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Analyse

Les querelles sur le panel de sélection des juges pèsent sur les négociations

L'opposition dit qu'elle quittera les négociations si elle n'obtient pas son siège au sein du comité

Carrie Keller-Lynn

Carrie Keller-Lynn est la correspondante politique et juridique du Times of Israël.

Le député du Likud Nissim Vaturi aux côtés des soutiens de l'ancien policier de la police des frontières Orian Ben Khalifa, accusé d'avoir agressé une Palestinienne dans la Vieille Ville de Jérusalem, lors d'une manifestation aux abords de la Cour des magistrats de Jérusalem où l'homme est jugé, le 2 mai 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
Le député du Likud Nissim Vaturi aux côtés des soutiens de l'ancien policier de la police des frontières Orian Ben Khalifa, accusé d'avoir agressé une Palestinienne dans la Vieille Ville de Jérusalem, lors d'une manifestation aux abords de la Cour des magistrats de Jérusalem où l'homme est jugé, le 2 mai 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

L’élection, prévue la semaine prochaine, de deux députés à la Commission chargée des nominations des juges en Israël a mis sous pression les négociations en cours sur le projet de réforme du système judiciaire israélien controversé qui est proposé par le gouvernement, en plus de miner la cohésion dans les rangs de l’opposition et, aujourd’hui également, au sein de la coalition au pouvoir.

L’élection des deux représentants de la Knesset qui siègeront au sein de ce panel de neuf membres est prévue en date du 14 juin.

Des sources proches du Premier ministre Benjamin Netanyahu et des déclarations officielles qui ont été faites par son bureau ont souligné qu’aucune décision définitive n’avait encore été prise, qu’il s’agisse des nominations qui seront effectuées par la coalition dans la Commission ou de l’éventuelle mise à l’écart de l’opposition dans le panel.

Traditionnellement, l’opposition obtient l’un des deux sièges réservés aux députés au sein de l’instance.

Mais deux candidatures issues du propre parti du Premier ministre indiquent que la coalition est, elle aussi, en proie aux tensions.

Lundi, deux députés du Likud de moindre envergure – Nissim Vaturi et Tally Gotliv – se sont présentés comme candidats auprès du secrétaire de la Knesset. Deux initiatives qui, selon des sources proches de Netanyahu, n’auraient pas été coordonnées avec le parti.

Venant encore compliquer les choses, un autre député du parti, Moshe Saada, songerait lui aussi à rejoindre la course avant la fin de l’enregistrement des candidatures, a fait savoir un porte-parole du parlementaire.

« Tous les députés de la coalition ou de l’opposition pourront soumettre leur candidature jusqu’à mercredi et ils pourront également la retirer jusqu’à mercredi prochain, dernier délai », a fait ostensiblement savoir le bureau de Netanyahu en réponse.

Leurs noms seront donc soumis aux côtés des deux candidats issus du parti d’extrême-droite Otzma Yehudit – l’accord de coalition conclu avec le Likud contenait la promesse d’envoyer l’un de ses représentants siéger à la Commission de sélection judiciaire.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu dirige la réunion du cabinet hebdomadaire à Jérusalem, le 28 mai 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Et pourtant, cette bataille pour les sièges eux-mêmes pourrait s’avérer être bien vaine alors que la coalition menace de ne pas réunir la Commission sous sa forme actuelle et qu’elle reste déterminée à faire rapidement adopter la législation qui restructurera sa composition.

La Commission de sélection judiciaire est centrale dans le plan de refonte du système judiciaire avancé par le gouvernement, qui prévoit d’affaiblir l’autorité des juges au profit de la toute-puissance politique. La composition actuelle de la Commission – qui comprend des représentants de la Knesset, de la Cour suprême et de l’Association israélienne du Barreau – implique que la candidature d’un juge doit bénéficier d’une large adhésion pour être approuvée.

Le projet de loi prévoyant d’accorder aux politiciens une quasi toute puissance dans la nomination des juges a été mis en pause au mois de mars, quelques heures seulement avant qu’il ne soit définitivement approuvé, dans un contexte de manifestations massives, de grèves et de menaces de désobéissance civile.

