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Les enfants des maternités nazies au cœur d’une pièce de théâtre

Venaient y accoucher des filles-mères ou des femmes considérées comme "racialement pures", enceintes de soldats allemands, dont certaines après une relation hors mariage

Gisèle Niango, née le 11 octobre 1943 dans une maternité "Lebensborn" en Belgique, l'une des nombreuses créées par le régime nazi allemand pour "l'expansion de la race aryenne", pose avec une photographie de son "Lebensborn" à Indersdorf, en Allemagne (Gisele est la 2e à droite sur la photo), lors d'une séance photo dans sa résidence pour personnes âgées à Nancy, dans le nord-est de la France, le 14 mars 2025. (Crédit : Jean-Christophe VERHAEGEN / AFP)
Gisèle Niango, née le 11 octobre 1943 dans une maternité "Lebensborn" en Belgique, l'une des nombreuses créées par le régime nazi allemand pour "l'expansion de la race aryenne", pose avec une photographie de son "Lebensborn" à Indersdorf, en Allemagne (Gisele est la 2e à droite sur la photo), lors d'une séance photo dans sa résidence pour personnes âgées à Nancy, dans le nord-est de la France, le 14 mars 2025. (Crédit : Jean-Christophe VERHAEGEN / AFP)

Qui sont les enfants des Lebensborn, ces maternités mises en place par le régime nazi pour perpétuer la « race aryenne » ? Pour la première fois, une pièce de théâtre aborde ce sujet méconnu, inspirée d’histoires vraies dont celle de Gisèle Niango, qui aspire à ce qu’ « on n’oublie pas ».

« Les petits chevaux, Une histoire d’enfants des Lebensborn », au Théâtre des Gémeaux parisiens jusqu’au 22 avril, a été écrite par quatre co-auteurs. Parmi eux, le romancier, professeur de philosophie Matthieu Niango, dont la mère, Gisèle, 81 ans, est née dans un Lebensborn.

Ces maternités nazies (« fontaines de vie », en vieil allemand) ont été instaurées par le chef SS Heinrich Himmler à partir de 1935, afin d’assurer l’expansion de la « race aryenne », considérée comme supérieure.

Venaient y accoucher des filles-mères ou des femmes considérées comme « racialement pures », enceintes de soldats allemands, dont certaines après une relation hors mariage. Ces femmes pouvaient y confier leur enfant ou décider de fonder une famille. Des pouponnières ont été installées en Allemagne, Autriche et sur tous les territoires conquis, en Norvège notamment. La France en a compté un à Lamorlaye (Oise), près de Chantilly.

Le projet a été stoppé par la chute du IIIe Reich mais ces centres ont abrité la naissance de « 10 000 à 22 000 enfants selon les sources », indique Matthieu Niango à l’AFP.

« Les petits chevaux » s’inspire de trois histoires d’enfants, dont celle de Gisèle. A 61 ans, au décès de sa mère adoptive, elle se met en quête de ses origines.

Heinrich Himmler en 1939. (AFP)

Sur le plateau, quatre comédiens de la compagnie « pARTage » incarnent une dizaine de personnages, dont Hortense, qui se lance avec sa fille Violette dans ces recherches.

Entre enquête dans les centres d’archives et flashbacks historiques, le public suit Hortense dans ses découvertes : elle apprend qu’elle est née en 1944 dans le Lebensborn de Lamorlaye, qu’après plusieurs transits en Europe, elle arrive, dans l’après-guerre, à Commercy (Meuse), où elle est adoptée. Surtout, elle découvre, bouleversée, qu’elle est fille d’un SS.

« Il faut faire connaître l’histoire de ces enfants, de façon qu’on n’oublie pas », témoigne à l’AFP Gisèle Niango, espérant que la pièce, jouée auprès du grand public mais aussi dans des établissements scolaires, lui apportera une résonance.

« Ces enfants-là ont existé, ils ont manqué de reconnaissance et certains, toute leur vie, ont galéré », ajoute celle qui, en 2016, a cofondé l’association Pour la Mémoire des Enfants des Lebensborn, qui plaide pour la reconnaissance du statut de victime de guerre.

A LIRE : Le Lebensborn, la maternité dévoyée ou comment les idéologues nazis ont conçu des usines à bébés aryens

« Pour moi, ça a été un choc terrible, quand j’ai appris que j’étais née dans une pouponnière en Belgique (à Wégimont, ndlr), que je faisais partie de l’idéologie nazie » eugéniste, raconte-t-elle, parlant d’un « sentiment de honte ».

Elle a pu obtenir des informations sur sa mère. Il reste en revanche des inconnues sur son père biologique.

Pour Matthieu Niango, c’était « d’abord irréel ». « On (me) dit ‘vous descendez de SS’… et, moi, mon père est ivoirien ! », se souvient-il. Écrire la pièce lui a été difficile : « sans mes co-autrices (Jeanne Signé, également metteuse en scène, Séverine Cojannot, Camille Laplanche), je n’y serai pas parvenu ». « Ce n’était pas simple à exprimer ».

Les auteurs sont convaincus de l’urgence à faire connaître le sujet alors que les « enfants » de ces fabriques à bébés nazies sont aujourd’hui octogénaires. « Il faut faire parler des témoins », faire « mémoire », dit-il.

A Commercy, en 2019, la mairie a fait apposer une plaque commémorative en mémoire des 17 enfants orphelins de guerre recueillis dans son hôpital en 1946, dont certains comme Gisèle sont issus de Lebensborn.

D’autant que « les idées qui ont conduit aux Lebensborn sont encore très présentes », affirme M. Niango, dans un contexte international de montée de l’extrême droite : « Le racisme va de pair avec l’eugénisme ».

La quête de telles origines est aussi au centre d’une bande dessinée, « Lebensborn » d’Isabelle Maroger (Bayard graphic, 2024), elle aussi petite-fille d’une femme née dans une pouponnière en Norvège.

Matthieu Niango a également un roman en préparation, « Le fardeau » (éditions Mialet-Barrault), annoncé pour l’automne.

La pièce sera jouée au festival de théâtre de Coye-la-Forêt (Oise) le 20 mai, tout près de Lamorlaye.

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