‘Les Juifs handicapés étaient aussi au Sinaï’
Le Ruderman Inclusion Summit se concentre sur l'accueil des 20 % des Juifs handicapés et sur ce qu'ils apportent à la société
Boston (JTA) – On a dit à Ruti Regan qu’elle était une pionnière, la première élève rabinique autiste au Jewish Theological Seminary. Mais elle n’y croit pas une seule seconde.
Elle est peut être la première à l’admettre, a affirmé Regan, 30 ans, « mais je ne suis pas la seule ».
« Que faites-vous dans un midrash beit ? », a-t-elle demandé, se référant à une salle d’étude juive.
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« Vous êtes assis à la même place, à apprendre avec les mêmes personnes, étudier les mêmes textes, poser les mêmes questions pendant des heures, pendant que vous vous balancez d’avant en arrière, et parler à l’autre d’une voix chantante ».
Etudiante rabbinique de quatrième année au séminaire phare du mouvement conservateur, Regan a a ajouté qu’il était naturel pour les Juifs faisant partie du spectre de l’autisme puisse trouver une demeure dans le rabbinat. C’est une profession, a-t-elle a poursuivi, « qui a trouvé un moyen de sanctifier » les compétences cognitives, les mouvements et les styles de communication souvent associés avec le trouble neuro-développemental.
Regan et son fiancé, le militant des droits de l’autiste, Ari Neeman, faisaient parties des 550 personnes qui se sont réunis cette semaine au Seaport World Trade Center de Boston pour une conférence de deux jours sur l’intégration du handicap.
La conférence, la première édition du Ruderman Inclusion Summit, vise à faire de la communauté et de la société juive en général plus accueillante pour près des 20 % des personnes qui ont une certaine forme de handicap physique, cognitif ou émotionnel – et sur ce que ces personnes peuvent offrir au monde.
Les sujets des session de discussion allaient de l’intégration dans la vie de synagogue à comment créer des lieux de travail accueillants à l’amour, les rencontres et les romances pour les personnes handicapées.
Parmi les conférenciers invités, il y avait l’athlète paralympique, Loretta Claiborne, le journaliste John Hockenberry, qui a été paralysé suite à un accident de voiture et l’auteur et le lauréat du prix Pulitzer, Ron Suskind.
Suskind, dont le livre le plus récent, « Life, Animated », raconte sa relation avec son fils autiste, a expliqué au JTA que les gens doivent changer la façon dont ils regardent et interagissent avec ceux qui ont un handicap.
« Avoir autant de gens dans la pile des abandonnés est un manquement en tant que société », a-t-il décrié.
Dans son allocution, Suskind a rapporté une conversation qu’il a eue avec un responsable de l’armée israélienne qui a décrit comment des soldats autistes pouvaient repérer des schémas que la plupart des autres personnes ne peuvent pas voir.
Intégrer les personnes handicapées dans la vie ordinaire – par opposition au services sociaux, à l’éducation, un logement et un emploi séparés pour les personnes handicapées – est un axe majeur de l’action de la Fondation de la famille Ruderman, qui a organisé la conférence, qui s’élève à 185 millions de dollars.
Le président de la fondation, Jay Ruderman, dénonce le fait que la communauté juive est à la traîne quand il s’agit d’intégration des handicapés.
« Dans l’effort pour traiter de la question de l’assimilation, nous nous tournons vers la perfection, et nous excluons les personnes handicapées », a-t-il noté. « C’est une façon de ne pas regarder les personnes handicapées comme étant notre avenir ».
Dans les années passées, la fondation, en collaboration avec le Jewish Funders Network, a organisé des conférences pour des philanthropes pour tenter de faire progresser l’intégration des personnes handicapées.
Mais le sommet de cette semaine était la première conférence Ruderman ouverte au grand public. Les participants comprenaient des personnes handicapées qui sont devenus avocats, des éducateurs, des philanthropes, des entrepreneurs, des thérapeutes et des employés dans organisations à but non lucratif dans le monde juif, ainsi que des défenseurs des personnes handicapées en dehors de la communauté juive.
Le rassemblement a coïncidé avec le 25e anniversaire du Americans with Disabilities Act, ou ADA, la loi fédérale historique qui interdit la discrimination contre les personnes handicapées et qui légifère sur l’accessibilité à la sphère publique et les aménagements raisonables du milieu de travail.
Lors de la conférence, l’ancien sénateur, Tom Harkin de l’Iowa, l’auteur de cette proposition de loi et un défenseur de longue date des droits des personnes handicapées, a reçu le prix Morton E. Ruderman Award in Inclusion qui s’accompagne de 100 000 dollars.
Les institutions religieuses sont exonérées des directives de l’ADA et de nombreuses institutions et organisations juives citent parfois les coûts et les complications pour maintenir une position : « nous ne faisons pas dans le handicap », a déclaré Jay Ruderman.
« Je pense que les plus grands obstacles sont les obstacles comportementaux », a-t-il analysé. « Il s’agit du leadership. Cela a un rapport avec ce rabbin ou cet éducateur ou ce chef d’entreprise qui dit : ‘Je vais faire tout ce que je peux pour que ma synagogue ou mon école ou mon entreprise intègre ».
Les participants au sommet ont déclaré qu’ils étaient optimistes sur le fait que plusieurs de ces dirigeants émergeraient après le sommet de cette semaine. Comme Ruti Regan l’explique : « j’espère que cela conduira à une collaboration continue entre les communautés et les organisations ».
Regan est la co-fondatrice du nouveau groupe Anakhnu (hébreu pour « nous »), qui travaille pour créer une « communauté qui se penche vers la Torah où l’on peut parler du handicap, où cela est normal et une question de fait ». Regan a ajouté que comprendre la Torah – et pour la vivre – nécessite une compréhension du handicap.
« La Torah dit : ‘n’insultez pas les personnes sourdes ou ne mettez pas d’obstacle devant l’aveugle’ » a-t-elle cité un passage du livre du Lévitique. « Mais pour comprendre cela, vous devez savoir ce que les personnes sourdes trouvent insultant et ce que les gens aveugles considèrent comme des obstacles ».
Plus tard, elle a ajouté : « La communauté juive m’a appris à voir tout le monde avec BTzelem Elohim, à l’image de Dieu. La communauté des personnes handicapées m’a appris à le faire ».
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