Le rabbin Lau suspend l’inhumation d’une femme pour que son fils accorde le guet
Après l'annonce de cette sanction extrême, l'homme, un Juif américain, a accepté de mettre officiellement fin au mariage religieux, après plus de 10 ans de refus
Stuart Winer est journaliste au Times of Israël
Le grand-rabbin ashkénaze d’Israël David Lau a ordonné mardi que l’enterrement d’une femme à Jérusalem soit mis en attente jusqu’à ce que le fils de la défunte accepte de remettre à sa femme un acte de divorce religieux.
Quelques heures plus tard, l’homme en question s’est dit disposé à accorder le guet, et l’enterrement a pu avoir lieu, selon les médias.
La femme, dont le corps a été emmené en Israël depuis les Etats-Unis, devait être enterrée au mont des Oliviers mardi, mais Lau a ordonné à la société funéraire de suspendre les démarches jusqu’à ce que son fils, basé aux Etats-Unis, remette les papiers du divorce à un tribunal rabbinique.
Lau a déclaré que cette mesure a été prise pour faire pression sur le mari, un homme ultra-orthodoxe, pour qu’il libère la femme des liens du mariage juif, ce qu’il refusait de faire depuis plus d’une décennie.
« Quand on a épuisé toutes les options, nous avons informé la société funéraire de ne pas enterrer la mère tant que le fils n’avait pas déposé de divorce casher », a-t-il écrit pour expliquer sa décision. « Nous espérons que cela permettra de finaliser prochainement le divorce et que la femme sera libérée. »
En vertu de la loi juive, une femme ne peut pas se remarier tant qu’elle n’a pas obtenu le divorce religieux des mains de son ex-mari.
Lau a agi en accord avec une décision de l’Union des rabbins orthodoxes des Etats-Unis et du Canada, une instance ultra-orthodoxe aussi appelée Agudas HaRabbanim, qui a appliqué des mesures punitives contre le mari récalcitrant il y a quelques années.
Les rabbins américains ont notamment établi qu’il fallait refuser à cet homme le droit d’enterrer sa famille, selon le site BeHadrei Haredim. L’Agudas HaRabbanim a déclaré que la défunte avait soutenu son fils dans sa démarche de refus de guet.
L’Agudas HaRabbanim a contacté Lau et l’a appelé à appliquer sa décision et à interdire l’enterrement de la mère.
Selon l’article, l’homme se serait séparé de sa femme il y a plus de dix ans, et, tout en lui refusant le divorce, a réussi à se remarier en se basant sur une méthode rare validée par une autre instance rabbinique, non reconnue par l’Agudas HaRabbanim.
Lau a écrit qu’il s’agissait d’un cas « extrêmement grave », dans lequel le mari avait empêché sa femme de refaire sa vie « tout en épousant illégalement une seconde épouse ».
Le Center for Women’s Justice, une organisation qui aide les agounot – femmes « enchaînées » par des maris récalcitrants – a vivement critiqué cette affaire.
« Il n’y a aucun autre moyen de mettre fin à un mariage juif que d’attendre que Son Excellence le Mari y consente ? Il n’y a aucun autre moyen de résoudre la tragédie qui frappe tant de femmes si ce n’est de porter atteinte à l’honneur de la défunte mère du mari ? », a demandé le groupe.
Les tribunaux rabbiniques ont tenté de faire face à ce fléau en faisant pression sur les maris récalcitrants par tous les moyens légaux dont ils disposent, notamment des amendes et des excommunications. En Israël, où les tribunaux rabbiniques sont reconnus par l’Etat, certains ont été emprisonnés pendant plusieurs années.
En avril, un Israélien a fini par donner le divorce à sa femme après avoir été limogé de son poste et emprisonné pour son refus de donner le guet.