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Le Hezbollah libanais pro-iranien condamne une « agression » de Ryad au Yémen

L'Arabie saoudite a dit agir pour soutenir le président Hadi, réfugié à Aden depuis sa fuite de Sanaa le mois dernier

Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah lors de son discours télévisé sur la chaîne du Hebollah Al-Manar, le 29 mars 2014 (Crédit : AFP Photo/Al-Manar)
Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah lors de son discours télévisé sur la chaîne du Hebollah Al-Manar, le 29 mars 2014 (Crédit : AFP Photo/Al-Manar)

Le Hezbollah libanais soutenu par l’Iran a condamné jeudi l’intervention de Ryad au Yémen, la qualifiant d’agression « américano-saoudienne » et appelant le royaume à cesser « immédiatement » ses opérations, selon un communiqué.

« Le Hezbollah condamne fermement l’agression américano-saoudienne visant le peuple yéménite frère (…) et appelle l’Arabie saoudite et ses alliés à cesser immédiatement et sans conditions cette agression injuste », a affirmé le groupe terroriste chiite.

« Cette aventure menée par l’Arabie saoudite n’est ni sage ni justifié (…) et mène la région à davantage de tensions et de dangers pour le présent et l’avenir de la région », a-t-il prévenu.

Le Hezbollah, tout comme les rebelles chiites Houthis visés par l’intervention saoudienne impliquant 10 pays, est soutenu par Téhéran, qui a été à l’origine de sa formation au Liban dans les années 1980.

Il est financé et armé par la République islamique et combat les rebelles en Syrie aux côtés du régime de Bachar al-Assad, autre allié de l’Iran.

Depuis le début de l’intervention saoudienne jeudi, la chaîne du hezbollah, Al Manar, a consacré une grande couverture à ce dossier. Cette même télévision diffusait régulièrement et en direct les discours du chef des Houthis, Abdel Malek Al-Houthi.

Le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah doit s’exprimer vendredi à 20H30 sur les « récents développements » dans la région.

L’intervention lancée par l’Arabie saoudite au Yémen provoque la colère de l’Iran, accusé de soutenir les rebelles chiites, qui met en garde contre le risque d’une propagation du conflit à d’autres pays du Moyen-Orient.

Téhéran a qualifié jeudi de « démarche dangereuse » l’intervention militaire lancée dans la nuit contre les rebelles chiites Houthis qui contrôlent la capitale Sanaa et menaçaient Aden, grande ville du sud du Yémen et fief du président Abd Rabbo Mansour Hadi.

Les relations entre l’Iran chiite et l’Arabie saoudite sunnite, deux poids lourds de la région, sont difficiles depuis plusieurs années, notamment par rapport à la Syrie, mais la crise au Yémen risque d’exacerber ces tensions.

Ryad a lancé des frappes pour stopper la progression des Houthis qui aurait permis à cette milice issue de l’importante minorité zaïdite d’étendre son emprise sur tout le territoire du Yémen, frontalier de l’Arabie saoudite, pays qui compte aussi une minorité chiite.

L’Arabie saoudite a dit agir pour soutenir le président Hadi, réfugié à Aden depuis sa fuite de Sanaa le mois dernier.

Mais pour le chef de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif, « toute action militaire de l’étranger contre l’intégrité territoriale du Yémen et son peuple ne donnera aucun résultat si ce n’est davantage de morts et d’effusion de sang ».

Cette intervention risque, selon lui, de faire le jeu des djihadistes.

Téhéran a « toujours averti les pays de la région et les pays occidentaux de faire attention à ne pas (…) aller dans le même sens qu’Al-Qaïda et Daech (un acronyme arabe du groupe Etat islamique) », a-t-il averti, selon la chaîne iranienne arabophone Al-Alam, en référence à l’EI qui a revendiqué son premier attentat la semaine dernière au Yémen.

L’Iran est très impliqué dans la lutte contre l’EI en Irak où le groupe jihadiste contrôle de vastes régions. Téhéran fournit notamment une aide militaire à Bagdad pour reprendre au groupe la ville de Tikrit, dans le nord du pays.

