats des parties civiles. « Je vais pas pousser quelqu’un à faire des choses qui sont à l’encontre de mes valeurs, des valeurs de la France et des valeurs religieuses », insiste le jeune homme.

Quand une assesseure lui rappelle que, juste avant de commettre son crime, Anzorov avait envoyé des messages à ses amis en demandant : « Faites des douas (invocations) en demandant la shahada (le martyre) pour moi à Allah », Tofigue C. parle de « bêtises ».

« Ca vous évoque quoi ? Vous pensez qu’il dit ça pour quoi ? », relance l’assesseure.

« Euh, qu’il va mourir », admet le témoin.

Plusieurs destinataires du message, a révélé l’enquête, avaient répondu à la requête d’Anzorov par des encouragements.

En l’absence de l’oncle d’Anzorov, Saïd, le président Franck Zientara lit des extraits de sa déposition devant les enquêteurs.

« Si on avait su ce qu’allait faire Abdoullakh, on l’aurait empêché. S’il n’était pas content des lois françaises, il pouvait aller ailleurs », a dit Saïd Anzorov aux enquêteurs.

Cependant, a reconnu l’oncle du tueur, « certains (dans la communauté tchétchène) respectent (l’acte de son neveu) et pensent qu’il a défendu le Prophète ». Mais, ajoute-t-il, « dans la famille, tout le monde condamne ses actes ».

Abdoullakh Anzorov a été enterré avec les honneurs en Tchétchénie en décembre 2020. Au printemps 2021, son père Abouyezid Anzorov, probablement retourné en Tchétchénie, a publié une vidéo affirmant que par son geste, son fils avait « remboursé la dette de tous les musulmans ».

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