Le témoignage de Netanyahu devrait durer encore 9 à 14 mois
L'équipe chargée de la défense du Premier ministre demande que les audiences prévues soient réduites de trois à deux fois par semaine ; le Premier ministre a insisté sur "son droit à répondre à chaque clause de l'acte d'accusation"
Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.

Le témoignage du Premier ministre Benjamin Netanyahu dans son procès pour corruption se poursuivra probablement pendant au moins neuf mois supplémentaires, peut-être jusqu’en avril 2026, ont déclaré les avocats des deux parties lors d’une audience qui s’est tenue lundi.
L’avocat de la défense de Netanyahu, Amit Hadad, a dit aux juges du tribunal de district de Jérusalem qu’il aurait besoin de 24 audiences supplémentaires pour terminer son principal interrogatoire du Premier ministre tandis que Yoni Tadmor, du bureau du procureur de l’État, a déclaré que les procureurs auraient besoin de trois fois plus d’audiences pour procéder à leur contre-interrogatoire.
Ce qui signifie que Netanyahu, qui est déjà venu à dix reprises à la barre des témoins, devrait le faire 126 fois de plus – 24 pour être répondre aux questions de Hadad et 102 à l’occasion du contre-interrogatoire du parquet.
Jusqu’à présent, Netanyahu était appelé à témoigner trois fois par semaine – ce qui n’a pourtant pas encore été le cas depuis qu’il a commencé son témoignage, le 10 décembre 2024. Ses avocats ont demandé, lundi, que les audiences prévues soient ramenées à deux fois par semaine, ce qui signifie que les 126 audiences à venir prendraient 63 semaines de plus.
Le procès avait débuté au mois de mai 2020 – et il approche rapidement de sa cinquième année. Même après la fin du témoignage de Netanyahu, son équipe de défense aura encore une liste d’autres témoins à appeler à la barre. S’il est condamné, le Premier ministre pourra faire appel devant la Cour suprême.
Au terme de l’audience, lundi, Netanyahu a demandé, lors d’une session à huis-clos, que l’audience de mardi soit annulée en raison de problèmes liés à la sécurité et à la diplomatie qu’il a affirmé devoir gérer en urgence. Il a également demandé que le nombre d’audiences par semaine passe de trois à deux en raison des tensions sécuritaires en cours et de la situation diplomatique complexe qui est actuellement celle d’Israël.

La Cour a accepté la demande d’annulation de l’audience de mardi, déclarant qu’elle examinera la requête portant sur la réduction du nombre d’audiences par semaine après avoir reçu une proposition de l’équipe de la défense concernant d’éventuelles options qui permettraient à d’autres témoins de la défense de venir à la barre une fois par semaine, si l’un des jours prévus pour le témoignage de Netanyahu devait être définitivement annulé.
La défense doit présenter sa proposition avant le 20 février. Les juges solliciteront ensuite l’avis du bureau du procureur de l’État sur la question.
Pendant l’audience de lundi, Hadad a continué à aborder les 315 exemples présentés dans l’acte de mise en examen émis à l’encontre de Netanyahu les uns après les autres – avec des accusations qui laissent penser que le Premier ministre, des membres de sa famille ou ses proches collaborateurs seraient intervenus dans la couverture médiatique des actions du chef de gouvernement sur le site d’information Walla.
Les exemples présentés sont autant d’éléments au cœur des accusations lancées par Netanyahu, qui est mis en cause pour avoir, semble-t-il, conclu un accord illicite avec le propriétaire de Walla, Shaul Elovitch. Hadad est parvenu à soulever de sérieux doutes en ce qui concerne l’exactitude et la pertinence de nombreux exemples jusqu’à présent – il en a abordé une soixantaine jusqu’à aujourd’hui.
Des voix se sont élevées et les esprits se sont échauffés, lors de l’audience de lundi, quand les magistrats ont demandé à Hadad de réduire le temps qu’il consacre aux exemples et de les évoquer de façon plus générale, sans les passer en revue les uns après les autres.
Hadad a fait savoir à la Cour qu’il avait besoin de 12 à 14 audiences supplémentaires pour couvrir l’Affaire 4000, qui concerne des accusations de relations illégales qui s’étaient tissées entre Netanyahu et Elovitch – avec notamment des faits de corruption – et dix autres audiences pour les Affaires 1000 et 2000, où Netanyahu doit répondre de fraude et d’abus de confiance.
L’équipe chargée de la défense de Netanyahu avait précédemment annoncé qu’elle réduirait le temps consacré aux exemples si l’accusation retirait ceux qui ne semblaient pas liés aux actions du Premier ministre mais le bureau du procureur général avait refusé – ce qui avait amené Hadad à insister sur la nécessité de continuer à examiner chaque exemple dans les moindres détails.
« Nous avons eu neuf audiences, nous avons écouté avec beaucoup de patience. Nous avons néanmoins le sentiment que les choses doivent changer », a déclaré la juge Rivka Friedman-Feldman, selon la chaîne d’information N12.

