Les doyens de facs afro-américaines se félicitent des liens avec la communauté juive
Cette visite en Israël fait suite à plusieurs incidents très médiatisés qui indiquent que les relations entre Noirs et Juifs aux États-Unis doivent être améliorées au plus vite
Les Juifs d’Amérique ont été des partenaires importants pour les Afro-Américains et leurs universités, ont déclaré mercredi les administrateurs de cinq collèges et universités historiquement noirs (HBCU).
« Il y a certainement de nombreux exemples dans notre Histoire de la collaboration entre la communauté juive et les communautés afro-américaines et les HBCU », a déclaré le colonel Alexander Conyers, doyen de l’université d’État de Caroline du Sud, à Jérusalem.
Il a cité l’exemple des « écoles Rosenwald », les 5 000 écoles construites dans 15 États du Sud entre 1912 et 1932. Cette initiative est le fruit d’une collaboration entre Julius Rosenwald, fils d’immigrés juifs allemands et cadre chez Sears, et Booker T. Washington, célèbre éducateur né en esclavage en Virginie.
Recevez gratuitement notre édition quotidienne par mail pour ne rien manquer du meilleur de l’info Inscription gratuite !
Durant les années où elles ont fonctionné, les écoles Rosenwald ont éduqué un tiers des enfants noirs vivant en milieu rural dans le Sud, soit plus de 663 000 élèves, dont l’auteure Maya Angelou, le militant des droits civiques Medgar Evers et le dramaturge et metteur en scène George Wolfe.
Rosenwald estimait que les Juifs devaient compatir au sort des Afro-Américains. « Les horreurs dues aux préjugés raciaux touchent les Juifs avec plus de force que les autres membres de la race blanche, en raison des siècles de persécution dont ils ont souffert et souffrent encore », a-t-il écrit.
« Sur notre campus se trouve encore aujourd’hui une école – d’origine – de Rosenwald que nous avons conservée en l’honneur de sa contribution à l’éducation de la jeunesse afro-américaine », a déclaré Conyers.
« Des partenariats stratégiques ont vu le jour entre les acteurs du mouvement des droits civiques et la population juive », a ajouté David Wilson, doyen de l’université Morgan State à Baltimore.
Le mouvement des droits civiques a été le point culminant d’une alliance entre Juifs et Noirs qui voyaient une cause commune. Le rabbin Abraham Joshua Heschel avait participé à la célèbre marche de Selma à Montgomery avec Martin Luther King Jr. et deux militants juifs, Andrew Goodman et Michael Schwerner, ainsi que James Chaney, un militant noir des droits civiques, qui furent assassinés par des membres du Ku Klux Klan alors qu’ils inscrivaient les citoyens noirs du Mississippi sur les listes électorales dans le cadre de l’Été de la liberté en 1964.
Les administrateurs étaient en Israël dans le cadre de la deuxième mission annuelle de renforcement des capacités du Thurgood Marshall College Fund (TMCF).
L’objectif de ce voyage, selon le TMCF, est de « forger des relations avec les établissements d’enseignement supérieur israéliens, de faire progresser les objectifs du plan stratégique des écoles membres du TMCF visant à développer les programmes d’études à l’étranger et de recherche pour les étudiants, ainsi que les possibilités de recherche et d’échange pour les enseignants ».
Ils ont rencontré les dirigeants de l’université de Tel Aviv, du Technion – l’Institut israélien de technologie, de l’université hébraïque de Jérusalem, du Tel Haï Academic College, du MIGAL Galilee Research Institute, du Volcani Research Center et du Shenkar Academic College.
Ce voyage intervient après plusieurs incidents très médiatisés qui, pour beaucoup, indiquent que les relations entre Noirs et Juifs aux États-Unis ont besoin d’être améliorées de toute urgence.
L’année dernière, le rappeur Kanye West a plusieurs fois fait la Une pour ses commentaires antisémites. Quant à la star des Brooklyn Nets, Kyrie Irving, ce dernier avait fait la promotion d’un film antisémite.
Il y a également eu de la violence. En 2019, une attaque menée par deux membres des Black Hebrew Israelites – un mouvement qui considère les Juifs contemporains comme des imposteurs – contre une épicerie casher du New Jersey avait fait six morts.
Toutefois, les responsables universitaires en visite en Israël ont déclaré qu’ils ne sentaient pas de crise dans les relations.
« Je pense qu’il y a probablement eu des cas où un incident a été qualifié de beaucoup plus important qu’il ne l’était réellement d’un point de vue national », a déclaré Harold Martin, doyen de l’université d’État de Caroline du Nord A&T. « Je n’ai pas vu de preuves de l’existence d’une crise dans les relations avec Israël. »
« Je n’ai vu aucune preuve d’un niveau significatif de tension aux États-Unis en ce qui concerne les Afro-Américains et la communauté juive. »
Quinton Ross, doyen de l’université d’État de l’Alabama, a fait remarquer que Montgomery – qu’il a qualifiée de « berceau du mouvement des droits civiques » – avait récemment élu Phillip Ensler, un avocat juif, à la Chambre des représentants de l’Alabama.
