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Analyse

Les roquettes à Gaza nuisent à l’image de Netanyahu, mais le Hamas le plébiscite

Les attentats suicides du Hamas en 1996 ont fait perdre Shimon Peres et fait gagner Netanyahu ; le voir se précipiter aux abris ne l'aide pas, mais le Hamas veut sa survie

Avi Issacharoff

Avi Issacharoff est notre spécialiste du Moyen Orient. Il remplit le même rôle pour Walla, premier portail d'infos en Israël. Il est régulièrement invité à la radio et à la télévision. Jusqu'en 2012, Avi était journaliste et commentateur des affaires arabes pour Haaretz. Il enseigne l'histoire palestinienne moderne à l'université de Tel Aviv et est le coauteur de la série Fauda. Né à Jérusalem , Avi est diplômé de l'université Ben Gourion et de l'université de Tel Aviv en étude du Moyen Orient. Parlant couramment l'arabe, il était le correspondant de la radio publique et a couvert le conflit israélo-palestinien, la guerre en Irak et l'actualité des pays arabes entre 2003 et 2006. Il a réalisé et monté des courts-métrages documentaires sur le Moyen Orient. En 2002, il remporte le prix du "meilleur journaliste" de la radio israélienne pour sa couverture de la deuxième Intifada. En 2004, il coécrit avec Amos Harel "La septième guerre. Comment nous avons gagné et perdu la guerre avec les Palestiniens". En 2005, le livre remporte un prix de l'Institut d'études stratégiques pour la meilleure recherche sur les questions de sécurité en Israël. En 2008, Issacharoff et Harel ont publié leur deuxième livre, "34 Jours - L'histoire de la Deuxième Guerre du Liban", qui a remporté le même prix

Une photo prise dans la ville de Gaza le 5 mai 2019 montre des tirs de roquettes sur Israël. (Crédit : Mahmud Hams/AFP)
Une photo prise dans la ville de Gaza le 5 mai 2019 montre des tirs de roquettes sur Israël. (Crédit : Mahmud Hams/AFP)

Certains à Gaza tentent de déclencher une guerre.

On ne sait pas encore si c’est l’œuvre du Hamas ou d’un petit groupe terroriste qui lui est affilié, ou si le Jihad islamique palestinien est à l’œuvre ici.

Quoi qu’il en soit, il est clair que quiconque tire des roquettes sur Ashkelon et Ashdod tente d’entraîner Israël dans une campagne militaire dans la bande de Gaza, précisément au moment où les accords entre Israël et le Hamas semblent fonctionner, et au moment où Gaza voit enfin affluer de l’argent, livré dans l’enclave côtière de diverses manières, toutes approuvées par l’État juif.

Malgré la possibilité assez raisonnable que le Hamas autorise les tirs de roquettes, on ne peut écarter la possibilité qu’il s’agisse de manœuvres indépendantes du Jihad islamique – qui ne sont pas en accord avec les dirigeants de la bande de Gaza.

Le Jihad islamique tente peut-être de faire d’une pierre plusieurs coups, à savoir miner l’autorité déjà en voie d’érosion du Hamas, porter un coup à l’image d’Israël et à celle de son Premier ministre et, au final, provoquer une opération militaire à grande échelle à Gaza.

Des membres des brigades Al-Qods, la branche armée du Jihad islamique palestinien, avec une réplique d’une roquette durant une parade militaire, le 1 octobre 2018. (Crédit : AP/Adel Hana)

Si tel est le cas, jusqu’à présent, les dirigeants du Hamas refusent de revenir à la raison et de restreindre le Jihad islamique. D’où le soupçon que les dirigeants de Gaza ferment les yeux sur les tirs de roquettes.

Mais le refus du Hamas de prendre des mesures décisives n’est pas nécessairement synonyme de désir de guerre. Au contraire, elle peut refléter sa propre incompétence et, surtout, sa crainte de critiques publiques sévères de la part du peuple palestinien.

Le statut du Jihad islamique à Gaza est très différent de celui des petits groupes salafistes avec lesquels le Hamas croise parfois le fer. Le Jihad islamique est une organisation militaire qui possède une puissance de feu importante – peut-être même un arsenal de roquettes plus important que celui du Hamas.

Il bénéficie également d’un soutien iranien considérable, tout comme le Hamas, mais si les deux groupes terroristes basés à Gaza s’affrontent, Téhéran risque de pénaliser le Hamas et de cesser de le financer. Cette considération est au cœur du dilemme de l’organisation quant à la force avec laquelle il peut contrer le Jihad islamique.

Quelles que soient les rivalités qui secouent l’enclave, celui qui a tiré les deux roquettes sur Ashdod et Ashkelon mardi soir a porté un sérieux coup à l’image du Premier ministre Benjamin Netanyahu.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, (au centre), en train d’être éloigné de la scène de la campagne électorale entouré par des agents de sécurité alors que des roquettes sont tirées sur Ashdod, le 10 septembre 2019. (capture d’écran : Twitter)

Netanyahu, qui ne ménage aucun effort pour cultiver son statut de « M. Sécurité », s’est montré très impuissant face aux tensions avec la bande. Ses annonces sur les nombreuses façons dont Israël pourrait traiter avec le territoire – et d’ailleurs avec le leader du Hezbollah Hassan Nasrallah, dont Netanyahu se moque comme étant « l’homme dans le bunker » – se sont avérées creuses.

Israël n’a pas réussi à générer la dissuasion nécessaire contre le Hamas. C’est pourquoi l’organisation terroriste, à son tour, ne se sent pas obligée d’affronter avec acharnement le Jihad islamique ou tout autre groupe voyou dans la bande de Gaza.

Il est difficile de dire si les images d’un Premier ministre évacué d’un rassemblement électoral sous des sirènes hurlantes et des tirs de roquettes lui coûteront les élections de la semaine prochaine, mais ce n’est pas la première fois que des groupes terroristes palestiniens tentent d’influencer les résultats d’un scrutin israélien.

Un policier israélien et un secouriste courent sur les lieux d’une explosion où un kamikaze a fait exploser une bombe dans un bus du centre-ville de Jérusalem, le dimanche 3 mars 1996, faisant 18 morts et de nombreux blessés. Le groupe terroriste islamique Hamas a revendiqué l’attentat. (AP Photo/Brian Hendler)

Le Hamas l’a fait en 1996 avec une série d’attentats-suicides à la bombe qui ont fini par entraîner la défaite électorale du Premier ministre Shimon Peres et l’installation de Netanyahu au pouvoir.

Le Premier ministre élu Benjamin Netanyahu, (à gauche), observe le Premier ministre Shimon Peres lors d’une cérémonie à la Knesset à Jérusalem, le lundi 17 juin 1996. Netanyahu se préparait à présenter son nouveau gouvernement à la Knesset. (AP PHOTO/Nati Harnik)

Les groupes terroristes palestiniens à Gaza parviendront-ils à renverser à nouveau un Premier ministre sortant ?

Cela semble très improbable.

Il est difficile de croire qu’Israël sera entraîné dans un véritable conflit à Gaza quelques jours avant les élections du 17 septembre, surtout lorsque le Hamas n’a manifestement aucun intérêt dans la guerre.

Les dirigeants locaux ont en fait un intérêt dans la survie politique de Netanyahu, car il a prouvé que son gouvernement est disposé à coopérer avec le Hamas – plus que tout autre gouvernement de l’histoire d’Israël.

Israël et Gaza pourraient donc échanger des coups soigneusement mesurés jusqu’à mardi prochain. Mais le 18 septembre, tous les paris seront ouverts.

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