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Le Festival d’Avignon fouille les plaies de l’Europe

40 créations seront présentées au public dans le "in", en résonance avec la montée des populismes ou le drame des migrants

La cour du palais des Papes, illuminée lors du festival d'Avignon en 1995. (Crédits : Daniel Cande / Gallica / Facebook)
La cour du palais des Papes, illuminée lors du festival d'Avignon en 1995. (Crédits : Daniel Cande / Gallica / Facebook)

Le 70e Festival d’Avignon, grand rendez-vous estival dans le sud de la France du théâtre européen, propose cette année de nombreuses pièces en résonance avec l’actualité brûlante, de la montée des populismes au drame des migrants.

Du 6 au 30 juillet, 40 créations sont programmées dans le festival officiel (« in ») et plus d’un millier dans le « off » qui s’est greffé depuis 50 ans sur la manifestation, de quoi attirer des dizaines de milliers de passionnés.

Le Flamand Ivo Van Hove ouvrira le festival dans l’imposante Cour d’honneur du Palais des Papes avec la troupe de la Comédie-Française qui jouera « Les Damnés », une adaptation du scénario d’un film sulfureux de Visconti (1969).

Ivo van Hove, qui fait partie de la poignée de metteurs en scène d’envergure mondiale que les grandes scènes s’arrachent, s’est saisi de l’histoire de cette grande famille allemande propriétaire d’aciéries convoitées par les nazis. Une descente aux enfers qui montre comment une société civilisée bascule dans la barbarie.

Ivo van Hove, metteur en scène belge, en 2010. (Crédits : Michiel Hendryckx / Wiki Commons)
Ivo van Hove, metteur en scène belge, en 2010. (Crédits : Michiel Hendryckx / Wiki Commons)

« Il y a beaucoup de raisons sur le plan politique de faire ce spectacle aujourd’hui », explique Ivo Van Hove. « On voit partout en Europe mais aussi dans le monde, en Amérique, une montée des populismes et de l’extrême droite ».

Un autre grand maître du théâtre européen, le Polonais Krystian Lupa, s’empare des « vieux démons » de l’Europe avec « Place des héros » de l’écrivain autrichien Thomas Bernhard. Le professeur Josef Schuster, qui a fui en 1938 l’Autriche de l’Anschluss, revient à Vienne dix ans plus tard pour se suicider.

Pour Krystian Lupa, la pièce s’inscrit aujourd’hui dans le contexte de « la nouvelle marée de xénophobie et d’antisémitisme qui traverse l’Europe », « le nouveau renfermement de la société face au progrès humaniste ».

L’artiste belge Anne-Cécile Vandalem, 37 ans, est partie « d’une inquiétude énorme sur la montée des nationalismes, sur la survenue de la guerre civile » avec « Tristesses », une pièce traitée comme un polar scandinave.

Spectacles marathon

Science-fiction ou réalité ? Dans « Ceux qui errent ne se trompent pas », écrite par les jeunes dramaturges français Kevin Keiss et Maëlle Poésy, c’est le déluge et la population désenchantée se détourne massivement de la politique. Le gouvernement en proie à la panique décrète « l’Etat d’inquiétude » et soumet les citoyens à des interrogatoires à la recherche d’un complot.

Quant à la tragédie des migrants, le metteur en scène Thomas Jolly la fait résonner dans « Le Radeau de la méduse », l’histoire de 13 enfants réfugiés sur un radeau de fortune après le torpillage de leur navire. L’auteur allemand Georg Kaiser, dénoncé comme un « écrivain dégénéré » par les nazis, est mort en exil en 1945.

Déchirures du monde d’aujourd’hui encore avec « Alors que j’attendais », du Syrien Mohamed Al Attar mis en scène par son compatriote Omar Abusaada. Un jeune homme battu à un check point est dans le coma mais son esprit resté éveillé observe le quotidien bouleversé de ses proches. Comme le héros de la pièce, la Syrie est « un pays ni vivant ni mort », dit le metteur en scène.

Habitué aux spectacles marathon, le festival d’Avignon ne déroge pas à la règle cette année avec le « livre monde », « 2666 », du Chilien Roberto Bolano, publié après sa mort en 2003, et monté en douze heures par Julien Gosselin. Le roman foisonnant, près de 1 400 pages en cinq livres qui convergent vers une petite ville du Mexique où sont assassinées des dizaines de femmes, est un « défi », reconnait Julien Gosselin. Pour lui, il s’agit rien de « rendre théâtralement la violence du monde ».

Autre roman fleuve, autre thématique : « Les frères Karamazov » de Dostoïevski sont adaptés en 5 heures par Jean Bellorini, le jeune directeur du Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis, dans le cadre impressionnant de la Carrière Boulbon.

Autour du parricide de Fiodor, le roman déploie la saga des frères Karamazov, dont Aliocha, le jeune frère dévoué et pieux. Pour Jean Bellorini, « Dostoïevski pose la question de la nécessité de Dieu. (…) Je pense qu’il y a vingt ans, ces questions résonnaient moins fort. Depuis les années 1970, on en était libéré. Aujourd’hui, on ne l’est pas du tout ».

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