Les difficultés d’une mère israélienne d’origine éthiopienne dans le court-métrage « Bunchi »
Le dernier film d'Esti Almo Wexler reflète des aspects de sa vie et de son éducation, condensés en 29 minutes
Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »
Alors que la fête éthiopienne Sigd était célébrée mercredi, la réalisatrice israélienne d’origine éthiopienne Esti Almo Wexler a marqué cette date en projetant son nouveau court-métrage de 29 minutes intitulé « Bunchi », qui raconte l’histoire d’une femme de 35 ans qui se débat avec ses responsabilités de mère de famille.
Ce court-métrage fait suite au précédent film d’Almo Wexler, « Lady Titi« , une comédie sur le changement d’identité qui jette un éclairage sur la communauté éthiopienne contemporaine en Israël.
« Lady Titi » a été le premier film commercial israélien mettant en scène des personnages éthiopiens. Il a été produit par Elad Wexler, et écrit et réalisé par Almo Wexler, partenaires dans le travail et la vie ; ils dirigent tous deux Abayenesh Productions.
« Bunchi » offre une vision différente de l’expérience éthiopienne en Israël. Une grande partie du film est tirée des souvenirs qu’Almo Wexler a d’elle-même et de sa mère, et des luttes que cette dernière a vécues.
« Je suis tout le monde dans le film, je suis Bunchi les filles et peut-être aussi la grand-mère », a déclaré Almo Wexler. « Mais pour l’instant, je m’identifie à Bunchi parce que je suis une mère. »
Bunchi, interprétée par Hava Tizazu, est une mère qui tente de maintenir l’unité de sa famille, aux prises avec sa belle-mère psychologiquement perturbée, ses filles et son mari, qui semble la tromper. Tout au long des 29 minutes, Bunchi est harcelée de toutes parts, mais doit se ressaisir en accueillant la famille élargie à l’occasion d’une réunion, a priori, peu réjouissante.
Esti Almo Wexler a déclaré que le film fait écho à sa propre enfance, après avoir émigré en Israël à l’âge de 4 ans avec sa mère, où elles ont retrouvé son père.
« C’est ma maison quand j’étais enfant, et c’est même l’image de ma mère, physiquement », a-t-elle dit. « Je n’ai pas réalisé, au départ, à quel point Hava ressemble à ma mère, mais c’est bien le cas. »
Le film montre également la progression de la communauté, avec une mère qui parle hébreu à ses enfants, ainsi qu’à sa famille et à ses amis, mais amharique à sa belle-mère, ou lorsqu’elle pense à des problématiques familiales.
Un membre de la famille se présente à la Knesset, et un boucher local salue Bunchi avec un terme amharique.
Et pourtant, selon Almo Wexler, « Bunchi » est un film sans époque ni lieu précis, même si le cadre semble être en Israël, de nos jours.
« C’est un conte populaire atemporel », a-t-elle dit. « C’est familier mais ce n’est pas une évidence. »
Elle a eu du mal à financer et à vendre son film, c’est pourquoi Almo Wexler l’a écrit sous forme de court-métrage et non de long-métrage.
« Très bien, je vais faire un court-métrage pour que les spectateurs puissent y avoir accès et voir son réel potentiel », a déclaré Almo Wexler, qui espère que les projections communautaires qu’elle organise l’aideront à trouver les fonds pour en faire un long-métrage.
Troublée et déçue par le manque d’intérêt, notamment de la part des festivals locaux, elle a fini par créer son propre festival itinérant, en projetant « Bunchi » dans des centres communautaires locaux et des synagogues.
« J’apporte un nouveau point de vue, en éduquant moi-même le public par le biais de ce court-métrage qui porte sur l’histoire de ma famille », a expliqué Almo Wexler. « À chaque projection, les gens veulent connaître la suite de l’histoire, toute l’histoire. »