L’ADL propose d’organiser une session sur l’Holocauste pour les employés de la Maison Blanche
Le groupe juif affirme que quelques heures de formation sur l'histoire de la Seconde Guerre mondiale aideront les membres de l'administration à éviter les erreurs

WASHINGTON – L’Anti-defamation League (ADL) a envoyé une lettre au secrétaire de presse de la Maison Blanche, Sean Spicer, pour organiser une séance d’éducation spéciale sur l’Holocauste destinée au personnel de la Maison Blanche.
Le groupe juif a fait cette proposition après une série de gaffes faites par l’administration du président américain Donald Trump, dont le dernier impliquait Spicer. En effet, ce dernier a comparé Hitler et le président syrien Bashar Assad et a suggéré de manière incorrecte que même le leader nazi n’a pas eu recours à des armes chimiques pendant la Seconde Guerre mondiale.
Dans la lettre, le groupe chargé de la défense des droits civils juifs a déclaré que les commentaires – pour lesquels Spicer a dû présenter des excuses plus d’une fois – étaient « non seulement historiquement inexacts, mais qu’ils étaient inappropriés et offensants ».
L’organisation a déclaré qu’elle « serait heureuse de mener » une session de formation éducative sur l’Holocauste « pour vous, votre personnel et toute personne à la Maison-Blanche qui pourrait avoir besoin d’en apprendre plus sur l’Holocauste ».
Reconnaissant que Spicer avait publié son mea culpa, le groupe a déclaré l’incident de mardi – ainsi que d’autres incidents, notamment la déclaration de la Maison Blanche en janvier au sujet de la Journée internationale de commémoration de l’Holocauste qui a omis toute mention des Juifs – « ont révélé un trou important dans votre connaissance de l’Holocauste, son impact et les leçons que nous pouvons en tirer ».
« Nous savons que vous êtes très occupé, mais nous sommes persuadés que quelques heures d’apprentissage sur cette histoire vous aideront à comprendre où vous avez fait des erreurs et vous empêcheront de commettre ces mêmes erreurs à l’avenir », expliquait la lettre, signée par le PDG de l’ADL, Jonathan Greenblatt.
ADL offers to hold a special Holocaust education session for Spicer and the WH staff. pic.twitter.com/vvWGEOIryP
— Annie Karni (@anniekarni) 13 avril 2017
« Malheureusement, lorsque les premiers jours de Pessah ont pris fin et que nous avons allumé nos téléphones et télévisions hier soir, nous avons vu votre ignorance sur l’histoire du peuple juif », a-t-il écrit.
L’ADL propose une formation sur la sensibilisation à l’Holocauste et sur la tolérance aux fonctionnaires des forces de l’ordre et aux éducateurs. « Chacun de ces programmes éducatifs implorent les participants à se souvenir des conséquences de la haine hors de contrôle », a expliqué sa lettre.
La proposition fait suite à un incident au cours duquel Spicer a déclaré devant la presse de Washington surprise lors de la conférence de presse quotidienne de mardi : « nous n’avons pas utilisé d’armes chimiques pendant la Seconde Guerre mondiale. Vous savez, vous aviez quelqu’un d’aussi méprisable qu’Hitler qui ne s’est pas rabaissé à utiliser des armes chimiques ».
Ses mots tentaient d’augmenter l’ampleur des évaluations selon lesquelles Assad a utilisé du gaz sarin lors d’une attaque la semaine dernière à Khan Sheikhoun, une ville dans la province d’Idlib en Syrie, qui a tué plus de 80 personnes, dont des dizaines d’enfants.
Obligé de s’expliquer sur ses commentaires initiaux, Spicer a ensuite émis quelques précisions, affirmant qu’il savait que des millions de Juifs et d’autres victimes des nazis ont été tués dans des « centres de l’Holocauste » en Europe occupée par les nazis, beaucoup dans les chambres à gaz, mais que « quand il s’agit de gaz sarin, [Hitler] n’utilisait pas le gaz sur son peuple de la même manière qu’Ashad [sic] l’a fait ».
Dans une autre déclaration faite aux journalistes destinée à clarifier ses remarques une fois de plus, il a déclaré : « en aucun cas, j’essayais de diminuer la nature horrible de l’Holocauste. J’essayais de faire la distinction sur la tactique d’utiliser des avions pour larguer des armes chimiques sur les centres de population. Toute attaque contre des personnes innocentes est répréhensible et inexcusable ».
