L’ADL va reconnaître le massacre des Arméniens comme « génocide »
Faisant la comparaison avec la Shoah, le président de l’organisation déclare : "Nous devons éduquer chaque génération sur les tragédies du passé"
Le massacre par le gouvernement ottoman de 1,5 million d’Arméniens au début du 20e siècle a été « un génocide sans équivoque », a déclaré le chef de la Ligue anti-diffamation (ADL) lors de ce qui est à ce jour la déclaration la plus engagée du groupe sur ce sujet.
Jonathan Greenblatt, président-directeur général du groupe de droits civiques, a également déclaré dans un billet de blog vendredi que l’ADL soutiendra la reconnaissance du génocide arménien par les Etats-Unis – une initiative contre laquelle le groupe a résisté pendant de nombreuses années.
Greenblatt, qui a fait cette déclaration en amont de la convention nationale de l’organisation qui a commencé dimanche à Washington, DC, a lié les événements de 1915 à l’Holocauste deux décennies et demie plus tard.
Déclarant qu’il voulait être « parfaitement clair », Greenblatt a écrit : « Ce qui est arrivé dans l’Empire ottoman aux Arméniens à partir de 1915 était un génocide. Nous croyons que se souvenir et éduquer les gens à propos de tout génocide – arménien, l’Holocauste, la Bosnie, le Rwanda et bien d’autres, permettra de prévenir de futures tragédies ».
Greenblatt a déclaré que l’expérience de la communauté juive vis-à-vis de l’Holocauste est pertinente dans cette discussion, soulignant que, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, il y avait une « honte répandue dans le monde occidental à la prise de conscience que l’antisémitisme était profondément ancrée dans les cultures et les pays et pouvait produire une telle horreur ».
Il a averti que le temps qui s’est écoulé depuis l’Holocauste a en quelque sorte effacé le sentiment de honte qui inhibait l’antisémitisme et lui permet aujourd’hui de réapparaître en force, ce qui montre que « nous devons éduquer chaque génération sur les tragédies du passé ».
« Le silence n’est pas une option », a-t-il écrit.
Jusqu’en août 2007, l’ADL, à l’époque gérée par son directeur national Abraham Foxman, n’a pas utilisé le terme « génocide » pour décrire le massacre. Elle a changé de cap après qu’un débat interne est devenu public et qu’une campagne populaire des militants arméniens américains a ciblé l’ADL à Boston et dans d’autres villes et villages avec de grandes populations arméniennes.
Foxman utilise depuis l’expression « génocide arménien », y compris dans un discours en 2014. Pendant de nombreuses années, le groupe a opposé une reconnaissance formelle au Congrès américain, invoquant des préoccupations de la communauté juive turque et les relations entre la Turquie, Israël et les Etats-Unis.
Le directeur de l’ADL de la Nouvelle-Angleterre, Robert Trestan, a déclaré au Boston Globe, dimanche, que le post de Greenblatt était la « déclaration la plus catégorique que nous ayons jamais publiée ». Trestan a participé à des réunions entre l’ADL et les groupes arméniens et juifs locaux et nationaux, a signalé le Globe.
La déclaration ne va pas assez loin, selon Andrew Tarsy, l’ancien directeur de l’ADL en Nouvelle-Angleterre dont le différend sur la question avec la direction nationale en 2007 a conduit à son éviction temporaire par Foxman, qui plus tard a rétabli Tarsy.
Tarsy, un avocat reconnu des droits civiques, a déclaré au Globe que l’ADL devrait conduire des conversations au sujet des réparations pour les familles.
« Tout ce que les réparations de l’Holocauste ont représenté devrait être mis sur la table », a-t-il dit.
Au cours des dernières années, un certain nombre de grands groupes juifs ont reconnu les massacres comme un génocide. Israël a renoncé à reconnaître formellement l’atrocité comme « génocide » au milieu d’une opposition véhémente sur le terme par son ancien allié, la Turquie.