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Opinion

L’attentat turc montre que la sécurité des aéroports dans le monde entier est une farce mortelle

Quel est l’intérêt de contrôles stricts aux portes de départ si n’importe qui peut entrer dans un terminal d'aéroport et commencer à tuer les gens ?

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

Un officier de police turc dirige les passagers de l'aéroport Atatürk à Istanbul, le 28 juin 2016, après une attaque terroriste dans le plus grand aéroport de Turquie (Crédit : AFP PHOTO / OZAN KOSE)
Un officier de police turc dirige les passagers de l'aéroport Atatürk à Istanbul, le 28 juin 2016, après une attaque terroriste dans le plus grand aéroport de Turquie (Crédit : AFP PHOTO / OZAN KOSE)

J’ai fait la queue pendant plus d’une heure pour un contrôle de sécurité d’un aéroport à grande affluence sur la côte Est américaine. Une queue avec des centaines et des centaines de personnes qui s’étendait sur la largeur d’un hall de la taille d’un entrepôt, qui s’enroulait, une fois, deux fois, trois fois, quatre fois – les gens amassés les uns contre les autres, traînant à gauche et à droite alors qu’ils progressaient laborieusement vers le contrôle des bagages. Une queue, m’a-t-on dit, qui était tout à fait banale tant par sa longueur que par l’attente qu’elle impliquait. Une queue, de manière plus pertinente, qui était accessible à tous ceux qui entraient dans le terminal.

J’ai attendu dans les queues des salles de départ dans les aéroports de toute l’Europe pour le contrôle des bagages. J’ai attendu des siècles parmi la foule des passagers et des chariots à bagages débordants aux comptoirs, encore une fois, librement accessible à toute personne qui entrait dans l’aéroport.

Je suis resté avec des foules de passagers impatients à attendre de récupérer mes bagages sur les tapis roulants des aéroports dans le monde entier. Dans certains aéroports, la zone est inaccessible au grand public. Dans certains cas, la police armée et le personnel de sécurité sont à portée de main. Dans d’autres cas, les halls des arrivées et les zones de récupération des bagages sont ouverts sur la rue.

J’ai enduré les rigueurs de la sécurité ostensiblement extra-strictes pour les vols de différentes compagnies aériennes européennes à Tel-Aviv, j’ai eu les semelles de mes chaussures scannées par deux fois, j’ai regardé les membres du personnel de sécurité agoniser pour établir si oui ou non un tout petit déodorant serait autorisé à bord, j’ai vu ma fille être emmenée dans une salle à part pour un nouvel examen non précisé, ma femme outragée à sa poursuite.

À l’aéroport de Newark, il y a quelques semaines, j’ai attendu derrière une famille dont la queue de cheval de leur fille – encore jeune – a été fouillée à plusieurs reprises et qui pleurait à chaudes larmes, déroutée parce que quelque chose sur elle n’arrêtait pas de faire sonner le détecteur de métaux.

Des voyageurs faisant la queue pour passer le contrôle des passeports à l'aéroport Ben-Gurion en Israël, le 21 septembre 2008. (Crédit : Yossi Zamir / Flash90)
Des voyageurs faisant la queue pour passer le contrôle des passeports à l’aéroport Ben-Gurion en Israël, le 21 septembre 2008. (Crédit : Yossi Zamir / Flash90)

Dans un autre aéroport nord-américain, j’ai attendu dans une queue qui n’avançait tout simplement pas parce que la membre du personnel d’exploitation du contrôle bagage n’arrivait pas à trouver une position confortable dans son fauteuil, n’arrêtait pas de glisser, faisait revenir le même sac rouge sur sa machine pour le vérifier et le revérifier parce qu’elle avait été dérangée par sa chaise à chaque fois qu’il était passé dans la machine, puis, consciente de la rogne croissante des passagers attendant, avait validé toute une rangée de sacs avec le plus rapide des examens afin que la queue avance à nouveau.

J’ai pris un vol d’un pays méditerranéen vers Israël dans une très longue semi-panique parce que plusieurs des grands jeunes hommes assis autour de moi pendant le vol avaient déclenché les détecteurs de métaux à la sécurité et avaient gaiement été autorisés à passer.

Vous avez sans doute eu des expériences similaires. Ou pires.

Des gens devant l'entrée de l'aéroport Atatürk à Istanbul après un attentat terroriste, le 28 juin 2016 (Crédit : AFP/OZAN KOSE)
Des gens devant l’entrée de l’aéroport Atatürk à Istanbul après un attentat terroriste, le 28 juin 2016 (Crédit : AFP/OZAN KOSE)

Mardi soir, des dizaines de personnes ont été abattues par des terroristes dans le troisième aéroport le plus fréquenté d’Europe, à Istanbul. Les détails du carnage ne sont pas encore tous connus, mais les tueurs ont visiblement réussi à pénétrer dans le terminal international de l’aéroport Ataturk et ont utilisé les armes à feu et les explosifs qu’ils portaient, produisant des effets dévastateurs dans la zone de stationnement, dans le hall des arrivées, à proximité d’un poste de contrôle de sécurité. Le personnel de sécurité était sur place, et leurs actions ont sans doute empêché des morts.

