Israël en guerre - Jour 570

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Les confinés en Israël, en quête de sens à travers le bénévolat

Lassés d'être enfermés chez eux depuis des semaines, un nombre croissant de personnes se portent volontaires pour aider amis et voisins en difficultés

Des bénévoles de l'organisation Ezrat Achim, à Beit Shemesh, préparent des distributions alimentaires en faveur d'Israéliens confinés chez eux en raison de la crise du COVID-19 (Autorisation)
Des bénévoles de l'organisation Ezrat Achim, à Beit Shemesh, préparent des distributions alimentaires en faveur d'Israéliens confinés chez eux en raison de la crise du COVID-19 (Autorisation)

Quand Israël a fermé ses écoles au mois de mars en raison de la pandémie de coronavirus, Mazal Byalsky a décidé qu’elle ne pouvait pas se permettre de rester à ne rien faire.

Avant d’occuper son poste actuel de professeure de biologie dans un lycée de l’implantation d’Efrat, en Cisjordanie, Byalsky avait obtenu un doctorat en hématologie et en immunologie. Elle a compris, la crise sanitaire ne cessant d’empirer, que ses compétences seraient de plus en plus recherchées.

Elle est immédiatement entrée en contact avec le laboratoire chargé du dépistage du coronavirus au centre médical Shaare Zedek, offrant gratuitement ses services.

« C’est très important d’avoir le sentiment que je fais aujourd’hui ce que je sais faire parce ce n’est pas le cas de tout le monde, » dit Byalsky au Times of Israel. « Cela sert à l’Etat. Je considère que c’est comme le devoir de réserve de l’armée – et je suis heureuse de pouvoir apporter mon aide ».

Environ la moitié des techniciens, dans son laboratoire, sont des bénévoles. Et s’ils doivent affronter pratiquement les mêmes risques que les personnels soignants qui sont sur le front, tous considèrent leurs activités comme une « mission sacrée », continue-t-elle.

« La population d’Israël se mobilise pour aider », s’exclame-t-elle.

Mazal Byalsky (Autorisation)

Byalsky est loin d’être la seule à rejeter l’isolement au profit de l’engagement communautaire et des risques qu’il présente. Tandis que des millions de personnes vivent confinées chez elles, conformément aux directives lancées par le ministère de la Santé, un nombre croissant de citoyens se sont tournés vers le travail caritatif, devenant des bénévoles au service d’organisations locales qui, pour leur part, cherchent tous les moyens possibles de venir en aide aux personnes les plus durement frappées par la pandémie.

Livraisons de colis alimentaires, courses à la pharmacie, organisations de programmes en direction des enfants des travailleurs considérés comme « essentiels » : Ces bénévoles sont bien déterminés à atténuer ce que l’isolement présente de pire et de plus difficile pour les membres des secteurs les plus vulnérables face à l’épidémie dans le pays.

« Il y a eu une augmentation énorme, dans la jeune génération, de la participation à des activités bénévoles », note Niki Cregor, responsable en charge du travail relevant du volontariat au sein de la municipalité de Jérusalem.

Alors que les jeunes ont de moins en moins d’activités auxquelles se livrer – soit en raison de la fermeture des universités locales, soit parce qu’ils ont été mis en congé temporaire dans le cadre de leur emploi – un grand nombre d’entre eux ont décidé de mettre ce temps libre à la disposition des autres, venant en aide aux personnes âgées, isolées ou en situation de handicap – dont les existences se sont très rapidement détériorées au cours du dernier mois.

Cregor indique que la municipalité, qui a établi des partenariats avec des ONG et des centres communautaires de quartier pour coordonner le travail des volontaires, compte environ 15 000 nouveaux actifs qui assument des missions d’assistance – ce qui représente une multiplication par trois du nombre de bénévoles habituel.

« Nous sommes parvenus à recruter peut-être 10 000 nouveaux jeunes volontaires qui, normalement, seraient en train de faire leurs études ou de travailler », ajoute-t-elle, décrivant la manière dont les centres communautaires, dans toute la capitale, se sont tournés vers les résidents pour qu’ils prennent en charge la livraison des produits alimentaires et autres à leurs voisins dans le besoin.

