Le budget de l’État passe sa première lecture, Gallant s’abstient
Des milliards de shekels pour 2023 et 2024 ; selon Smotrich les projets de loi favorisent la "stabilité financière" ; pour Liberman Israël se dirige vers une crise sans précédent
La Knesset a approuvé lundi en première lecture le budget de l’État pour 2023-2024, faisant passer la proposition de près de mille milliards de shekels à l’examen en commission, alors même que se déroulaient à l’extérieur des manifestations bruyantes pour et contre la réforme judiciaire du gouvernement.
Le budget présenté par le gouvernement est de 484,8 milliards de shekels pour 2023 et 513,7 milliards de shekels pour 2024, contre 452,5 milliards de shekels en 2022.
Le budget a été adopté par 63 voix contre 55. L’absence du ministre de la Défense, Yoav Gallant, un jour après avoir été démis de ses fonctions pour avoir appelé publiquement à l’arrêt de la refonte judiciaire, a été remarquée lors de la plénière.
Les législateurs de la coalition ont prolongé les débats pour permettre au Premier ministre Benjamin Netanyahu et au ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir d’arriver à temps pour le vote. Ils étaient en pleine négociation sur le refus de ce dernier de faire une pause à la réforme judiciaire.
En échange de cette pause, annoncée par Netanyahu après le vote du budget, le parti Otzma Yehudit de Ben Gvir a annoncé que le Premier ministre avait accepté d’avancer la formation prévue d’une « garde nationale » directement subordonnée au ministre.
Netanyahu a déclaré lors d’un discours télévisé qu’il suspendait le processus législatif pendant quelques semaines afin que puissent avoir lieu des négociations avec l’opposition pour arriver à un consensus sur une réforme.
Le gouvernement de Netanyahu a jusqu’au 29 mai pour faire passer avec succès les deux votes restants sur le budget à la Knesset, sous peine de déclencher automatiquement la chute du gouvernement.
Le budget a été adopté, alors que plus de 100 000 personnes manifestaient devant la Knesset contre la réforme du système judiciaire dans l’après-midi. Dans la soirée, des dizaines de milliers de personnes ont participé à un rassemblement de la droite en faveur de la refonte.
Lors de la présentation du budget à la Knesset, le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, a déclaré qu’il s’agissait d’une « étape cruciale » pour la promotion de la stabilité économique et qu’Israël abordait la crise économique mondiale actuelle dans de meilleures conditions « que n’importe quel autre pays du monde ».
« Nous pouvons en sortir les premiers et forts. Nous présentons un budget responsable qui contribuera à stabiliser l’économie et à empêcher l’aggravation de l’inflation. Le plus grand service que l’on puisse rendre aux citoyens israéliens est de lutter contre l’inflation », a-t-il déclaré.
Smotrich a dit espérer que l’opposition soutiendrait le budget, ajoutant que « nous continuerons à nous disputer sur les points sur lesquels nous ne sommes pas d’accord », mais qu’elle pourrait « s’identifier à beaucoup de points dans ce budget ».
Le chef d’Yisrael Beytenu, Avigdor Liberman, prédécesseur de Smotrich au ministère des Finances, a averti la Knesset que l’économie risquait de s’effondrer.
« L’État d’Israël, à partir du mois de juin, connaîtra la pire crise économique que nous ayons connue ces dernières années », a-t-il déclaré.
Avec une croissance de 7 % entre 2022 et 2023, le budget de base ne tient pas compte de l’inflation et des récentes mises en garde de la part de hauts responsables des Finances, qui estiment que les recettes de l’État devraient baisser en raison des répercussions économiques attendues, liées aux efforts déployés par la coalition pour accroître son propre pouvoir aux dépens du pouvoir judiciaire.
Lors de la publication du budget, un porte-parole du ministère du Logement a publié une déclaration indiquant que ses principaux objectifs sont la réduction du coût de la vie, la réduction de la concentration du marché et des barrières bureaucratiques dans le secteur des affaires, le développement des infrastructures et du parc immobilier, et la lutte contre l’argent non déclaré.
Les critiques maintiennent cependant que le budget est insuffisant pour réduire la flambée du coût de la vie, une promesse politique classique et une préoccupation prioritaire des électeurs lors des élections générales du mois de novembre.
L’économiste en chef du ministère des Finances, Shira Greenberg, a récemment révisé à la baisse de 10 milliards de shekels les prévisions de recettes pour l’année budgétaire 2023, les ramenant à 437 milliards de shekels seulement, ce qui entraînerait un déficit de fonctionnement de près de 52 milliards de shekels en 2023.
Dans la lignée de ce qui précède, Greenberg a mis en garde la semaine dernière contre une contraction annuelle possible des recettes de l’État qui pourrait atteindre 100 milliards de shekels, en raison des répercussions potentielles sur le classement d’Israël en matière de démocratie et de gouvernance, de l’abaissement de sa cote de crédit et de la frilosité des investisseurs si la réforme judiciaire était adoptée.
Le gouverneur de la Banque d’Israël, Amir Yaron, s’est fait l’écho de ces préoccupations sur CNN, déclarant que le remaniement judiciaire « hâtif » faisait peur aux investisseurs, qui représentent le moteur du secteur technologique israélien, si lucratif.
Lundi dernier, Greenberg a averti Smotrich que « les dommages causés aux revenus de l’État pourraient commencer à se manifester peu de temps après l’application de la réforme » et, compte tenu du calendrier du gouvernement, elle a recommandé de réviser les prévisions de revenus sur lesquelles le budget 2023-2034 a été construit.
Carrie Keller-Lyn a contribué à cet article.