Les dirigeants de l’armée auraient ignoré que les chefs des renseignements avaient obtenu le plan de bataille du Hamas en avril 2022
Une chaîne de télévision a indiqué qu'un document de 40 pages qui portait sur les plans du Hamas dans le cadre de son pogrom du 7 octobre n'est jamais arrivé jusqu'aux autorités militaires et politiques
Les chefs des renseignements militaires israéliens n’ont jamais informé les autorités de Tsahal et les responsables politiques d’un fait de première importance : celui que l’Unité 8200 avait obtenu, au mois d’avril 2022, un document établissant le plan que le Hamas devait mettre en œuvre le 7 octobre, lorsque les hommes armés avaient envahi le sud d’Israël et qu’ils avaient commis un pogrom, a fait savoir samedi la Douzième chaîne.
L’existence du document – dont le nom de code était « les murs de Jéricho » – avait été signalée pour la toute première fois par le New York Times au mois de novembre 2023.
Ce plan de 40 pages, avait indiqué le Times à l’époque, entrait dans le détail de l’attaque telle qu’elle devait presque exactement être exécutée par le groupe terroriste : Il évoquait des tirs de barrage de roquettes au début de l’invasion, des drones détruisant les caméras de sécurité et les systèmes de défense automatisés, puis l’entrée des terroristes sur le territoire israélien à l’aide de parapentes, en voiture et à pied – des éléments qui ont tous été au cœur de l’attaque du 7 octobre.
Les agents des renseignements avaient déterminé, semble-t-il, que le groupe terroriste était dans l’incapacité de mener une attaque d’une telle ampleur et qu’il n’avait pas, en réalité, la volonté de le faire – écartant d’un revers de la main les inquiétudes qui avaient été toutefois suscitées par la découverte du document.
Selon le reportage de la Douzième chaîne qui a été diffusé samedi soir, ce plan en langue arabe, qui avait été rédigé au mois d’octobre 2021, avait été obtenu par l’Unité 8200, placée sous l’autorité de l’Administration des renseignements militaires, au mois d’avril 2022. Il avait d’abord été traduit. Il avait ensuite été soumis au général Aharon Haliva, à la tête des Renseignements militaires, au général Yossi Sariel, commandant de l’Unité 8200, à Avi Rosenfeld, commandant de la Division de Gaza et au responsable de l’époque du Commandement du sud, le général Eliezer Toledano, a précisé la chaîne de télévision.
Mais il n’avait pas été vu par les officiels de premier plan de Tsahal – qu’il s’agisse du chef d’état-major, Herzi Halevi, de son adjoint, le général Amir Baram, de Tomer Bar, le dirigeant de l’armée de l’air ou des responsables des opérations de Tsahal, le général Oded Basiuk et le général Shlomi Binder. Il n’avait pas non plus été mis à la disposition du Premier ministre Benjamin Netanyahu, du ministre de la Défense Yoav Gallant ou de la Commission des Affaires étrangères et de la Défense à la Knesset.
Halevi a pris ses fonctions en janvier 2023 en succédant à Aviv Kohavi.
Le document montrait « que le Hamas n’était nullement dissuadé » d’attaquer Israël – un constat qui venait en contradiction avec l’évaluation qui était faite, à ce moment-là, par l’armée plus généralement, a confié l’ancien chef des renseignements militaires Aharon Zeevi-Farkash devant les caméras de la Douzième chaîne. Il a ajouté que le plan, en conséquence, aurait dû être étudié avec minutie : « Il fallait l’examiner en profondeur », a-t-il précisé.
La chaîne a indiqué que dans les mois qui avaient précédé le 7 octobre, le responsable de l’armée de l’air, Tomer Bar, avait eu le sentiment que ses forces n’obtenaient pas les renseignements nécessaires sur l’évolution de la situation à Gaza. Des réunions avaient donc été organisées avec les membres de l’Unité 8200 à ce sujet, a-t-elle noté. La dernière avait eu lieu environ une semaine avant le 7 octobre – mais même à ce moment-là, Bar n’avait pas été informé de l’existence du document.
