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Le quotidien des Juifs de France, « pas le même » que celui des autres citoyens

Réactions de Simone Rodan, directrice Europe de l’AJC, Dominique Reynié, politologue, et Elie Korchia, président du Consistoire, suite à une enquête saisissante sur l'antisémitisme

Le cimetière municipal de Fontainebleau (Seine-et-Marne), le 28 décembre 2020, où des tombes ont été profanées par des croix gammées. (Crédit : Frédéric Valletoux / Twitter)
Le cimetière municipal de Fontainebleau (Seine-et-Marne), le 28 décembre 2020, où des tombes ont été profanées par des croix gammées. (Crédit : Frédéric Valletoux / Twitter)

Nombreuses sont les réactions suite à l’enquête Ifop publiée mardi et réalisée pour l’American Jewish Committee (AJC) et la Fondation pour l’Innovation politique. Celle-ci rapporte que 68 % des Français juifs déclarent avoir déjà subi moqueries et vexations, et 20 % avoir été victimes d’agressions physiques. 85 % des Français juifs, et 64 % de l’ensemble de la population, estiment eux que l’antisémitisme est un sentiment répandu en France, en particulier quand les victimes portent des signes religieux distinctifs.

Au même moment, le ministère de l’Intérieur a révélé que 589 faits antisémites avaient été recensés en 2021, un chiffre en baisse de 14 % par rapport à 2019 (les inscriptions antisémites, au nombre de 227, ont été les plus courantes en 2021, devant les 189 gestes ou propos menaçants relevés, suivis par 63 tracts et courriers antisémites, 60 violences physiques, 38 dégradations, neuf vols et trois incendies).

Interviewée par Le Parisien, Simone Rodan, directrice Europe de l’AJC, a déclaré que l’antisémitisme aujourd’hui « ne prend plus tout à fait le même visage, il se transforme ».

Elle a affirmé que le quotidien des Juifs français « n’est pas le même » que celui des autres citoyens. Selon elle, « la plupart des Juifs ont intégré l’existence d’une menace et ont adopté une stratégie de dissimulation ».

« Ceux qui portent des signes religieux les cachent dans certains lieux, beaucoup évitent de dire qu’ils sont Juifs à l’école ou au bureau. Cela s’observe particulièrement lors des moments de tensions au Proche-Orient entre Israël et les Palestiniens », a-t-elle affirmé.

Si elle estime qu’il « faut certes parler de la Shoah, parler du passé ne suffit pas ». Il est ainsi nécessaire d’analyser et de combattre les nouvelles formes d’antisémitisme, a-t-elle déclaré, estimant qu’on pleure les Juifs morts il y a longtemps, mais que la société a « beaucoup plus de mal » à protéger ceux qui sont vivants.

Simone Rodan affirme que les dirigeants politiques ont compris que l’antisémitisme aujourd’hui prenait surtout la forme de l’ant-isionisme, mais qu’il n’y a pas assez de pédagogie à ce sujet et qu’il y a des « non-dits ».

« 1 % de la population française cumule 40 à 50 % des actes racistes commis dans le pays », a-t-elle finalement résumé.

Dans l’article du Parisien révélant les chiffres de l’enquête, le politologue Dominique Reynié a lui affirmé que « nous n’aurions pas eu un chiffre aussi élevé il y a encore quelques années ».

L’enquête révèle aussi que le premier lieu où sont vécues les insultes antisémites serait l’école (pire, 18 % des parents sondés affirment que leur enfant a été agressé physiquement parce que Juif). À ceci, Dominique Reynié affirme : « Quel contraste entre le discours sur l’école et sa fonction d’intégration, de partage des valeurs, et cette réalité où l’école est un endroit dangereux pour les enfants juifs : c’est un échec politique. »

« En Seine-Saint-Denis, dans certains quartiers parisiens, les familles en viennent à quitter l’enseignement public, c’est bouleversant », a alerté Simone Rodan.

Elie Korchia, 50 ans, avocat au barreau de Paris, vice-président du Consistoire de Paris depuis 2010 et président du conseil des communautés juives des Hauts-de-Seine depuis 25 ans, le 18 octobre 2021. (Crédit : JOEL SAGET / AFP)

Suite à l’enquête, Elie Korchia, président du Consistoire de France, a lui dénoncé sur France Info « un antisémitisme ordinaire et banalisé » qui « ne concerne pas que les Juifs » et que « la République entière » doit combattre. Il appelle à ce qu’un « travail » soit mené contre le phénomène.

« Le combat contre l’antisémitisme, qui est consubstantiel d’ailleurs de la mémoire de la Shoah qui est un élément très fort dans ce combat contre l’antisémitisme, concerne la République française », a-t-il ajouté.

Il a affirmé ne pas être « surpris » par les chiffres révélées par l’enquête. « Nous connaissons, nous travaillons sur ces chiffres, sur ce ressenti qui existe évidemment au sein de la communauté juive. […] Il y a eu cette banalisation du mal, pour reprendre un terme historique bien connu. On s’est habitué et il n’y a rien de pire que de s’habituer à l’antisémitisme du quotidien », a-t-il déclaré.

« La haine de l’autre, n’est pas exclusive de la haine du Juif. Nous sommes Français juifs dans ce pays constamment en alerte parce que nous subissons un triple problème. Un antisémitisme qui vient traditionnellement de l’extrême droite. On le connaît. Il continue. Il continue à exister très fortement. Un antisémitisme qui s’est développé venant de l’extrême gauche, très souvent associé à un antisionisme virulent, qu’il faut combattre aussi. Et puis, enfin, l’antisémitisme qui est venu ces dernières années du terrorisme et qui est basé sur l’islam radical. Et ça aussi, c’est important que celles et ceux qui nous écoutent sachent qu’il faut combattre cette triple volonté d’attaquer l’autre, en l’occurrence le Juif. »

Concernant le nombre d’actes antisémites recensés en France en 2021, il déclare : « 600 actes [589, NDLR], ça peut paraître en baisse par rapport à 2019 qui était une année avec un pic des actes antisémites mais ce qui est terrible, c’est qu’on a atteint un certain plateau avec des chiffres qui restent particulièrement inquiétants. Là encore, on ne peut pas s’habituer à ce type de chiffres. Ça reste des agressions physiques, des agressions dans le quotidien d’hommes et de femmes. Et ça, ça reste extrêmement préoccupant. »

Enfin, Elie Korchia a estimé aussi que les propos négationnistes, en référence aux polémiques provoquées par Eric Zemmour, « n’ont pas à servir le débat public comme cela est fait aujourd’hui ».

« Je n’accepterai aucune déclaration qui puisse remettre en cause la vérité historique qui est celle de notre pays. C’est une façon de falsifier l’histoire. On ne peut pas accepter, voir, écouter un candidat à la présidentielle qui puisse dire que, finalement, Pétain a sauvé des Juifs. Quand on connaît ce qu’il s’est passé, quand on sait que ce combat pour la mémoire de la Shoah est fondamental, c’est particulièrement choquant d’entendre ce type de déclaration », a-t-il déclaré.

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