Ross a noté que les équipes sportives de l’État d’Alabama visitent les communautés et les institutions locales, notamment l’historique synagogue de Montgomery, Temple Beth Or.
« Nous avons cette philosophie qu’il faut ‘rencontrer pour connaître' », a déclaré Ross. « Les relations sont fondées sur le respect mutuel et la compréhension des épreuves et des tribulations de chacun. »
Martin a déclaré qu’à Greensboro, en Caroline du Nord, « parmi nos partenaires se trouvaient des membres de la communauté juive – Emmanuel Temple, qui se trouve à Greensboro, dont le rabbin, qui a mené une grande partie de cette discussion et qui se considère comme un partenaire de notre institution aujourd’hui ».
L’année dernière, à l’occasion du 19 juin, la synagogue Emanuel Temple a organisé une manifestation pour raconter l’histoire de l’un de ses fidèles qui a participé à la déségrégation des commerces locaux pendant les sit-in des comptoirs de Woolworth, dans le cadre du mouvement pour les droits civiques.
Bien qu’il reste du travail à faire pour que les Israéliens comprennent mieux l’histoire des Noirs aux États-Unis, le groupe a été impressionné par ce qu’il a vu.
« Il y a une perspective qui n’est pas aussi bien réfléchie en termes d’expérience afro-américaine aux États-Unis », a déclaré Martin. « Mais ce qui nous a semblé évident, c’est que la diversité et l’intégration dans ce pays sont clairement prises en compte d’un point de vue différent, par les communautés juive, arabe, éthiopienne et juive ultra-orthodoxe. Il s’agit d’une nation qui sait qu’elle dépendra de cette main-d’œuvre très diversifiée à l’avenir. »
« C’est un pays qui investit pour favoriser cette diversité, même en cas de conflit », a poursuivi Martin.
Ils ont été particulièrement frappés par les histoires personnelles d’Israéliens éthiopiens qu’ils ont entendues au centre culturel Batae de Tel Aviv.
« Je pense que nous sommes repartis en ayant compris qu’il y a un désir de la part des étudiants des institutions que nous avons visitées de comprendre l’expérience afro-américaine », a déclaré Wilson.
Le groupe a souligné le rôle que jouent les HCBU dans cette histoire et dans la création d’opportunités et de prospérité pour les Afro-Américains.
« Les fils et les filles des esclaves nouvellement libérés n’ont pas eu l’occasion de goûter aux idéaux inscrits dans la Constitution », a déclaré Wilson.
« Ces institutions n’ont pas seulement survécu, elles ont prospéré et ont donné naissance à la classe moyenne noire en Amérique », a déclaré Harry Williams, président-directeur général du TMCF. « Cela ne fait aucun doute. Il n’y a pas de question sur ce sujet. Si les États-Unis ne disposaient pas de plus de 100 HBCU, ils auraient dû les inventer. »
« On ne peut pas avoir une conversation sérieuse sur la compétitivité à long-terme des États-Unis sans que les HBCU ne soient au centre de la discussion. Les HBCU ont transformé l’Amérique », a-t-il déclaré.
Quelque 40 % des législateurs et ingénieurs noirs sont diplômés de ces universités, de même que 50 % des avocats noirs et 80 % des médecins noirs.
« C’est pourquoi, lorsque nous parlons des HBCU, nous ne titubons pas, nous ne bégayons pas », a déclaré Wilson. « Nous sommes très clairs sur leur impact. »
La JTA a contribué à cet article.
... alors c’est le moment d'agir. Le Times of Israel est attaché à l’existence d’un Israël juif et démocratique, et le journalisme indépendant est l’une des meilleures garanties de ces valeurs démocratiques. Si, pour vous aussi, ces valeurs ont de l’importance, alors aidez-nous en rejoignant la communauté du Times of Israël.
Nous sommes ravis que vous ayez lu X articles du Times of Israël le mois dernier.
C'est pour cette raison que nous avons créé le Times of Israel, il y a de cela onze ans (neuf ans pour la version française) : offrir à des lecteurs avertis comme vous une information unique sur Israël et le monde juif.
Nous avons aujourd’hui une faveur à vous demander. Contrairement à d'autres organes de presse, notre site Internet est accessible à tous. Mais le travail de journalisme que nous faisons a un prix, aussi nous demandons aux lecteurs attachés à notre travail de nous soutenir en rejoignant la communauté du ToI.
Avec le montant de votre choix, vous pouvez nous aider à fournir un journalisme de qualité tout en bénéficiant d’une lecture du Times of Israël sans publicités.
Merci à vous,
David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel