Israël en guerre - Jour 342

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Levin sommé par les juges d’entamer la procédure de nomination de président de la Cour

Le ministre de la Justice a eu suffisamment de temps pour parvenir à un "large consensus", dit la Haute Cour, et ne se dérobera pas à son devoir

Le ministre de la Justice Yariv Levin assistant à une cérémonie de prestation de serment pour les juges nouvellement nommés aux côtés du président par intérim de la Cour suprême Uzi Vogelman, à la résidence présidentielle, à Jérusalem, le 23 juin 2024. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)
Le ministre de la Justice Yariv Levin assistant à une cérémonie de prestation de serment pour les juges nouvellement nommés aux côtés du président par intérim de la Cour suprême Uzi Vogelman, à la résidence présidentielle, à Jérusalem, le 23 juin 2024. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)

La Haute Cour de justice a sommé mardi le ministre de la Justice, Yariv Levin, de procéder à la nomination d’un nouveau président et de deux nouveaux juges de la Cour suprême par un vote au sein de la commission de sélection des juges, et de lancer le processus préparatoire à ce vote « dans les jours à venir ».

La Cour a souligné avoir accordé à Levin un « délai substantiel » pour parvenir à « consensus large » pour la nomination d’un nouveau président, qui est, selon le ministre, essentiel en temps de guerre. Cependant, ces efforts ayant échoués, la Cour estime « qu’il ne peut plus échapper » à convoquer la commission pour procéder aux nominations selon les majorités requises par la loi : cinq voix sur neuf pour le président de la Cour suprême et sept voix sur neuf pour un juge.

Bien que la décision ne soit pas encore définitive, elle semble indiquer que les efforts déployés depuis onze mois par Levin pour remodeler la Cour dans une direction conservatrice stricte en usant de ses pouvoirs de ministre sont sur le point d’échouer.

La décision n’est pas encore contraignante, car il ne s’agit pas d’une décision finale. Cependant, les trois juges chargés de l’affaire ont averti Levin qu’un jugement définitif serait rendu en septembre « si cela s’avérait nécessaire ».

Une source proche de Levin a condamné la décision, affirmant que la Cour avait un conflit d’intérêts en statuant sur la question, et l’a accusée de soustraire de façon illégale le contrôle de la commission de sélection des juges à l’autorité du ministre.

Un porte-parole de Levin a refusé de dire si le ministre respecterait la décision et convoquerait la commission. Toutefois, selon la chaîne publique Kan, c’est probablement ce qu’il fera, mais en boycottant le probable prochain président de la Cour suprême, Isaac Amit.

Pareille situation risquerait de considérablement perturber le fonctionnement du système judiciaire, puisque le ministre de la Justice et le président de la Cour suprême se doivent de se mettre d’accord sur des questions essentielles, telles que la nomination des présidents des tribunaux de première instance et des tribunaux d’arrondissement. Cela pourrait également conduire à une plus grande implication de la Haute Cour dans le fonctionnement pratique du système judiciaire.

La juge de la Haute Cour Yaël Wilner (au centre) assistant à une audience sur un recours demandant à la commission de sélection des juges de nommer les juges de la Cour suprême, à Jérusalem, le 18 juillet 2024. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Dans le cadre de son programme de réforme judiciaire visant à renforcer le contrôle du gouvernement sur le pouvoir judiciaire, Levin a refusé de nommer un nouveau président de la Cour suprême depuis que l’ancienne présidente Esther Hayut a pris sa retraite en octobre de l’année dernière, préférant confier les rênes de la plus haute juridiction israélienne au juge Yosef Elron, un conservateur pur et dur.

La nomination d’Elron à la présidence de la Cour suprême bouleverserait le principe d’ancienneté, en place depuis la création de la Cour, qui veut que le juge le plus ancien soit nommé président. Le président par intérim de la Cour suprême, Uzi Vogelman, a refusé d’approuver cette nomination.

En raison de la majorité libérale au sein de la commission de sélection des juges, Levin a bloqué la tenue d’un vote pour la nomination d’un nouveau président, arguant que cette décision nécessitait un « large consensus » en temps de guerre.

Levin a également refusé de pourvoir les postes laissés vacants par les juges Hayut et Anat Baron, toutes deux parties à la retraite en octobre.

La Cour suprême n’a jamais été privée de président pendant plus de quelques semaines, et la seule fois où cela s’est produit, en 1965, cela était pour des raisons techniques.

La décision du tribunal de mardi a été prise en réponse à une pétition du Mouvement pour un gouvernement de qualité en Israël, un groupe de surveillance libéral, qui affirmait que la position de Levin lui donnait illégalement un droit de veto sur les nominations à la Cour suprême.