L’armée de l’air israélienne n’avait envisagé « aucun scénario » concernant une violation massive, par le Hamas, de la frontière, avec des dizaines de brèches, comme cela devait se produire en date du 7 octobre, a commenté le général réserviste Yaron Rosen, ancien pilote et ancien officier de l’armée de l’air, auprès des journalistes de la Douzième chaîne – et il n’y a eu donc « aucun ordre pertinent » délivré au cours de cette matinée, l’armée de l’air se trouvant dans l’obligation d’improviser. Si elle avait eu connaissance du plan d’attaque, elle aurait pu préparer une réponse et, « avec un peu de chance », elle aurait été en capacité de repousser l’invasion, a continué Rosen.
Le reportage de la Douzième chaîne a aussi évoqué les efforts livrés par un agent des renseignements qui travaillait au sein du Commandement du sud et qui a seulement été identifié par l’initiale « Aleph ». Il avait tenté d’alerter ses supérieurs hiérarchiques au sujet de faits sortant de l’ordinaire au sein de l’enclave côtière : « Quelque chose de très inhabituel est en train de se passer – avec des préparations accrues de l’autre côté [à Gaza] » dans les heures qui avaient précédé l’invasion.
La chaîne a raconté que « Aleph » était entré en contact avec Haliva et avec le chef du Commandement du sud, le général Yaron Finkelman, pour leur faire part de ces informations. Auparavant, des agents des renseignements avaient déjà remarqué que des dizaines de terroristes du Hamas avaient activé des cartes SIM israéliennes dans leurs téléphones, un autre signe avant-coureur de l’attaque qui avait été ignoré.
Haliva était parti en vacances à Eilat, a fait remarquer la Douzième chaîne, et il n’était pas retourné à son bureau après les informations transmises par « Aleph ».
De son côté, comme les médias l’ont déjà signalé, Finkelman s’était rendu au siège du Commandement du sud, à Beer Sheva, dans la nuit du 6 au 7 octobre. Il avait alerté Halevi, qui avait mené des consultations au téléphone mais qui n’avait pas lancé d’alerte majeure.
« Aleph » avait aussi contacté le commandant de l’Unité 8200, Sariel, via WhatsApp au sujet de cette « situation si inhabituelle », demandant à connaître les informations potentiellement obtenues par un réseau technique de renseignement « particulièrement important » qui, depuis des années, fournissait des informations sur les activités du Hamas, a indiqué le reportage. Après vérification, il avait été dit à Sariel que ce réseau était en panne depuis quelques heures, et il ne devait être réactivé qu’au moment à peu près où l’invasion avait commencé.
Plusieurs soldats de l’Unité 8200 avaient aussi détecté des activités inhabituelles dans les heures qui avaient précédé l’invasion et ils avaient transmis six courriels à « un usager non-pertinent », a noté le reportage.
Le reportage qui a été diffusé samedi est le dernier à avoir été consacré aux informations dont disposait Israël au sujet de l’invasion du 7 octobre – des informations qui avaient été ignorées, rejetées ou mal interprétées. La chaîne a expliqué que son reportage avait été soumis à la censure militaire et qu’elle n’a pas été en mesure d’entrer dans le détail d’une autre information portant sur les faits qui s’étaient produits dans les heures précédant l’invasion – et qui « qui auraient dû faire passer tous les voyants au rouge, » a dit la Douzième chaîne.
Près de 1 200 personnes avaient été tuées dans le sud d’Israël pendant le pogrom commis par les hommes armés du Hamas, le 7 octobre. 251 personnes avaient été kidnappées et prises en otage dans la bande de Gaza.
Il resterait actuellement 111 personnes dans les geôles du groupe terroriste. La mort de 39 d’entre eux a été confirmée par l’armée.
Le ministère de la Santé de Gaza, qui est placé sous l’autorité du Hamas, affirme que plus de 40 000 personnes ont été tuées ou sont présumées mortes dans les combats jusqu’à présent. Ce bilan ne peut être vérifié et ne fait pas la distinction entre terroristes et civils. Israël, de son côté, déclarait, au début du mois d’août, avoir tué environ 17 000 hommes armés au sein de l’enclave côtière en plus d’un millier sur le territoire israélien, le 7 octobre. L’État juif affirme chercher à minimiser le nombre de victimes au sein de la population et note que le Hamas mène ses attaques depuis les habitations, les hôpitaux, les mosquées et les écoles.
Le bilan humain du côté d’Israël, dans le cadre de l’offensive terrestre contre le Hamas et des opérations militaires qui ont eu lieu le long de la frontière, s’élève à 334 morts.