Israël en guerre - Jour 530

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Les femmes haredies, l’épine dorsale invisible de la nation start-up

Cette main-d’œuvre bénite est souvent sous-payée, et profondément réticente à revendiquer son dû

Alors que les femmes de la génération de sa mère travaillaient comme enseignantes, Michal Zernowitzky est « pionnière » depuis les 14 dernières années dans l’avenir de l’emploi des femmes haredies – dans le secteur de la haute technologie en plein essor d’Israël.

L’une des premières femmes ultra-orthodoxes ayant obtenu une licence en technologie informatique, elle est actuellement programmatrice externe.

Elle décrit ce travail comme « dur, un travail d’usine, et certainement pas fait pour tout le monde », constitué de longues heures et souvent de missions monotones.

Mais Zernowitzky a eu la chance de trouver un emploi qui verse des salaires équitables et lui permet d’éviter la situation précaire de sa communauté.

Beaucoup de ses voisines travaillent dans le secteur high-tech, mais reçoivent des salaires bien en dessous des normes des Israéliens laïcs. Alors que des milliers de femmes haredies travaillent dans la haute technologie, et les nombres ne font que croître, aucune donnée officielle n’existe reflétant la profondeur de l’écart salarial entre haredim et laïcs, courant dans des entreprises comme Matrix.

Aux bureaux de Modiin Illit et de Beit Shemesh de Matrix, plus de 700 femmes haredies sont employées dans les départements du développement de logiciels et d’assurance de la qualité, et sont décrites dans un article publié sur le site Web de la société comme une « main-d’œuvre de haute qualité attrayante pour des consommateurs soucieux des coûts, comparés à ceux du personnel du centre d’Israël ».

Le député shas Yitzhak Vaknin (Crédit : Miriam Alster/Flash90)
Le député shas Yitzhak Vaknin (Crédit : Miriam Alster/Flash90)

Le député du Shas Yitzhak Vaknin a fait valoir dans un discours devant la commission des Finances de la Knesset le mois dernier que si « les haredim ont un énorme désir de travailler, ce sont les populations les plus démunies. »

Il a évoqué le cas de sa fille, une employée de Matrix, qui gagne le « salaire haredi » universel de 5 600 shekels par mois, en comparaison avec les 8 800 shekels de ses collègues femmes laïques. Ces sommes sont configurées sans rapport avec les niveaux de professionnalisme ou d’éducation, dit-il.

La discrimination salariale subie par les femmes haredies reflète une plus large iniquité salariale dans le secteur au sens large. Les hommes gagnent en moyenne 15 800 shekels, tandis que les femmes gagnent 8 771 shekels, et n’occupent qu’un tiers des postes de direction, selon le Bureau central des statistiques.

Cependant, l’écart salarial global – les femmes haredies gagnent 40 % de moins que leurs homologues masculins et féminins laïcs – est un sujet sensible au sein de la communauté. Beaucoup craignent que lutter pour leur droit à un salaire égal pour un travail égal pourrait être interprété comme un manque de la décence.

Pire, beaucoup pensent que défendre leurs droits pourrait les marquer d’une lettre écarlate estampillée « moderne » ou « arriviste », explique Zernowitzky.

« Dans le monde haredi, le travail n’est pas une éthique, » dit-elle, ajoutant que beaucoup de femmes ultra-orthodoxes qui travaillent au salaire minimum, soit ignorent qu’elles sont perçues comme une alternative locale aux manufactures de sous-traitance en Inde, soit affrontent un dilemme culturel.

Au cours de la dernière décennie, les femmes ultra-orthodoxes ont commencé à combler les pénuries dans la programmation et le développement de logiciels et à occuper d’autres postes peu qualifiés. Même parmi celles qui travaillent dans des entreprises connues pour pratiquer la discrimination salariale, beaucoup disent qu’elles bénéficient de chèques de paie réguliers et d’horaires flexibles.

Parce que leur travail est focalisé sur les délais – et non les heures de bureau – elles peuvent l’accommoder à leurs horaires surchargés en tant qu’épouses et mères, commençant leurs journées tôt le matin afin de pouvoir partir à temps pour aller chercher les enfants l’après-midi et compléter leur travail sur ordinateur à la maison le soir après avoir bordé les petits.

Les femmes ultra-orthodoxes dans la haute technologie représentent l’épine dorsale invisible de la « nation start-up ».