L’Iran nie tout rôle

L’Iran a nié tout rôle dans la prise du pouvoir à Sanaa par les rebelles Houthis, mais des responsables à Téhéran ont critiqué M. Hadi pour avoir refusé de démissionner l’accusant d’avoir aggravé la crise.

De hauts commandants des Gardiens de la révolution, corps d’élite des forces armées iraniennes, ont déclaré pour leur part que la révolution islamique de 1979 était à présent exportée à travers la région, notamment au Yémen, en Syrie et en Irak.

L’action militaire saoudienne, menée dans le cadre d’une coalition, va « encore plus compliquer la situation et étendre la crise », a prévenu la porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Marzieh Afkham.

« Cette agression ne donnera aucun résultat, sauf qu’elle provoquera une propagation du terrorisme et de l’extrémisme, et une augmentation de l’insécurité à travers la région », a-t-elle prévenu, appelant à un arrêt immédiat des frappes aériennes sur le Yémen.

L’élection du président iranien Hassan Rohani en 2013 avait quelque peu réchauffé les relations entre Téhéran et Ryad, mais cela n’a pas duré en raison de la politique pétrolière de Ryad et des négociations nucléaires qui pourraient aboutir à un accord entre l’Iran et les grandes puissances.

Mais la réaction jeudi de Téhéran pourrait signaler sa volonté d’empêcher que leurs divergences n’aboutissent à un point de non retour, estime un expert.

« Les Iraniens veulent empêcher que leur guerre froide avec les Saoudiens ne dégénère en un conflit chaud à cause du conflit au Yémen », assure Ali Vaez, de l’International Crisis Group.

Le président de la Commission de la sécurité nationale et politique étrangère au Parlement, Alaeddine Boroujerdi, a qualifié l’Arabie saoudite d' »irresponsable ».

« Le fait que l’Arabie saoudite ait attisé les flammes d’une nouvelle guerre dans la région montre qu’elle est imprudente », a-t-il ajouté selon l’agence de presse Fars, estimant que cela allait se retourner contre le royaume.

M. Boroujerdi, qui a appelé à un règlement politique, a en outre affirmé que Ryad et les pays du Golfe n’auraient jamais pu lancer une telle intervention sans « autorisation américaine ».

Et d’accuser Washington d’avoir « initié une nouvelle crise dans le monde musulman ».

Les Etats-Unis, alliés du président yéménite dans la lutte contre Al-Qaïda, ont annoncé fournir un soutien en logistique et en renseignement à la coalition.

L’UE s’inquiète des « risques de graves conséquences régionales »

L’Union européenne s’est inquiétée jeudi des « risques de graves conséquences régionales », après l’intervention militaire saoudienne au Yémen contre les rebelles chiites soutenus par Téhéran, en se disant « convaincue que l’action militaire n’est pas une solution ».

« Les derniers événements au Yémen ont considérablement aggravé une situation déjà fragile dans le pays, et risquent d’avoir de graves conséquences régionales », a affirmé dans un communiqué la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini.

« Je suis convaincue que l’action militaire n’est pas une solution », a-t-elle ajouté, après l’intervention militaire déclenchée jeudi par l’Arabie Saoudite pour contrer l’avancée de rebelles chiites soutenus par l’Iran, qui a vivement dénoncé cette opération.

L’UE a appelé « tous les acteurs régionaux » à « agir de manière responsable et constructive, afin de créer de façon urgente les conditions pour un retour aux négociations ». « L’UE renouvelle son soutien à tous les efforts en cours à cet effet, en particulier ceux de l’ONU et des acteurs régionaux ».

« L’avancée hier vers Aden des forces houthis et des unités militaires loyales à l’ex-président Saleh, de même que les frappes aériennes sur le palais du président Hadi constituaient une escalade inacceptable (…), et ont déclenché les raids aériens menés par les Saoudiens », a souligné l’UE.

« Seul un large consensus politique à travers des négociations peut apporter une solution durable, restaurer la paix et préserver l’unité et l’intégrité territoriale du Yémen. Sinon la capacité de groupes extrémistes et terroristes à tirer avantage de la situation augmentera de manière considérable », a estimé Mme Mogherini.

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