Une volontaire d’Ezra Baderech fait une livraison à une femme dans le besoin (Autorisation)

Faire du volontariat au niveau local est le meilleur moyen « d’empêcher la propagation du coronavirus », dit Cregor, qui ajoute que « en fin de compte, la ville de Jérusalem ne pourrait pas fonctionner sans nos bénévoles ».

L’un des programmes locaux s’appelle Ezra Baderech [Une aide en route], une initiative mise en place par l’organisation Dor LeDor [de génération en génération].

Le concept, explique Shivi Himelstein de Dor LeDor, est de fournir « une opportunité de travail bénévole à proximité de votre habitation sans engagement préalable » et en fonction de votre propre calendrier.

Selon Himelstein, de nombreuses personnes ne participent plus à des activités de bénévolat traditionnelles en raison du rythme effréné et imprévisible de la vie moderne. Mais en adaptant son mode de fonctionnement à la génération smartphone, Ezra Baderech a pu recruter des personnes qui, le cas échéant, n’auraient pas pu prendre part à de telles activités.

Si une personne âgée a besoin d’une aide – qu’il s’agisse de changer une ampoule ou d’acheter des médicaments à la pharmacie – elle peut appeler la ligne d’urgence mise en place par l’organisation. « Une fois la requête reçue, » précise la responsable, « nous transmettons l’appel via le groupe WhatsApp qui rassemble les volontaires » et l’un d’eux, aux environs, accepte alors de se charger de la mission.

« Le nombre de bénévoles a augmenté de manière spectaculaire » depuis le début de la pandémie, note Himelstein, qui raconte que 350 personnes étaient venues se présenter au cours des deux dernières semaines pour rejoindre le groupe WhatsApp de volontaires. « Les gens sont chez eux, ils ont plus de temps, et il y a un réel besoin de venir en aide aux autres ».

Le nombre de demandes d’aide a également connu une hausse significative. De 85 appels par mois avant le coronavirus, l’organisation reçoit dorénavant 80 appels téléphoniques par jour.

« La majorité d’entre nous sommes des étudiants », explique Yochai Abitbul, qui est lui-même étudiant en droit et bénévole au sein de BaDerech. « On ne va pas à l’université en ce moment, on est à la maison et on a beaucoup de temps libre ».

Yochai Abitbul fait une livraison à des femmes âgées (Autorisation)

S’entretenant par téléphone avec le Times of Israel alors qu’il est allé chercher des médicaments pour une personne âgée de Jérusalem, Abitbul déclare que s’il se trouve actuellement dans l’incapacité de prendre soin de ses propres parents qui vivent loin, il ressent un soulagement à l’idée d’apporter un soutien à quelqu’un, dans son quartier et que des voisins feront de même dans sa ville natale auprès de ses parents.

Dans la banlieue de Beit Shemesh, près de Jérusalem, la municipalité locale a coordonné des projets de bénévolat avec plusieurs associations et elle a récemment établi un centre de distribution dans un club sportif « où les organisations peuvent donner des produits alimentaires et des jouets et où des bénévoles – des adolescents pour la plupart – emballent les colis, qui sont ensuite chargés dans des voitures qui les distribuent dans toute la ville », dit Rena Hollander, adjointe au maire. Des familles ayant des enfants en situation de handicap, précise-t-elle. Les services sociaux municipaux ont travaillé avec les résidents pour diviser la ville en secteurs – qui sont placés sous la responsabilité d’un chef de secteur bénévole qui aide à coordonner les initiatives prises par les autorités sur le terrain.

« Une femme a téléphoné et elle a dit : ‘J’ai 70 ans et je ne peux pas sortir, mais j’ai besoin d’acheter quelque chose au magasin’. J’ai donc appelé une femme de son quartier qui l’a fait à sa place », continue-t-elle. « Ce sont des centaines de citoyens qui nous ont rejoints pour mener à bien ce type de missions ».

Et si le niveau de travail bénévole n’est pas aussi élevé que ce serait le cas en temps de guerre (les gens ont peur de quitter leurs habitations, après tout), « il est bien plus important qu’en temps normal ».