Israël possède davantage de start-ups par habitant que tout autre pays, avec le célèbre Waze, l’application de navigation GPS, qui a vendu ses droits à Google pour environ 1 milliard de dollars en 2013, pour ne citer qu’elle.

Même parmi les entreprises moins connues, cependant, les postes de haute technologie sont parmi les plus rémunérateurs en Israël, employant 280 000 personnes et offrant à peu près le double du salaire moyen national, selon le Bureau central des statistiques.

Racheli Ibenboim (Crédit : Autorisation)
Racheli Ibenboim (Crédit : Autorisation)

Mais tandis que le gouvernement se vante du taux élevé d’emplois chez les femmes ultra-orthodoxes (79 %), les initiatives officielles les ont cantonnées aux postes les moins rémunérés, y compris dans le secteur high-tech, ce qui ne contribue pas vraiment à les aider à surmonter la pauvreté, dit Racheli Ibenboim, une ancienne politicienne qui vise à améliorer les possibilités d’emploi des femmes ultra-orthodoxes.

Sans accès aux réseaux de capital humain et à la formation entrepreneuriale que beaucoup de leurs collègues ont reçue à travers diverses unités de high-tech de l’armée, les femmes ultra-orthodoxes sont confrontées au défi supplémentaire de stigmatisation culturelle dans un domaine profane.

« Les employeurs ont peur des haredies. Ils pensent qu’elles détruiront la dynamique du groupe, s’arrêteront pour prier, auront un bébé chaque année », dit Ibenboim.

Les complications sont pratiquement et financièrement réelles, explique Oran Singer, qui possède une entreprise high-tech à Tel Aviv qui sous-traite sa programmation de faible compétence aux femmes ultra-orthodoxes.

En plus d’un congé de maternité à peu près une fois par an, la plupart des employées mariées sont également indisponibles tard le soir ou le Shabbat, quand un client international pourrait avoir besoin de leurs services. Plus fondamentalement, leur manque d’exposition aux mathématiques, à l’anglais ou aux sciences dû à leur éducation dans des écoles religieuses présentent quelques défis.

Oran Singer (Crédit : (Roni Kaufman)
Oran Singer (Crédit : (Roni Kaufman)

Mais, en définitive, l’emploi des femmes haredies est plutôt une bonne décision commerciale. Elles présentent des qualités telles que l’engagement envers la société, un empressement à apprendre, et une forte camaraderie qui les pousse à aider leurs collègues à surmonter les difficultés, toutes des qualités rares dans le monde high-tech volatile et individualiste, dit Singer.

« Elles sont extrêmement fiables et ont une éthique de travail très élevée. Je crois que cela vient de la réalité économique dans laquelle elles se trouvent, qui les fait vraiment apprécier le salaire », explique-t-il.

Et tandis que les femmes ont seulement ces dernières années commencé à débattre de la question d’exiger d’être rétribuées pour leur valeur sur le lieu de travail, une vague de femmes a créé de véritables solutions à cette fin dans des instituts universitaires spécialisés comme le Campus Strauss, à un jet de pierre du quartier de Mea Shearim de Jérusalem.

Rivka Yeruslavsky, directrice de la section du campus des femmes, prévoit une classe de 500 élèves pour la session d’automne – par rapport à 37 en 2013 – spécialisée dans des matières comme l’informatique et la biotechnologie, et qui leur apprendra à se vendre pour des emplois de haut niveau dans la haute technologie et ailleurs.

Leur programme comprend des ateliers pour les aider à peaufiner leur curriculum vitae, ainsi que des stages dans des laboratoires, dans lesquels elles recevront une exposition de première main dans leur domaine, en plus de garantir des lettres de recommandation pour les futurs employeurs.

Alors que certains dans la communauté continuent de condamner l’emploi des femmes dans le monde high-tech laïc comme un sacrifice des valeurs traditionnelles, Yeruslavsky dit que beaucoup voient le Campus Strauss comme la meilleure d’un certain nombre de mauvaises options, car il maintient la ségrégation entre les sexes et intègre l’enseignement religieux.

« Le but de l’institut est de permettre aux femmes d’avoir un revenu – afin que leurs familles puissent vivre dans la dignité, » dit Yeruslavsky alors qu’elle prépare le dîner après une longue journée de travail.

« Je pense que cette nouvelle génération est en train de comprendre que les femmes peuvent certainement être haredies, avec tout ce que cette culture exige, tout en étant également conscientes de leurs compétences et de la valeur de leur labeur. »

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