Israël en guerre - Jour 347

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Les traumatismes physiques et psychiques de 26 ex-otages répertoriés dans une nouvelle étude

Des chercheuses révèlent que ces 19 enfants et sept femmes ont souffert de la faim, du manque d'hygiène et du manque de lumière ; la scientifique à la tête de l'étude s'inquiète du sort des captifs encore détenus à Gaza

Eitan Yahalomi, 12 ans, retrouve sa mère au point de passage de Kerem Shalom en Israël, le 27 novembre 2023, après avoir été libéré par le Hamas dans le cadre d'un accord de trêve. (Crédit : Armée israélienne)
Eitan Yahalomi, 12 ans, retrouve sa mère au point de passage de Kerem Shalom en Israël, le 27 novembre 2023, après avoir été libéré par le Hamas dans le cadre d'un accord de trêve. (Crédit : Armée israélienne)

Libérés après près de 50 jours passés en captivité, 19 enfants et sept femmes ont été victimes de l’impact de stratégies relevant du terrorisme psychologique, des stratégies qui se sont présentées sous différentes formes dans un contexte de guerre – et qui ont notamment compris l’isolement, les intimidations, les privations en matière d’alimentation et d’eau ainsi que des déchaînements de violence émotionnelle.

Ces conclusions ont été publiées la semaine dernière dans une étude innovante, la toute première à avoir collecté et rassemblé des données de recherche sur les enfants qui avaient été pris en otage et ce, immédiatement après leur libération. Après avoir été remis en liberté par le groupe terroriste du Hamas, les enfants avaient été examinés et pris en charge à l’hôpital pédiatrique Schneider à la fin du mois de novembre et au début du mois de décembre.

« Aussitôt que nous avons su que des enfants avaient été pris en otage, nous avons lancé des recherches extensives mais nous n’avons trouvé aucune donnée issue de recherches menées sur des enfants qui ont été conservés en captivité », explique la docteure Noa Ziv, médecin au sein du département de pédiatrie de l’hôpital, qui a effectué l’étude avec deux de ses collègues, la docteure Yael Mozer-Glassberg et la docteure Havatzelet Yarden-Bilavsky.

Dans cette étude, qui a été publiée dans le prestigieux journal Acta Pædiatrica, ces scientifiques décrivent les différents symptômes qu’ont montré les patients. Parmi ces symptômes – une liste non-exhaustive – une perte de poids significative, un traumatisme émotionnel et des complications entraînées par l’absence d’hygiène et par le manque de prise en charge médicale appropriée.

Les femmes et les enfants qui ont participé à l’étude figuraient parmi les 251 personnes qui avaient été kidnappées par le Hamas lors du pogrom du 7 octobre – ce jour-là, des milliers de terroristes avaient franchi la frontière séparant Gaza du sud d’Israël. Ils avaient massacré près de 1 200 personnes, se livrant à des atrocités et commettant des violences sexuelles à grande échelle.

115 otages se trouvent encore actuellement dans les geôles du Hamas.

Le Hamas avait libéré 105 civils pendant une trêve d’une semaine qui avait eu lieu à la fin du mois de novembre. Les ex-captifs avaient été pris en charge dans six hôpitaux israéliens différents : l’hôpital Soroka, l’hôpital Sheba, l’hôpital Wolfson, l’hôpital Ichilov, l’hôpital Shamir et l’hôpital Schneider, spécialisé dans la pédiatrie.

Un hélicoptère israélien rapatrie les otages israélien et arrive à l’hôpital pour enfants Schneider, à Petah Tikva, le 26 novembre 2023. (Crédit : Yossi Aloni/Flash90)

Tous les enfants et toutes les femmes qui avaient été examinés à Schneider avaient été enlevés alors qu’ils s’étaient réfugiés dans la pièce blindée de leur habitation. 24 d’entre eux ont raconté avoir assisté au meurtre ou au kidnapping d’un autre proche pendant le pogrom.