Pour leur part, les organisations caritatives comme Ezer MiTzion et Ezrat Achim, à Beit Shemesh, ont également fait état d’une participation forte des volontaires, notant que des Israéliens de tous les secteurs – haredim, nationalistes-religieux, laïcs – venaient donner un coup de main avec plaisir – apportant leur aide aux autres, indépendamment de leurs origines religieuses ou des opinions politiques.

A Modiin, la municipalité s’est tournée vers l’organisation Barkai qui, en temps normal, concentre ses activités sur la formation rabbinique, pour contribuer à créer un réseau de volontaires, explique le co-fondateur de l’organisation, le rabbin David Fine.

Rabbi David Fine (Autorisation)

Fine explique que la ville « a rapidement réalisé que parce que nous avons des rabbins dans un grand nombre de communautés, et que tous ont des groupes de volontaires dans leurs synagogues, nous sommes probablement les mieux équipés pour les aider à atteindre ses objectifs ».

Il ajoute que l’organisation a été en mesure de mobiliser des centaines de fidèles qui ont accepté de prendre part à des initiatives de distribution alimentaire et autres.

« Les gens cherchent vraiment une opportunité pour aider davantage et plus encore que cela, ils cherchent à donner un sens à ce qui arrive maintenant, c’est ce qui les aide à se relier à ce qu’il se passe autour d’eux. Et en particulier parce que que nous sommes tenus de respecter la distanciation sociale, cela permet de trouver une autre sorte de connexion humaine », ajoute-t-il.

Yeela Maltz, 19 ans, dit que son académie prémilitaire a envoyé des jeunes filles dans tout le pays pour venir en aide aux moins chanceux. Elles évoque auprès du Times of Israel ses récentes missions – elle a travaillé avec des personnes recluses et les enfants des travailleurs dits « essentiels ».

« Tous ceux qui n’ont pas, dans leur foyer, de personne présentant un risque de contracter la maladie devraient aider. C’est frustrant parce qu’on est dehors, qu’on aide, mais qu’on ne peut pas aider tout le monde. Mais c’est très intéressant et en général, c’est agréable », clame-t-elle.

« Plus tard, quand on parlera de ce qu’on a fait pendant le coronavirus, je préfère pouvoir dire que j’ai aidé les autres plutôt que de raconter que je suis restée chez moi à regarder la télé. C’est quand même moins héroïque », s’amuse-t-elle.

Ce ne sont pas seulement les Israéliens qui se portent volontaire pour aider dans la crise actuelle. Selon Ilana Turevsky Assaf, cheffe du programme international de volontariat au sein du ministère du Travail et des Affaires sociales, des centaines de bénévoles étrangers qui se trouvaient au sein de l’Etat juif pour suivre des programmes variés ont décidé de rester dans le pays, malgré les efforts livrés par les gouvernements étrangers de rapatrier leurs ressortissants.

Chaque année, environ 800 à 1 000 étrangers prennent part à différents programmes en Israël. Sur les 500 approximativement qui se trouvaient dans le pays, début mars, environ 200 ont pris la décision de rester.

Un bénévole livre des produits alimentaires à Modiin (Autorisation : Barkai)

Un grand nombre de ceux qui sont restés travaillaient avec les personnes en situation de handicap, les personnes âgées ou à besoins particuliers et, en raison des restrictions de distanciation sociale, sont restés confinés sur leurs différents lieux de travail ou de vie, depuis le début de la crise.

Pour ces volontaires, la tâche la plus importante est dorénavant d’aider à maintenir les contacts entre les familles et les personnes dans le besoin, dorénavant privées de toutes visites, en organisant des conservations vidéos, en enseignant la manière d’utiliser un smartphone et en « optimisant les communications avec les êtres chers, à l’extérieur ».

Sasha Mequel, un volontaire d’origine française qui travaille dans une maison accueillant des personnes en situation de handicap, explique avoir rejeté une offre de rapatriement tout en notant qu’il « y a bien plus de cas et de danger en France » [Plus de 20 000 morts et plus de 155 000 porteurs confirmés].

« Je prends ce que la vie me donne et je suis heureux », ajoute-t-il. « Si on n’a pas peur du lendemain, on peut profiter du jour présent ».

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