Les négociations de coalition dans l’impasse
Yisrael Beytenu demande des financements pour les immigrants de l’ex Union soviétique, mais le Trésor est réticent à des aides basées sur l’origine des citoyens
Les négociations de coalition entre Yisrael Beytenu et le Likud étaient en crise lundi après-midi, selon des sources proches des négociations.
Dans la matinée, le Premier ministre Benjamin Netanyahu avait convoqué une réunion urgente avec le président de Yisrael Beytenu, le député Avigdor Liberman, le ministre des Finances Moshe Kahlon, de Koulanou, et le négociateur de la coalition au sein du Likud, le ministre du Tourisme Yariv Levin.
Selon une source proche de Kahlon, les discussions se sont heurtées à la demande de Liberman de milliards de shekels publics pour renforcer les pensions de dizaines de milliers d’immigrants de l’ancienne Union soviétique.
Le sujet est fondamental pour Yisrael Beytenu, pour qui les Israéliens russophones âgées constituent le cœur de l’électorat. La plupart des quelque 78 000 immigrants âgés pauvres du pays sont originaires de l’ancienne URSS, en partie parce que beaucoup d’entre eux sont arrivés en Israël sans retraite et étaient trop âgés pour constituer une nouvelle pension de retraite dans le pays.
Le ministre des Finances, Moshe Kahlon, a déclaré que la proposition faite à Yisrael Beytenu était équitable et qu’il ne serait pas d’accord avec des efforts sans retenue qui assureraient une expansion de la coalition.
« La proposition que nous avons faite à Yisrael Beytenu est extrêmement juste. Elle ne fait pas de discrimination, elle n’est pas sectorielle et correspond à l’ensemble de la population. Nous n’autoriserions pas une proposition qui creuserait les disparités [sociétales] », a-t-il déclaré, selon Walla.
Le ministre des Finances a ajouté qu’il a travaillé à un élargissement du gouvernement l’année dernière mais qu’il ne permettra pas « une frénésie – non politique, non sécuritaire et non économique ».
Les pourparlers de coalition avec Yisrael Beitenou sont rentrés dans une impasse plus tôt aujourd’hui, a annoncé le chef de parti Liberman. L’un des points de contention serait le financement des pensions des immigrants de l’ex-Union soviétique – une catégorie démographique clé pour Liberman.
Dans un communiqué publié lundi matin, Yisrael Beytenu a déclaré : « Nos conditions pour entrer dans la coalition étaient déjà connues ».
Le parti fera un « effort honnête » pour résoudre le différend, « mais nous ne pouvons pas avancer si la volonté n’est pas aussi présente de l’autre côté. »
Mais les fonctionnaires du ministre des Finances ont rejeté la demande de Yisrael Beytenu, notant le prix élevé – 2,5 milliards de shekels (595 millions d’euros), selon les estimations – et les problèmes légaux et éthiques soulevés par l’attribution d’aides sociales sur la base du lieu de naissance.
« Le ministre des Fiances ne souhaite pas accepter la demande de Yisrael Beytenu, que cette aide ne s’applique qu’aux nouveaux immigrants, et nous n’avons pas trouvé de solution à ce problème », a déclaré un fonctionnaire des Finances selon le site d’informations Walla.
Kahlon aurait dit à Netanyahu que son parti, qui compte 10 sièges à la Knesset, ne resterait pas dans la coalition si la mesure était appliquée comme cela. Ce retrait pourrait renverser le gouvernement.
Toute tentative d’étendre les aides proposées à une plus large population de personnes âgées pourrait coûter cinq fois plus cher, selon des fonctionnaires.
Les députés de l’opposition ont menacé lundi de torpiller le passage de toute aide sur les retraites destinée uniquement aux immigrants (ou aux immigrants de l’ancienne URSS).
Itzik Shmuli, député de l’Union sioniste qui préside le Caucus des retraites de la Knesset, a déclaré que si l’accord final ne proposait des aides qu’aux immigrants de l’ancienne URSS, « nous porterons cet accord discriminatoire devant les tribunaux ».
Smulik Mizrahi, directeur du syndicat des retraités, a envoyé lundi une lettre à Netanyahu, demandant que toute aide acceptée dans les négociations soit appliquée de manière égale à tous les retraités sur la base des besoins économiques, pas des origines culturelles ou géographiques, a annoncé Walla.
La députée Tali Ploskov, ancienne maire Yisrael Beytenu d’Arad qui siège à présent sur la liste du parti Koulanou, a également critiqué la demande de son ancien parti, disant qu’un projet de réforme des retraites est déjà en cours de développement au ministère des Finances, et qu’il permettrait de faire passer toutes les personnes âgées pauvres au-dessus du seuil de pauvreté. Cette réforme était une promesse de campagne de Koulanou.
La rencontre Netanyahu – Kahlon – Liberman – Levin s’est achevée lundi peu après midi, sans accord selon les sources.
Kahlon a déclaré lundi dans l’après-midi que son objectif était d’assurer que les inégalités en Israël se réduisent plutôt qu’elles ne s’élargissent. Il a assuré que la proposition de son ministère sur le sujet des retraites était équitable. « Le parti Koulanou ne permettra pas que l’on nuise au principe d’égalité. » Il a déclaré qu’il voulait voir Yisrael Beytenu dans la coalition, et que la proposition était toujours sur la table.