Garantir un plus grand contrôle, par les politiques, du processus de nomination des juges est la priorité du ministre de la Justice Yariv Levin, et c’est également le principal point de friction, selon les parties en lice, des négociations qui visent actuellement à trouver un compromis dans le plan de réforme judiciaire alors que le mouvement de protestation de ses opposants est entré dans sa 22e semaine et que les pressions se renforcent, au sein de la coalition, pour que le projet de loi ad hoc soit enfin adopté.

Avec cette même législation mise en pause, les élections qui désigneront les deux représentants parlementaires de la Commission, sous sa forme actuelle, vont de l’avant. Mais tout cela pourrait finalement devenir sans objet si le projet de loi actuellement gelé devait finalement être approuvé.

Une source du Likud proche de Levin a déclaré, mardi, que « Yariv se fiche d’un ou deux représentants de la coalition siégeant dans la Commission actuelle. Ce qui est important pour lui, c’est l’adoption de sa loi. »

Et pourtant, Netanyahu continue à faire miroiter la possibilité que la coalition s’empare des deux sièges au sein du panel, n’en laissant aucun à l’opposition – en partie pour obliger cette dernière à faire des concessions dans les négociations qui se déroulent actuellement sous les auspices du président Isaac Herzog.

Lundi soir, son bureau a diffusé un communiqué qui faisait explicitement le lien entre la composition de la Commission et d’éventuels progrès réalisés dans les pourparlers.

« Les représentants de la coalition travaillent dur, et de toutes les manières possibles, pour trouver un accord à la résidence du président. Tant que des accords pourront être conclus, alors il y aura un représentant de la coalition et un représentant de l’opposition à la Commission de sélection judiciaire », a fait savoir un communiqué du bureau du Premier ministre.

La députée du Likud, Tally Gotliv, assistant à une conférence à la Knesset, à Jérusalem, le 28 novembre 2022. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Au cours des deux dernières semaines, les négociateurs de la coalition et les médias israéliens ont fait état d’accords préliminaires imminents portant sur la définition des principes qui orienteront les négociations ou sur des discussions qui seront consacrées à deux questions moins litigieuses – la limitation de l’utilisation de la notion juridique de « raisonnabilité » lors du réexamen, par les juges, des décisions prises par le gouvernement et l’autorisation donnée aux ministres de choisir leurs propres conseillers juridiques.

Mais l’opposition a clairement établi qu’elle n’accepterait pas d’accord partiel et qu’elle n’accepterait pas, en particulier, un accord qui ne contiendrait pas l’abandon définitif de la question des nominations judiciaires et du reste du plan ourdi par la coalition.

Le leader de l’opposition, Yair Lapid, a noté lundi qu’il y avait un manque de confiance entre les deux camps et il a renouvelé, mardi, son appel à réunir la Commission de sélection judiciaire sous sa forme actuelle lors d’un entretien accordé à la radio militaire.

De son côté, Benny Gantz, dont le parti siège également dans l’opposition, a laissé entendre la semaine dernière qu’il pourrait se retirer des négociations en cours à la résidence du président si la coalition devait décider de désigner deux de ses membres pour siéger dans le panel.

Le chef du parti HaMahane HaMamlahti Benny Gantz s’exprimant lors d’une réunion de sa faction, à la Knesset, à Jérusalem, le 19 avril 2023. (Crédit : Yonatan SIndel/Flash90)

Alors qu’il ne reste que moins de deux mois avant la fin de la session estivale à la Knesset – elle est considérée comme une échéance potentielle pour que des progrès tangibles soient réalisés dans les pourparlers ou pour faire avancer le projet de loi qui, sous sa forme actuelle, viendrait bouleverser le système judiciaire israélien – la nomination des deux députés au sein de la Commission est devenue une difficulté qui pourrait obliger à trouver une solution ou qui pourrait permettre aux partis de se désengager des pourparlers en cours en présentant des excuses plausibles.

La semaine prochaine, les responsables des partis de la coalition devraient se rencontrer pour prendre une décision sur le nombre de candidats qui se présenteront – un ou deux, a noté une source du Likud proche du dossier.

