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Analyse

Les pays du Golfe, puissances en expansion sur le brasier du Printemps arabe

Alors que l'Égypte, la Libye et la Syrie, puissances traditionnelles, étaient secouées, les pays du Golfe sont allés de l'avant, notamment en normalisant leurs liens avec Israël

Un homme lit un exemplaire du journal émirati The National, avec en Une l'accord EAU-Israël et la suspension des mesures d'annexion par Israël, près du Burj Khalifa, la plus haute structure et le plus grand bâtiment du monde, à Dubaï le 14 août 2020. (Crédit : Giuseppe Cacace/AFP)
Un homme lit un exemplaire du journal émirati The National, avec en Une l'accord EAU-Israël et la suspension des mesures d'annexion par Israël, près du Burj Khalifa, la plus haute structure et le plus grand bâtiment du monde, à Dubaï le 14 août 2020. (Crédit : Giuseppe Cacace/AFP)

Au déclin de régimes autoritaires dans le tumulte du Printemps arabe, les pays du Golfe ont frémi. Mais dix ans après l’affaiblissement de leurs puissants voisins, les monarchies de la péninsule sont devenues le nouveau centre de gravité du Moyen-Orient.

« L’affaiblissement des centres de pouvoir traditionnels (…) a fait du Golfe, pour la première fois dans l’histoire moderne, le centre du pouvoir arabe », observe Bader Al-Saif, professeur adjoint d’Histoire à l’université du Koweït.

En 2011, le raz-de-marée révolutionnaire qui balaye la région déstabilise de vieilles élites dirigeantes jugées corrompues, répressives, incompétentes. En Tunisie et en Egypte, les manifestations de rue font tomber les régimes autoritaires des présidents tunisien Zine el Abidine Ben Ali et égyptien Hosni Moubarak, en Syrie, en Libye et au Yémen, elles dégénèrent en guerre civile.

Autrefois phares culturels incontournables et promoteurs du panarabisme triomphant, l’Egypte ne fait aujourd’hui plus les gros titres que pour les violations des droits humains et la pauvreté, la Syrie et l’Irak pour le chaos qui les déchire.

Un Égyptien agite un drapeau national au-dessus d’un rassemblement pro-militaire marquant le troisième anniversaire du soulèvement de 2011 sur la place Tahrir au Caire, en Égypte, le samedi 25 janvier 2014. (Crédit : AP/Amr Nabil)

Ce spectacle de désolation tranche avec la prospérité insolente du Qatar ou des Emirats arabes unis, où le confort des gratte-ciels scintillants flambant neufs attire des millions d’expatriés.

Le mouvement révolutionnaire n’a pas épargné le Golfe. Mais les soubresauts révolutionnaires à Oman et surtout au Bahreïn ont été étouffés dans l’oeuf, avec l’intervention armée à Manama du grand-frère saoudien.

« Prendre les choses en main »

Le Printemps arabe a « ouvert les yeux » des pays du Golfe, proches partenaires de Washington dont ils ont observé l’attentisme alors que des régimes amis étaient mis en difficulté en Egypte ou au Bahreïn.

« Ils ont réalisé qu’ils devaient prendre les choses en main et que les Etats-Unis n’offraient pas de garantie de sécurité perpétuelle », poursuit M. Al-Saif.

Cela a constitué un tournant mais les pays du Golfe avaient préparé leur ascension bien avant 2011, notent les experts.

« Le Printemps arabe n’a pas lancé cette tendance, il l’a accélérée et mise en lumière », en particulier aux Emirats et au Qatar, analyse Abdelkhaleq Abdallah, professeur de sciences politiques émirati.

L’Arabie saoudite disposait déjà d’une stature de poids lourd, en tant que premier exportateur de pétrole brut au monde et siège des lieux les plus saints de l’islam.

Mais Doha « a tourné le Printemps arabe à son avantage » en y « jouant un rôle » grâce à la couverture des événements par sa célèbre chaîne d’information Al-Jazeera et au succès temporaire des partis islamistes, notamment en Tunisie et en Egypte, estime M. Abdallah.

Des membres de la gendarmerie et des forces de sécurité jordaniennes sont en état d’alerte alors que des manifestants scandent des slogans et brandissent un drapeau national lors d’une manifestation devant le bureau du Premier ministre dans la capitale Amman le 2 juin 2018. (AFP PHOTO / Khalil MAZRAAWI)

Les Emirats de leur côté en ont profité pour se présenter comme « un havre de sécurité », attirant les investisseurs en particulier à Dubaï – l’une des sept principautés du pays qui tente alors de se relever de la crise économique de 2010.

Dix ans plus tard, dans un Moyen-Orient miné par les conflits et la paupérisation, l’Arabie saoudite dirige le G20, le Qatar s’apprête à accueillir la prochaine Coupe du monde de football et les Emirats envoient un astronaute dans l’espace.

« Rivalité de puissance »

Cette ascension ne va pas sans une « rivalité de puissance », relève Emma Soubrier, chercheuse à l’Arab Gulf States Institute basé à Washington.

En 2017, l’Arabie saoudite et les Emirats ont rompu leurs relations avec le Qatar accusé de soutenir les mouvements islamistes et de provoquer des troubles via Al-Jazeera – ce que Doha nie.

En Libye, Abou Dhabi a appuyé le maréchal Khalifa Haftar contre les forces du gouvernement reconnu par l’ONU accusé de connivence avec les islamistes et soutenu par la Turquie et le Qatar, proches du mouvement transnational des Frères musulmans.

L’intervention sans mandat de l’ONU en Libye a constitué « un tournant », souligne Emma Soubrier : « un message envoyé aux partenaires occidentaux que désormais les Emirats sont une puissance régionale à même d’assurer, si nécessaire par des frappes militaires, des intérêts qu’ils ont à cœur de défendre sur le terrain ».

Un soldat émirati sort en rappel d’un Sikorsky UH-60 Black Hawk lors d’un exercice sur une base militaire émiratie abritant une installation d’opérations militaires en terrain urbain à al-Hamra, aux Émirats arabes unis, le 23 mars 2020. (Crédit : AP/Jon Gambrell)Alors que des puissances traditionnelles comme l’Égypte, la Libye et la Syrie étaient aux prises avec des bouleversements et des conflits internes, les pays du Golfe sont allés de l’avant, notamment en normalisant leurs liens avec Israël

Même chose pour l’Arabie saoudite, qui intervient depuis 2015 au Yémen où elle dirige une coalition militaire – qui inclut les Emirats – pour soutenir les forces du gouvernement face aux rebelles Houthis, soutenus par le grand rival de Ryad, l’Iran.

Le Golfe affiche désormais sans filtre des choix diplomatiques qui détonnent, comme le rapprochement avec Israël, avec qui les Emirats et Bahreïn ont en septembre officiellement normalisé les relations.

Et, contrairement aux anciennes puissances régionales ou au Qatar d’aujourd’hui, certains pays du Golfe ont fait le choix du repli nationaliste, rejetant « le panarabisme et le panislamisme » remis au goût du jour par le Printemps arabe, analyse la chercheuse saoudienne Eman Alhussein.

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