Netanyahu a lui déclaré aux journalistes que les négociations avec Yisrael Beytenu n’avaient pas échoué et que le processus prenait du temps.
« Il y a des négociations, qui ont des hauts et des bas. Il faut des efforts, et il y a toujours des crises. Rien ne s’est effondré, il fait du temps, mon objectif est un gouvernement large », a déclaré le Premier ministre à des journalistes à la Knesset où le Likud tenait une réunion de parti.
« Je suggère de ne pas se laisser aller à une humeur changeante, à ne pas perdre espoir, à ne pas succomber à l’irritation. Nous devons joindre nos forces dans un gouvernement aussi large que possible, afin de faire avancer les défis et les opportunités de l’Etat d’Israël. »
Si les négociations échouent, Netanyahu se retrouvera avec la même coalition étroite de 61 sièges qu’avant le début des négociations avec l’Union sioniste il y a plusieurs semaines. Celles-ci se sont effondrées la semaine dernière quand Liberman a provisoirement accepté de rejoindre la coalition, où il devrait prendre le poste de ministre de la Défense.
Pour sa part, le ministre de l’Education Naftali Bennett (HaBayit HaYehudi) a conditionné l’approbation de l’extension de la coalition à la correction par Netanyahu « des déficiences du cabinet », une référence apparente à l’absence de ministre de la Défense depuis la démission vendredi de Moshe Yaalon.
« On ne peut pas attendre que les membres du cabinet portent la responsabilité de la sécurité d’Israël sans leur donner les outils nécessaires ; par conséquent il y a une condition à l’approbation par tout le parti HaBayit HaYehudi des derniers changements au gouvernement et au cabinet », a-t-il déclaré, selon la radio militaire.
« Ce n’est pas une condition sectaire, mais plutôt un besoin fondamental national de tous les membres du cabinet et de celui qui le dirige », a-t-il ajouté.
Liberman s’est exprimé devant la Knesset
Avigdor Liberman s’est exprimé à la Knesset lundi après-midi :
« Nos demandes ont été cohérentes. J’imagine que si après les élections ils nous avaient proposé le portefeuille de la Défense et une réforme des retraites, nous aurions alors pu conclure avec succès les négociations.
Nous sommes venus aux négociations les mains propres, nous avons dit que nous négocierions avec transparence et ouverture. Mercredi dernier, j’ai dit que si nous avions une offre avec ces paramètres, nous viendrions et parlerions.
En chemin, nous avons souligné que nous n’attendions pas que 100 % de nos demandes soient acceptées.
Nous avions l’intention de finir les négociations aussi vite que possible. Nous étions d’accord pour faire des compromis sur beaucoup de choses, et nous avons fait des compromis : sur la religion et l’état, sur la peine de mort pour les terroristes. Mais sur deux sujets fondamentaux, nous ne voulons pas faire de compromis : la Défense et la réforme des retraites.
J’ai dit à propos de la réforme des retraites que c’est une réforme pour tous, pas uniquement pour les immigrants de Russie, ce qui est la manière dont elle est présentée. Nous parlons d’une réforme des retraites qui vient corriger les problèmes et aider les secteurs plus faibles, dont beaucoup, malheureusement, sont des immigrants de l’ancienne Union soviétique, et sont aussi des êtres humains. Je ne comprends pas la tentative de présenter cela comme quelque chose qui enlève aux autres.
Les propositions que nous avons eues du ministère des Finances sont inacceptables. Je suis surpris par les fuites, qui sont erronées.
Les fuites se contredisent aussi entre elles.
Dans la presse russe, [Koulanou] a déclaré ‘Ne vous inquiétez pas, vous n’avez pas besoin de Yisrael Beytenu, nous vous donnerons ce que nous avons promis de toute manière’. Et dans la presse israélienne, ‘c’est une tentative de discrimination en faveur des Russes’.
L’offre que nous avons reçue n’est pas appropriée. Le ministre des Finances a promis de corriger les recommandations du comité Alaluf [sur la pauvreté], 350 millions de shekels sont déjà inclus dans le budget. Ils ont essayé d’inclure cet argent dans la proposition qu’ils nous ont faite.
Nous sommes restés silencieux pendant trois jours, avons négocié, et le Premier ministre et le ministre des Finances connaissaient nos demandes, ce dont nous parlions, combien cela coûterait, quels seraient les critères, depuis le premier jour.
Quelque chose d’autre se cache-t-il sous l’entêtement du ministre des Finances ?
Je me suis engagé à accepter toute offre faite par [l’ancien conseiller économique du Premier ministre] Eugene Kandel, si les autres l’acceptent. Les Finances n’acceptent pas cela non plus.
La tentative d’étaler [le bonus des retraites] jusqu’en 2020 signifie que le bénéfice pour ces familles sera cette année de 50 ou 100 shekels. Ce n’est pas là-dessus que nous avons fait campagne pendant les élections.
Nous sommes dans une impasse. Nous attendons d’autres propositions. Si nous les avons, nous sommes ouverts aux négociations. »