Le monde de la culture pleure Ronit Elkabetz
L'actrice et réalisatrice israélienne Ronit Elkabetz, décédée mardi à l'âge de 51 ans à Tel-Aviv, était une artiste engagée qui s'était fait un nom à l'étranger, militante des droits des femmes et critique de la société israélienne
Cette ambassadrice du cinéma israélien partageait son temps entre Israël et la France, où elle a tourné plusieurs films dont « La fille du RER » d’André Téchiné, aux côtés de Catherine Deneuve.
En 2015, elle avait été nominée pour son film « Gett, le procès de Viviane Amsalem », co-réalisé avec son frère cadet, pour les Golden Globes. Bien plus que pour la gloire, elle entendait faire de cette compétition un porte-voix pour les femmes israéliennes.
Le « Gett’ est ce parchemin que le mari doit accorder à son épouse pour qu’un tribunal rabbinique –les seuls en charge des affaires familiales en Israël– lui accorde le divorce.
Et en portant sur les écrans ce sujet habituellement évoqué à huis clos, elle confiait l’année dernière à l’AFP vouloir aider à obtenir un changement de la loi rabbinique ancestrale.
Visage pâle, cheveux noirs et les yeux toujours soulignés de khôl, Ronit Elkabetz se trouvait souvent des deux côtés de la caméra, incarnant des femmes fortes ou à la dérive. Souvent mère à l’écran, elle avait à la ville deux enfants.
Le ‘rêve’ français
Rien ne prédestinait pourtant cette fille d’émigrés juifs religieux du sud marocain au cinéma et à ses rôles de prostituée, de transsexuelle ou tout simplement de femme libre.
Elle naît en 1964 à Beer Sheva, dans l’Israël méridional et séfarade où beaucoup ne parlent alors que l’arabe. Ses parents, un postier et une coiffeuse, mettent un point d’honneur à ce que leurs enfants n’apprennent que l’hébreu.
Alors qu’elle est devenue une icône du cinéma israélien, qu’elle accumule tournages et récompenses, l’actrice, scénariste et réalisatrice décide de tout plaquer en 1997 pour rejoindre Paris et réaliser son « rêve » : travailler dans le cinéma en France.
Elle commence par écumer les coulisses du Théâtre du Soleil d’Ariane Mnouchkine puis elle est révélée par « Mariage Tardif » (2001) puis par le succès de « La visite de la fanfare » (2007), prix du jury Un Certain Regard à Cannes. Elle joue également dans « Cendres et sang » (2010) de Fanny Ardant.
Elle poursuit parallèlement son chemin à travers les méandres de la mémoire. En 2004, elle offre le premier volet de sa trilogie familiale avec « Prendre femme », inspiré en partie de la figure de sa mère, puis « Les Sept jours » (2007), huis clos autour de la période traditionnelle de deuil, et « Gett » en 2014.
Cinéma engagé
Sur le plan politique, elle a été critique d’Israël, notamment lors de l’offensive contre la bande de Gaza durant l’été 2014. Elle a interpellé le gouvernement de Benjamin Netanyahu, réclamant un cessez-le-feu pour « les enfants de Gaza ».
Elle n’en restait pas moins une « ambassadrice culturelle exceptionnelle d’Israël » selon les mots de l’ancien président israélien Shimon Peres.
« Si le cinéma israélien est aussi riche, qu’on en voit autant tous les ans à Cannes, ça lui doit beaucoup », assure pour sa part à l’AFP Charles Tesson, délégué général de la Semaine de la critique, la sélection parallèle du Festival de Cannes dont Ronit Elkabetz avait présidé le jury l’an dernier.
De la Semaine de la critique à la Quinzaine des réalisateurs en passant par la sélection officielle cannoise, tous ont salué une « figure incontournable » du cinéma israélien, « sorte d’écorchée vive ».
Une « artiste engagée », « admirée pour son charisme et sa beauté » et qui « regardait la société israélienne droit dans les yeux », renchérit la présidente du Centre national du Cinéma (CNC) Frédérique Bredin.
La ministre française de la Culture Audrey Azoulay a rendu hommage à une « très grande amie de la France », une femme « généreuse, inspirée, exigeante » qui « défendait une certaine idée du cinéma, indépendant et engagé ».
Une cérémonie en son honneur est prévue mercredi à la mi-journée à la Cinémathèque de Tel-Aviv, et son enterrement aura lieu ensuite à 12H00 GMT au cimetière Kiryat Shaul de Tel-Aviv, près de Jaffa, ville jumelle de la capitale économique israélienne où vit une importante minorité arabe.
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