« Les exemples peuvent être présentés les uns avec les autres ; des questions peuvent également être posées sur plusieurs exemples pris ensemble. Nous n’avons pas besoin que vous présentiez tout au tribunal », a-t-elle ajouté.
Hadad a toutefois refusé, soulignant le refus constant opposé par le Bureau du procureur de l’État s’agissant de supprimer des exemples apparemment non-pertinents de l’acte d’accusation. Un échange animé a suivi avec la procureure Yehudit Tirosh.
Netanyahu a tenté d’intervenir dans le débat entre les juges, Hadad et les procureurs, se levant pour prendre la parole. Friedman-Feldman lui a intimé de se taire, lui disant : « Monsieur, vous ne pouvez rien dire. Nous sommes dans une discussion entre avocats, pas avec vous ».
Lorsque Netanyahu a à nouveau essayé de se mêler à la conversation, Friedman-Feldman l’a interrompu : « Monsieur, vous êtes prié de vous asseoir ». Le Premier ministre a répondu : « Je suis sidéré ».
Il est toutefois parvenu à exprimer son opinion, insistant sur le fait qu’il était de son droit d’aborder chaque exemple cité dans l’acte de mise en examen.
« Ces faits de corruption dont on m’accuse sont un mur qui est constitué de 315 briques », a-t-il déclaré. « C’est avec ça qu’on m’a harcelé, qu’on a aussi harcelé tout un pays pendant des années. J’ai le droit de me défendre, de donner un vrai témoignage, de me poser les questions les plus difficiles. L’accusation refuse de retirer des clauses de l’acte d’inculpation et c’est la raison pour laquelle j’insiste sur mon droit de répondre à chaque clause, sur mon droit de casser chacune de ces briques ».
Hadad a poursuivi avec d’autres exemples, notamment le numéro 75 – l’acte d’accusation indique que le porte-parole de Netanyahu, Nir Hefetz, avait demandé au président-directeur-général de Walla, Ilan Yeshua, que le site d’information publie la réponse faite par Netanyahu aux accusations qui avaient été lancées par le contrôleur financier de l’État concernant les dépenses déclarées par le chef de gouvernement et son épouse lors de leur séjour dans la résidence du Premier ministre à Jérusalem.
L’acte d’accusation indique que Netanyahu avait été personnellement impliqué dans cette demande et qu’Elovitch avait fait en sorte de donner suite à cette requête.
Hadad a demandé à Netanyahu s’il pouvait être considéré comme « exceptionnel », pour un média, d’inclure une réponse au sujet d’un article critique qui le concernait directement.
L’acte de mise en examen affirme que Walla avait accordé à Netanyahu un « traitement exceptionnel » grâce à l’accord entaché de corruption qui avait été conclu avec Elovitch.
« C’est de la corruption ?! C’est de la corruption ?! », s’est exclamé le Premier ministre en réponse.