Le photojournaliste Ziv Koren montre au monde ce qui est arrivé le 7 octobre
Cette collection d'images présentant des personnes et des endroits - un grand nombre d'entre elles sont violentes - sont à découvrir au Centre Peres

Dans la matinée du 7 octobre, après avoir été brutalement tiré de son sommeil par le bruit des sirènes qui annonçaient des tirs de roquette en provenance de Gaza, le photojournaliste Ziv Koren avait enfourché sa moto en direction du sud du pays pour capturer l’horreur du massacre qui était en train d’être perpétré par les hommes armés du Hamas.
Il avait photographié des corps sans vie qui se trouvaient encore dans des voitures immobilisées sur la route, des cadavres jonchant les abords d’un arrêt de bus et la bataille dévastatrice qui avait eu lieu au commissariat de police de Sderot.
Des dizaines de ces clichés – ainsi qu’un grand nombre d’autres photographies qui ont été prises au cours des huit derniers mois – sont rassemblées dans une exposition sobrement appelée « 7 octobre », une exposition qui est à découvrir au Centre Peres pour la paix et l’innovation à Jaffa.
Elle s’est installée dans tout le premier étage du Centre qui, en temps de paix, sert habituellement à faire découvrir aux groupes de touristes les innovations israéliennes dans les secteurs des soins de santé, de la sécurité, de l’agriculture et des technologies.
Mais aujourd’hui, les visiteurs qui pénètrent dans le bâtiment sont accueillis par un diaporama mural gigantesque qui présente certaines des photos les plus bouleversantes du 7 octobre et des jours qui ont suivi l’attaque – un assaut meurtrier où les hommes armés avaient tué 1 200 personnes, en majorité des civils, dans le sud d’Israël et où ils avaient enlevé 251 personnes, prises en otage dans la bande de Gaza. Près de la moitié des otages sont encore retenus en captivité au sein de l’enclave côtière.
« Je continue à prendre des photos », explique Koren, âgé de 53 ans, photojournaliste indépendant depuis longtemps, qui fume cigarette sur cigarette lors de notre entretien qui se déroule aux abords du Centre Peres, surplombant la mer Méditerranée.
Koren déclare ressentir en lui la nécessité de continuer à capturer les moments de cette nouvelle vie post-7 octobre en Israël, et de les révéler au monde.

Il a passé les huit derniers mois avec les troupes de Tsahal à Gaza, à photographier les destructions dans les kibboutzim ou les blessés en cours de rééducation.
Certains d’entre eux ont créé un lien particulier avec Koren, qui a continué à les suivre. Il y a notamment eu Mia Schem, prise en otage par le Hamas et libérée au cours d’une trêve d’une semaine qui avait eu lieu au mois de novembre. Koren raconte qu’il a suivi l’intervention chirurgicale à laquelle elle a été soumise lors de son rapatriement en Israël, son rétablissement à l’hôpital et, enfin, son retour dans sa ville natale de Shoham.
Koren est aussi allé photographier régulièrement Gali Segel et Ben Benjamin, un couple qui était parvenu à prendre la fuite lors de l’attaque du festival de musique électronique Supernova. Tous les deux avaient perdu leur jambe droite dans cette cavale désespérée. Ils se sont mariés depuis.
Il a aussi suivi de près la famille Golan — Ellay, Ariel et leur toute petite fille, Yael — qui avaient été grièvement brûlés pendant le massacre du Hamas alors qu’ils se trouvaient dans leur habitation du kibboutz Kfar Aza.
« C’est ma version de la diplomatie publique israélienne », explique Koren. « Il faut enseigner aux gens ce qui est arrivé ici ».
Dans une autre galerie, une demi-douzaine d’écrans ont été installés. Ils montrent, chacun, une centaine de clichés rassemblés autour d’une thématique précise : les opérations de l’armée à Gaza ; les destructions causées le 7 octobre, les victimes blessées et en cours de rééducation.