Parmi eux, il y avait six familles nucléaires dont tous les membres avaient été enlevés (enfants, parents et grands-parents) et sept enfants qui avaient été kidnappés seuls et maintenus en captivité séparément. Ces enfants étaient âgés de deux à 18 ans et les femmes étaient âgées de 34 à 78 ans.

La première étude en son genre

La docteure Noa Ziv, médecin au sein de l’hôpital pour enfants Schneider. (Autorisation)

Après leur libération et leur admission à l’hôpital, l’étude note que tous les patients ont été soumis à une évaluation de leur état de santé qui a notamment consisté en des examens physiques, en des examens sanguins, en une analyse de leurs selles et en une analyse d’urine.

« Jusqu’à présent, la plus grande partie des recherches [sur les otages] se concentrait principalement sur les conséquences mentales et psychologiques de ce type de détention pour les hommes adultes et pour les soldats en captivité », note Ziv. « A notre connaissance, c’est la première étude consacrée à l’impact médical et physique de la captivité sur des enfants qui ont été enlevés et ce, dans la période immédiate de leur remise en liberté. »

Une fois à l’hôpital, une équipe multidisciplinaire, consistant notamment en professionnels de la médecine et de la psychiatrie, en diététiciens et autres, a évalué l’état général des ex-otages et les traitements à mettre en œuvre. Les dossiers de tous les captifs ont ensuite été compilés en utilisant les informations recueillies par tous les organismes concernés.

Une attention particulière a été portée à l’anticipation des problèmes médicaux susceptibles d’apparaître à l’avenir chez les ex-captifs en prenant en compte les antécédents de chacun, dans le respect du secret médical.

Les anciens otages ont fait un séjour à l’hôpital de quatre jours en moyenne. Sur les 26 otages qui ont pris part à cette étude, 18 personnes – l’équivalent de 70 % – n’avaient plus d’habitation où retourner, cette dernière ayant été incendiée par les terroristes pendant le pogrom ou la maison se trouvant dans les zones qui avaient été évacuées au début de la guerre.

Tunnels et obscurité

Tous les patients ont dit avoir souffert d’un manque d’hygiène.

Deux femmes et six enfants ont été conservés en captivité sous la surface du sol pendant la plus grande partie de leur détention. En résultat, certains d’entre eux présentaient une carence en vitamine D, une vitamine cruciale pour le corps.

La majorité d’entre eux ont raconté que leur accès à l’eau courante avait été limité lorsqu’ils se trouvaient sous le joug de leurs ravisseurs. Six avaient des poux à leur retour.

Les analyses sanguines ont révélé qu’environ 50% des otages libérés avaient développé des infections inhabituelles. Certains souffraient de borréliose récurrente à tiques et d’autres de fièvre Q, qui est transmise par l’inhalation de poussière ou par des contacts avec des animaux malades. D’autres encore affichaient, sur le corps, de nombreuses piqûres d’insectes et ils étaient touchés par de graves irritations de l’épiderme.

Cette image publiée par l’armée israélienne le 20 janvier 2024 montre l’intérieur d’un tunnel du Hamas à Khan Younès, dans le sud de Gaza, où des otages étaient détenus. (Crédit : Armée israélienne)

Ziv indique que parce que les otages étaient restés dans la même position pendant de longues périodes au cours de leur détention, les tests réalisés en laboratoire avaient montré un niveau élevé d’enzyme CPK, signalant des dégâts musculaires importants.

« Il ne bougeaient pas », dit-elle, « et une fois qu’ils ont été libérés, ils se sont plaints de douleurs musculaires ».

Pendant l’attaque et pendant leur kidnapping, 14 captifs avaient été blessés – notamment 9 par des éclats d’obus qui n’avaient pas été retirés par la suite. L’un d’entre eux avait une côte cassée et il était blessé au poumon, une blessure induisant une hémorragie. Un autre avait été blessé par balle en bas de son abdomen.

