L’envoyée US pour l’antisémitisme condamne l’attaque de Chikli contre Soros
Le ministre de la Diaspora a donné raison à Elon Musk, pour lequel Soros "hait l'humanité". Pour Deborah Lipstadt, ces propos relèvent des tropes antisémites sur les Rothschild
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
L’envoyée de l’administration Biden chargée de la lutte contre l’antisémitisme a dénoncé, vendredi, les attaques contre le milliardaire juif George Soros.
La veille, le ministre de la Diaspora, Amichai Chikli, avait pris la défense d’Elon Musk, critiqué pour avoir dit que Soros « hait l’humanité ».
Musk avait comparé, lundi, le philanthrope à un méchant de bande dessinée, s’attirant les critiques du ministère des Affaires étrangères, de l’ADL et d’autres organisations juives, estimant que ses propos ne faisaient qu’encourager l’antisémitisme.
Le ministre des Affaires étrangères, Eli Cohen, est par la suite revenu sur la déclaration de ses services.
Chikli a défendu Musk jeudi, en disant : « En tant que ministre israélien chargé de la lutte contre l’antisémitisme, je précise que le gouvernement israélien et la grande majorité des citoyens israéliens voient en Elon Musk un entrepreneur incroyable et un véritable modèle. »
« Critiquer Soros – qui finance les organisations les plus hostiles au peuple juif et à l’État d’Israël – est tout sauf de l’antisémitisme, bien au contraire », a déclaré Chikli.
L’envoyée spéciale des États-Unis pour la surveillance et la lutte contre l’antisémitisme, Deborah Lipstadt, est la toute première responsable de l’administration Biden à se prononcer sur la question. Elle a tweeté vendredi : « Indépendamment de ce que l’on pense de ce que fait ou pense George Soros, il est malhonnête de nier que de nombreuses attaques ad hominem contre lui reposent sur des tropes et un discours antisémites classiques ».
« Par le passé, les antisémites invoquaient la famille Rothschild pour justifier leur haine des Juifs. Aujourd’hui, c’est Soros qui sert de repoussoir », a-t-elle déclaré.
Le mois dernier, le Times of Israel avait insisté pour que Lipstadt prenne position suite aux propos de l’ex-président américain Donald Trump concernant le procureur de Manhattan, qui l’a inculpé, et qui aurait été « trié sur le volet » par Soros.
« Je ne veux pas m’en mêler parce que la campagne est ouverte, mais je peux dire que je suis dérangée par toutes ces personnes, ici et ailleurs, qui utilisent la figure du méchant. Ce n’est pas toujours le cas, mais cela peut certainement avoir des implications antisémites », a-t-elle déclaré, soucieuse de ne pas se livrer à une critique directe.
Soros est un survivant de la Shoah et un généreux donateur des causes progressistes, et la cible régulière des théories du complot antisémites.
Chikli est membre du parti de droite du Premier ministre Benjamin Netanyahu, le Likud.
Musk a créé la controverse, lundi, en disant que Soros « me rappelle Magneto », méchant de bande dessinée que l’on retrouve dans la série X-Men de Marvel. Le personnage, comme Soros, est un survivant de la Shoah.
As Israel’s minister who's entrusted on combating anti-Semitism, I would like to clarify that the Israeli government and the vast majority of Israeli citizens see Elon Musk as an amazing entrepreneur and a role model. Criticism of Soros – who finances the most hostile…
— עמיחי שיקלי – Amichai Chikli (@AmichaiChikli) May 18, 2023
Il a poursuivi en ajoutant : « Il veut éroder le tissu même de la civilisation. Soros hait l’humanité. »
Musk est, certes, opposé aux politiques progressistes, mais on ignore à ce stade les raisons de cette attaque contre Soros.
Le même jour que les tweets, la société d’investissement de Soros a revendu ses parts dans Tesla, la société de voitures électriques de Musk.
Le ministère des Affaires étrangères a parlé d’antisémitisme en ce qui concerne les propos de Musk.
« L’expression ‘Les Juifs’ a fait son apparition aujourd’hui sur la liste des sujets tendance sur Twitter à la suite d’un tweet à connotation antisémite de rien moins que le propriétaire et PDG du réseau social, Elon Musk », a tweeté le ministère des Affaires étrangères sur son compte officiel. Il a ajouté que le tweet de Musk « avait déchaîné les théories du complot antisémites sur Twitter ».
Cohen est par la suite revenu sur ces déclarations.
« Il n’y aura plus de tweets comme ceux-là », a déclaré Cohen à la Quatorzième chaine.
Il est rare qu’un ministre réfute une déclaration de son propre ministère.
Soros, qui est âgé de 92 ans, est depuis longtemps la cible des conservateurs en raisons de son soutien aux causes et politiciens progressistes, aux États-Unis et ailleurs dans le monde. Ces dix dernières années, certaines attaques dont il a été victime ont clairement relevé de théories complotistes antisémites, qui lui prêtent des attributs sataniques, l’accusent de vouloir contrôler le monde et d’avoir participé à la Shoah, et non d’y avoir survécu lorsqu’il était enfant.
Ces théories complotistes se sont multipliées après l’élection de Donald Trump en 2016. Ce dernier avait fait de Soros un des thèmes de sa dernière publicité de campagne, cette année-là, le présentant une nouvelle fois comme un méchant pour la campagne en vue des élections de 2024.
L’équipe de la JTA et du Times of Israel ont contribué à cet article.