Le Premier ministre malaisien provoque les rires avec une moquerie antisémite
Un débat a accueilli Mahathir Mohamad, qui a expliqué avoir des amis juifs "qui sont différents des autres Juifs" ; une organisation juive a jugé "effrayante" la réaction du public

Le Premier ministre de Malaisie, Mahathir Mohamad, qui n’a jamais caché son antisémitisme, a déclaré dimanche soir devant la société de débat Cambridge Union que s’il avait des amis juifs, « ils ne sont pas comme les autres Juifs et c’est bien pour ça qu’ils sont mes amis », provoquant une certaine hilarité dans la salle.
L’Union des étudiants juifs britanniques (UJS) a dénoncé ces propos tenus lors d’un événement organisé à Cambridge, estimant qu’ils étaient une incitation à la haine antijuive.
Une vidéo de l’incident a été publiée sur les réseaux sociaux, le lendemain, par l’Union des étudiants juifs, qui a déclaré dans un communiqué qu’il était « effrayant de voir des personnes s’esclaffer devant des propos clairement antisémites ».
« La liberté de parole n’est pas une plaisanterie lorsqu’elle incite à la haine contre une population », a ajouté l’UJS.
“I have some Jewish friends, very good friends. They are not like the other Jews, that’s why they are my friends"- Malaysian PM Mahathir Mohamad at the Cambridge Union last night.
The audience laughs.
Freedom of speech is not a joke when it incites hatred against one people. pic.twitter.com/2ZRrMDtfKy
— Union of Jewish Students (@UJS_UK) June 17, 2019
Mahathir, qui a des antécédents en termes de discours raciste concernant les Juifs, était interrogé par Alam Davies, du bureau du président de la Cambridge Union, sur son attitude envers les Juifs et notamment au sujet d’une déclaration passée où il avait expliqué que les Juifs étaient « enclins à aimer l’argent ».
« Pourquoi dites-vous que les Juifs, en général, sont enclins à aimer l’argent ? », avait demandé Davies. « Il y a énormément de Juifs – la plupart d’entre eux – qui se préoccupent des droits de l’Homme, qui se préoccupent de la justice sociale, qui se préoccupent de la démocratie ».
« J’ai des amis juifs, de très bons amis », avait alors répondu Mahathir.
« Ils ne sont pas comme les autres Juifs, et c’est bien pour ça qu’ils sont mes amis », avait-il alors ajouté.
Des rires brefs avaient alors émané de certaines parties du public. La Cambridge Union a ensuite expliqué qu’ils étaient venus de la délégation de Mahathir.
« En ce qui concerne le clip en question, les rires provenaient de la section du milieu qui était composée de la délégation du Premier ministre », a précisé la Cambridge Union, la plus ancienne société de débat du monde, dans un communiqué.
La Cambridge Union a défendu son invitation lancée à Mahathir, disant maintenir « une tradition de promotion de la liberté d’expression ». Elle a noté avoir invité la Jewish Society de Cambridge à assister au débat pour poser des questions et à distribuer des prospectus aux membres du public « dans l’intérêt du libre débat ».
— The Cambridge Union (@cambridgeunion) June 17, 2019
Le journal britannique Jewish Chronicle a fait savoir que plusieurs anciens présidents de la Cambridge Union avaient condamné l’incident. La journaliste Lauren Davidson, ancienne dirigeante de l’Union, a qualifié « d’immondes » les propos tenus par Mahathir.
Selon le journal, Mahathir s’était présenté devant la Oxford Union, un groupe de débat similaire, où il avait défendu son droit à être antisémite dans le cadre de la liberté d’expression.
« Nous avons la liberté de dire ce que nous voulons dire. Nous pouvons dire quelque chose qui sera considéré comme antisémite par les Juifs », avait-il dit à ce moment-là, selon le reportage. « C’est leur droit d’avoir une telle opinion de moi. Et c’est mon droit de leur dire qu’ils ont fait beaucoup de mal ».
Dans son livre « Le Dilemme malais », écrit en 1970, Mahathir disait que « les Juifs n’ont pas simplement le nez crochu, mais ils comprennent aussi l’argent de manière instinctive », s’appuyant sur deux tropes antisémites célèbres qui avaient été utilisés par les nazis pour déshumaniser les Juifs.
Le chef du gouvernement malaisien avait également estimé que le consensus entre les historiens portant sur le chiffre de six millions de Juifs exterminés pendant la Shoah était mensonger. Il avait avancé pour sa part le nombre de quatre millions.
S’entretenant avec la BBC au mois d’octobre, il avait réaffirmé ses propos sur les caractéristiques faciales des Juifs, insistant sur le fait qu’ils ont « le nez crochu ».

Mahathir, soutien de longue date de la cause palestinienne, avait également attribué à Israël la responsabilité des déboires connus par le Moyen-Orient.
« Si on doit dire la vérité, le problème, au Moyen-Orient, a commencé avec la création d’Israël. C’est la vérité. Mais je n’ai pas le droit de le dire », avait-il clamé.