Comment les candidatures sans l’aval du parti peuvent-elles affecter la stratégie de la coalition ?

Habituellement, la coalition et l’opposition s’accordent en amont sur l’identité des candidats, et seule l’identité des deux candidats convenus est inscrite sur les bulletins de vote lors de l’élection afin de garantir le résultat de ce scrutin anonyme.

Vaturi et Gotliv ont déposé unilatéralement leur candidature lundi, et comme l’a établi clairement le bureau de Netanyahu dans la foulée, ils pourront se retirer de la course avant le vote du 14 juin.

Vaturi a néanmoins estimé, mardi, qu’il était « un concurrent sérieux » et qu’il ne renoncerait pas facilement à se présenter.

« Il faudra qu’on réussisse à me convaincre qu’il y a un autre candidat de valeur », a-t-il confié au micro de la radio militaire.

La députée d’Otzma Yehudit, Limor Son Har-Melech, assiste à un débat en plénière de la Knesset, le 22 novembre 2022. (Crédit : Olivier Fitoussi/Flash90)

Otzma Yehudit, de son côté, a soumis deux candidatures : celles du député Yitzhak Kreuzer et celle de la législatrice Limor Son Har Melech. Des sources du Likud ont déclaré s’attendre à ce que ce soit l’un des candidats soumis par le leader du parti Itamar Ben Gvir qui soit choisi par la coalition, conformément aux promesses politiques faites au mois de décembre. Kreuzer est le favori au sein d’Otzma Yehudit mais au vu de l’obligation de choisir au moins une députée femme pour siéger dans le panel, la faction a aussi sélectionné Son Har Melech, les autres postulants n’étant pas encore définis.

« Nous pensons que le système judiciaire doit travailler conformément aux valeurs du judaïsme et du sionisme », a déclaré Kreuzer au micro de la radio militaire, mardi matin.

Si Vaturi et Gotliv devaient rester dans la course, ils pourraient retirer des votes aux candidats d’extrême-droite ou à un candidat de l’opposition, avec un impact arithmétique potentiel.

Pour sa part, l’opposition a paru encline, elle aussi, à chercher à gâcher ses chances d’entrer au panel – jusqu’à mercredi tout du moins. Au cours des deux dernières semaines, le camp s’est déchiré pour choisir son candidat. Enfin, mercredi, la formation HaMahane HaMamlahti de Benny Gantz et Avoda ont annoncé qu’ils retiraient leurs candidats respectifs au profit de Karine Elharrar, élue de Yesh Atid.

Et si la question était vaine ?

Levin, en tant que ministre de la Justice, supervise la commission et il a menacé de ne pas la réunir tant que sa composition ne serait pas modifiée.

Ce qui entraînerait des retards coûteux dans les 80 nominations à des postes de magistrat qui restent en suspens – avec, parmi elles, deux prochaines vacances au sein de la Cour suprême.

Dans la constitution actuelle du panel, quatre sièges sont réservés par les politiciens et cinq fauteuils sont occupés par des représentants du système judiciaire israélien et de l’Association du barreau. Parmi les politiciens, il y a le ministre de la Justice, un autre membre du cabinet et deux députés.

Une super-majorité de sept membres sur neuf est nécessaire pour approuver un juge à la Cour suprême et un simple magistrat peut être nommé par une majorité de cinq voix – ce qui signifie que la coalition ne pourra pas forcer les sélections, même si elle se saisit des deux sièges réservés aux parlementaires (même si une telle configuration ôterait à l’opposition toute faculté d’influencer les discussions).

Selon le projet de loi qui était sur le point d’être adopté et que Netanyahu avait gelé pour ouvrir la porte à des négociations fin mars, la Commission de sélection judiciaire passerait de neuf à onze membres. La coalition aurait le contrôle, dans le cadre de son mandat, des deux premières nominations à la Cour suprême. Les nominations des juges officiant dans des juridictions inférieures nécessiteraient sept votes sur onze et la coalition détiendrait directement six fauteuils au sein du panel.

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