Sur les murs d’une autre galerie, il y a des photos consacrées aux otages enlevés par le Hamas – certaines montrant les mouvements de protestation en faveur de la libération des captifs, d’autres montrant les soldats en train de parcourir les tunnels à Gaza en quête d’un signe de leur présence ou de leur passage.
Au total, l’exposition est l’occasion de découvrir des centaines de clichés choisis parmi les 3 000 photos prises au cours des huit derniers mois par le photojournaliste.
« L’idée est de ne pas séparer la guerre des otages », dit Koren, qui versera toutes les recettes issues de l’exposition et du livre qui l’accompagne au Forum des Familles d’otages et de portés-disparus. « C’est un narratif, ça raconte une histoire de manière à ne pas oublier pourquoi les soldats se trouvent dans ces tunnels ».
A l’extrémité de la dernière galerie, une grande image qui est composée de quatre photos des corps sans vie de victimes assassinées le 7 octobre. Les familles ont donné leur accord pour qu’elles soient exposées.
Au moment de son entretien avec le Times of Israel, Koren est sur le point de rencontrer la famille d’un jeune homme qui avait tenté de fuir, dans sa voiture, de la rave-party Supernova mais qui avait été abattu par les terroristes. Son corps avait été laissé au bord de la route, gisant à côté du cadavre de son ami. Il explique que la famille est venue découvrir l’exposition.

« J’avais vu des choses terribles dans ma vie mais je pense que c’est le travail de documentation le plus important que j’ai réalisé jusqu’à présent », s’exclame Koren. « Impossible pour moi de ne pas me montrer et de m’éloigner de ces 3 000 Israéliens qui ont été tués dans leur lit, dans leur voiture ou dans leur maison. Nous vivons actuellement un moment historique, le moment le plus difficile et le moment le plus horrible depuis la Shoah ».
Koren n’avait initialement pas prévu de faire une exposition – mais après avoir reçu des demandes de la part de plusieurs ambassades qui, en Europe, voulaient pouvoir utiliser ces photos, il a constaté qu’il était déterminant de partager ces clichés avec le monde entier.
« Vous avez envie que les gens comprennent, vous voulez que les prochaines générations puissent voir cela », explique-t-il.
Il confie avoir eu un sentiment similaire lorsque les responsables du Centre Peres lui ont demandé de mettre en place une exposition qui serait ouverte au public.
« Les gens peuvent accéder aux photos ici. C’est comme une sorte de Yad Vashem », indique Koren, établissant une similarité entre son exposition et le musée national de la Shoah, à Jérusalem. « Les gens veulent venir et ils veulent pouvoir s’identifier à ce qu’ils voient, ou traverser quelque chose de profondément émotionnel ici. Nous avons cette tendance naturelle à mettre tout ça de côté et à simplement nous focaliser sur la dernière information qui nous a été communiquée… mais en venant ici, vous réalisez qu’il y a réellement une chronologie dans tout ce qui est arrivé, c’est bouleversant et nous sommes encore en plein dedans. »

Cela fait des mois que Koren travaille sans s’arrêter.
Certains jours, il se rend d’abord dans le sud pour y photographier des soldats ou des habitants des kibboutzim avant de remonter sur sa moto pour s’aventurer vers le nord, à Tel Aviv, pour y capturer des images des familles d’otages qui manifestent aux abords du ministère de la Défense, dans la soirée.
Il sait que c’est devenu pour lui une obsession mais il ne prévoit pas pour autant de cesser ce travail – en particulier lorsqu’il a le sentiment d’avoir créé un lien avec une histoire spécifique.
« Je recherche les histoires pertinentes qui présentent une valeur ajoutée », indique-t-il. « Je suis allé chez mes parents pour le repas du Seder, à Pessah et je n’ai tout simplement pas pu y rester – je suis allé place des Otages » où des centaines de membres du kibboutz Beeri avaient organisé un Seder, ensemble. « On voit bien qu’il y a quelque chose, dans ces familles, qui raconte une histoire énorme de deuil et de souffrance. J’en fais partie et je suis là ».
L’exposition « 7 octobre », au Centre Peres, sera à découvrir au moins jusqu’au 7 octobre 2024, la date qui marquera le premier anniversaire du massacre commis par le Hamas.
« Je continue à prendre des photos, affirme Koren. « Je peux toujours en ajouter un plus grand nombre ».
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