Faim et soif

Tous les otages ont raconté avoir souffert de la faim et de la soif avec une perte de poids, chez 15 d’entre eux, qui est allée jusqu’à 15% de leur masse corporelle.

Selon les récits des ex-captifs, leur alimentation consistait majoritairement en riz et en pain blanc sans légumes, sans protéines et sans graisse.

A l’hôpital, les patients ont bénéficié d’un régime nutritionnel visant à éviter le risque du syndrome de renutrition inappropriée, une maladie potentiellement mortelle entraînée par le fait de donner à un individu sous-alimenté trop de nourriture et trop de liquides trop rapidement, ce qui entraîne des troubles métaboliques et un déséquilibre électrolytique.

Ziv explique que trois très jeunes enfants ne voulaient pas manger tout ce qui leur était donné, en mettant de côté « pour plus tard ».

Les chercheuses ont découvert que la perte de poids avait été un symptôme beaucoup plus présent chez les femmes adultes et chez les adolescents que chez les jeunes enfants.

Elles ont dit croire que les adultes et les adolescents de chaque groupe et de chaque famille se sont privés d’alimentation pour pouvoir nourrir les plus jeunes.

Équipes psychologiques

Tous les enfants de sept ans avaient été retirés à leurs proches et ils ont souffert de cauchemars répétés à leur retour. Une toute petite fille qui avait été séparée de sa famille et conservée en captivité seule pendant dix jours « avait des crises de larmes non-expliquées ».

Les enfants murmuraient lorsqu’ils étaient à l’hôpital – peut-être parce qu’ils avaient pris l’habitude de suivre les instructions qui leur avaient été données par leurs geôliers, dont ils avaient très peur. Ziv déclare qu’il a fallu du temps pour que certains osent à nouveau parler normalement.

Une petite fille est revenue de captivité atteinte de trichotillomanie – un trouble qui se manifeste par l’arrachage compulsif de ses propres cheveux et qui est causé par le stress et par le désespoir.

Ziv indique qu’après avoir été relâchés, les femmes et les enfants ont été pris en charge dans des dispensaires qui les reçoivent régulièrement.

« Ce sont des effets que nous avons répertoriés après environ 50 jours de captivité », déclare Ziv. « Je m’inquiète du sort réservé aux autres otages parce qu’avec chaque jour qui passe, leur état ne pourra qu’empirer ».

Photo non-datée de quatre soldates de surveillance détenues en otage par le Hamas à Gaza, depuis le 7 octobre 2023 et diffusée par les familles, le 7 juillet 2024. De gauche à droite : Liri Albag, Agam Berger, Daniella Gilboa et Karina Ariev. Derrière elles, une photo du leader du Hamas, Ismail Haniyeh. (Autorisation)

« Même une personne jeune et saine ne peut pas survivre à des jours de faim extrême, de soif et de déshydratation, avec des infections, des blessures, des abus et des conditions environnementales très difficiles », a commenté le professeur en santé publique Hagai Levine, à la tête du Forum des Familles d’otages et de portés-disparus, auprès du journal hébréophone Maariv. « La vie des otages est en danger immédiat ».

Ziv explique que les résultats de l’étude sont compatibles avec les projections faites par les chercheuses.

« Mais dans le contexte de la situation actuelle, avoir une étude publiée au sujet des enfants israéliens qui ont été enlevés est un vrai résultat », s’exclame-t-elle, ajoutant que les effets à long-terme de leur captivité restent encore indéterminés.

La « magnitude immense du traumatisme psychologique des victimes qui ont été kidnappées ne peut pas être correctement évaluée ou correctement prise en charge à leur retour immédiat », écrivent les scientifiques dans leur étude. Elles espèrent que ces éléments révélés par l’étude « ne seront jamais à nouveau cliniquement pertinents à l’avenir, les enfants et les mères devant absolument être épargnés par ce genre de situation atroce ».

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