Les responsables turcs ont été cités disant que l’aéroport avait des contrôles de sécurité à l’entrée de ses terminaux. Le Premier ministre, Binali Yildirim, a affirmé que les tueurs étaient arrivés en taxi et, selon l’Associated Press, « il a exclu les manquements à la sécurité ».

Binali Yildirim, le Premier ministre turc. (Crédit : capture d'écran AFP/chan)
Binali Yildirim, le Premier ministre turc. (Crédit : capture d’écran AFP/chan)

Avec tout le respect dû à M. Yildirim, et avec beaucoup d’empathie pour les victimes, ce n’est tout simplement pas suffisant. Cela fait à peine trois mois qu’un autre attentat terroriste à l’aéroport de Bruxelles a été perpétré par des tueurs qui se promenaient dans le hall des départs avec des explosifs dans leurs valises avant de procéder à leur entreprise meurtrière.

La sécurité de l’aéroport d’Israël n’est pas parfaite. Nous aussi, nous savons ce que c’est que d’avoir des gens massacrés dans notre aéroport. Mais les autorités israéliennes ont depuis longtemps reconnu que les procédures de sécurité de l’aéroport, bien que rigoureuses, ne pouvaient être que partiellement efficaces s’il y a un grand trou béant de vulnérabilité avant que les voyageurs ne se rendent dans les bâtiments de leur terminal.

Et donc, à l’aéroport Ben Gourion, tous les véhicules entrant dans la zone plus large de l’aéroport sont soumis à un premier contrôle. Cela peut sembler superficiel ; en effet, c’est rapide. Mais tout simplement demander aux conducteurs d’ouvrir leurs fenêtres et leur lancer une question ou deux donne au personnel de sécurité une première occasion d’enregistrer quelque chose de suspect.

Il y a une deuxième vérification, encore une fois relativement sommaire, sur toute personne pénétrant dans le terminal – une autre occasion de détecter quelque chose d’anormal. Et puis il y a la question épineuse du profilage des passagers – un sujet sensible ; une épreuve pour certains passagers. Mais un processus qui permet à la sécurité d’Israël de concentrer son attention sur les voyageurs potentiellement plus problématiques et donc de réduire le risque pour tous les voyageurs.

Divers facteurs sont à l’œuvre dans les techniques de profilage de passagers israéliens. Il y a trente ans, à l’aéroport de Heathrow, El Al Security a trouvé une bombe dans les bagages d’une jeune femme irlandaise voyageant vers Tel-Aviv ; elle avait été cachée dans le double-fond de son sac par son petit ami jordanien. Aucun interrogatoire n’aurait pu inciter Anne-Marie Murphy à divulguer l’existence de la bombe, parce que Nezar Hindawi ne lui avait pas dit qu’elle était là. Elle était enceinte de lui et il allait les envoyer, elle, son bébé et le reste des passagers à la mort. Mais elle a fait l’objet d’une inspection particulièrement fouillée parce qu’elle voyageait seule, ne s’était jamais rendue auparavant en Israël, et avait acheté le billet peu de temps avant le vol.

Le chanteur du groupe de rock américain Eagles of Death Metal, Jesse Hughes, (à guache) et le batteur Julian Dorio rendant hommage aux victimes des attentats du 13 novembre à Paris à un mémorial de fortune en face de la salle de concert du Bataclan à Paris le 8 décembre 2015 (Crédit : Miguel Medina / AFP)
Le chanteur du groupe de rock américain Eagles of Death Metal, Jesse Hughes, (à guache) et le batteur Julian Dorio rendant hommage aux victimes des attentats du 13 novembre à Paris à un mémorial de fortune en face de la salle de concert du Bataclan à Paris le 8 décembre 2015 (Crédit : Miguel Medina / AFP)

L’accélération du rythme actuel du terrorisme international exige davantage que les procédures, désormais standard, de routine, et sans réflexion pour sécuriser les aéroports et les autres lieux où les gens se rassemblent en grand nombre.

Les attentats à Paris en novembre dernier soulignent, par exemple, l’efficacité de la sécurité bien que rudimentaire dans les stades de football, ce qui a peut-être dissuadé les terroristes, et comment l’absence de cette garantie dans des salles de concert peut s’avérer catastrophique.

Les terroristes ont échoué à entrer dans le Stade de France, où des gardes avaient été déployés davantage pour empêcher le hooliganisme que les assassinats. Les terroristes ont tué 90 personnes au théâtre du Bataclan, où il n’y avait pas de personnel de sécurité aux portes.

Déclarer de manière complaisante, quelques heures après un massacre dans votre aéroport, qu’il n’y a eu aucune défaillance de sécurité – eh bien, c’est simplement lancer une invitation au prochain groupe de tueurs. Inconsciemment, c’est également une invitation pour la plupart des aéroports du monde entier.

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