L’attaché de presse a ensuite émis des excuses, en indiquant à Wolf Blitzer de CNN : « j’essayais de faire une remarque sur les actes odieux qu’Assad avait menés contre son propre peuple la semaine dernière, en utilisant des armes chimiques et des gaz, et j’ai franchement utilisé une référence inappropriée et insensible sur l’Holocauste – au sujet duquel, franchement, il n’y a pas de comparaison ».
« Pour cela, je m’excuse. C’était une erreur de le faire ».
Spicer a pris soin d’éloigner son supérieur, le président américain Donald Trump, de ses commentaires.
« Mes commentaires aujourd’hui ne reflétaient pas la pensée du président, divergeaient de sa position, et franchement étaient inexacts, insensibles et faux ». Il a ajouté : « Évidemment, c’était ma faute ».
Lors de son entretien avec Blitzer, on a demandé à Spicer s’il connaissait la pratique nazie commune consistant à utiliser des chambres à gaz. Il a répondu : « oui, je suis conscient de cela ».
Malgré les tentatives répétées de Spicer de gommer ses remarques impromptues, la leader de la commission des minorités du Congrès, Nancy Pelosi, a appelé Trump à le renvoyer en raison de ces remarques.
« Alors que les familles juives à travers l’Amérique célèbrent Pessah, le porte-parole principal de cette Maison Blanche minimise les horreurs de l’Holocauste », a déclaré Pelosi dans un communiqué, ajoutant que Spicer « doit être renvoyé » et Trump doit « désavouer » ses déclarations.
« Ou il parle pour le président, ou le président aurait dû être mieux avisé et ne pas l’embaucher », a-t-elle poursuivi.
Les commentaires de Spicer et les clarifications ultérieures ont également suscité de vives réponses dans les médias sociaux et qui ont eu un écho dans la communauté juive américaine.
Les démocrates juifs ont rapidement critiqué les commentaires de Spicer. Le sénateur Ben Cardin, D-Maryland, a déclaré sur Twitter : « Que quelqu’un donne au @PressSec un cours d’histoire sur Hitler #Icantbelievehereallysaidthat ».
Lorsqu’il a tenté de se justifier, Spicer a également utilisé le terme « centres de l’Holocauste » pour désigner les camps de concentration, ce qui a créé un tollé.
« Vraiment ? Le terme que vous cherchez est camp de concentration », a tweeté Cardin.
Sean Spicer: Really? The term you were looking for was concentration camps.
— Senator Ben Cardin (@SenatorCardin) 11 avril 2017
Le député de la Floride, Ted Deutch, a demandé à Trump de condamner les commentaires, en twittant : « Qu’il soit ignorant ou cruel, les commentaires de Spicer doivent être condamnés par @POTUS. Il doit visiter @HolocaustMuseum pour avoir une dose puissante de réalité ».
Le sénateur Brian Schatz d’Hawaii a déclaré sur Twitter qu’il ne trouvait « rien de drôle au sujet du fait que l’attaché de presse fasse une bévue sur l’histoire de l’holocauste. Parce que je ne suis pas sûr qu’ils devraient profiter du doute ».
I find nothing funny about the Press Secretary bungling holocaust history. Because I'm not sure they should get the benefit of the doubt.
— Brian Schatz (@brianschatz) 11 avril 2017
Lee Zeldin, un républicain juif de New York, a déclaré dans un communiqué que « pour ce qui est des commentaires et des comparaisons sur les tactiques et les méthodes variées entre maintenant et la Seconde Guerre mondiale, vous pouvez faire une comparaison un peu différemment et cela serait précis. Mais il est important d’éclaircir qu’Hitler a effectivement utilisé la guerre chimique pour assassiner des personnes innocentes ».
Mais Matt Brooks, le directeur exécutif de la Coalition juive républicaine, a déclaré que même si « utiliser la question de l’Holocauste ou d’Hitler est problématique à plusieurs niveaux », il était persuadé que Spicer s’était « vraiment et sincèrement excusé ».
« Il s’est plié en quatre pour préciser que ces vues n’étaient pas les siennes, que ce n’était pas ce qu’il essayait de dire », a déclaré Brooks dans un communiqué, en ajoutant : « nous l’acceptons et nous avançons ».
Les commentaires initiaux de Spicer ont été critiqués par l’AJC, le Centre Anne Frank, J Street et Yad Vashem.
L’Allemagne et le ministre israélien des Renseignements, Yisrael Katz, ont qualifié les propos de Spicer de « scandaleux ».
Le JTA a contribué à cet article.