Parmi les trois juges qui ont statué à l’unanimité dans la décision de mardi, Yael Wilner et Alex Stein sont des conservateurs et Ofer Grosskopf un libéral. Le juge Vogelman et la juge Daphne Barak-Erez ont été exclus du panel car, en tant que membres de la commission de sélection des juges, ils se trouvaient en situation de conflit d’intérêts.

Les juges de la Cour suprême Yosef Elron et Isaac Amit, à Jerusalem, le 7 septembre 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Lundi, Levin a officiellement soumis à la Haute Cour une proposition de compromis comportant deux options. La première aurait vu Elron être nommé président de la Cour pour un an, jusqu’à ce qu’il prenne sa retraite, suivi par Amit.

La seconde option consistait à confier la présidence à Amit en échange de la nomination à la Cour suprême de l’un des deux juristes extrêmement conservateurs, sources d’inspiration du programme de refonte judiciaire de Levin.

Vogelman a refusé les deux propositions, ce qui a conduit à l’impasse actuelle.

Dans leur décision rendue mardi, les trois juges ont indiqué qu’ils avaient accordé à Levin un délai considérable pour parvenir au « large consensus » qu’il disait rechercher concernant les nominations.

« Maintenant qu’il est évident que cela n’a pas apporté de solution, il est clair et incontestable qu’il n’y a pas d’autre choix que de recourir au mécanisme décisionnel pour nommer les juges de la Cour suprême et son président », a poursuivi la cour.

« Nous exprimons l’espoir que le ministre [Levin] agira dans les prochains jours pour mettre en œuvre cette compréhension, en utilisant l’autorité qui lui est conférée par l’article 7(a) de la Loi sur les tribunaux pour activer ce mécanisme décisionnel. »

Un proche de Levin a réagi en affirmant que la décision de la Cour suprême représentait un « conflit d’intérêts » et avait été prise « sans autorité », ajoutant que « les juges se jugent eux-mêmes ».

La source a également déclaré : « Ils sont en réalité en train de s’emparer du contrôle total de la Commission de sélection des juges, refusant d’accepter quiconque n’est pas ‘des leurs’, ce qui ne fait que prouver à quel point la refonte [du système judiciaire] est justifiée. »

Une photo fournie par un activiste anti-refonte judiciaire montrant des milliers de personnes manifestant avec une pancarte indiquant « La Cour est suprême », à Tel Aviv, le 9 septembre 2023. (Crédit : Gilad Furst)

Le ministre des Finances d’extrême droite, Bezalel Smotrich, a qualifié la décision de « coercitive et de source de division » et a affirmé que les juges rejettent « avec arrogance toute proposition de compromis et ignorent la perte de confiance de la majorité de la population dans le système judiciaire », ce qui, selon lui, « ne fait que prouver la nécessité de réformer le système judiciaire ».

Le ministre des Communications, Shlomo Karhi, est allé encore plus loin en appelant Levin à désobéir à l’arrêt de la Haute Cour, ce qui pourrait créer une crise constitutionnelle entre l’exécutif et le judiciaire.

« Même si un jugement aussi délirant est émis, le ministre de la Justice doit agir conformément à ses pouvoirs selon la loi et ne pas écouter ceux qui tentent d’en altérer les fondements, et certainement pas démissionner de son poste. Nous devons être forts et déterminés face à la tentative de prise de contrôle hostile de la démocratie et de la loi israéliennes par des personnes non élues », a tweeté Karhi.

Les dirigeants de l’opposition ont, quant à eux, applaudi la décision. Le chef de l’opposition, Yair Lapid, a dénoncé ce qu’il a qualifié de tentative de « coup d’État » de la part du ministre de la Justice, accusant ce dernier de vouloir « démanteler la démocratie israélienne ».

Gideon Saar, leader de Tikva Hadasha, a pour sa part affirmé que « s’écarter de la règle non écrite de l’ancienneté ne saurait être justifié, car cela risque de politiser la Cour suprême ».

Il a toutefois ajouté qu’un compromis sur les nouvelles nominations à la Cour suprême serait souhaitable et a affirmé « qu’aucune catastrophe ne se produirait » si l’un des candidats radicalement conservateurs de Levin était nommé juge.

Le leader de Yisrael Beytenu, Avigdor Liberman, a vivement critiqué Levin et déclaré « qu’au lieu de se concentrer en temps de guerre sur des questions qui unissent le peuple et soulignent ce que nous avons en commun, le gouvernement se concentre exclusivement sur des questions controversées qui menacent de briser la société israélienne, comme le mont du Temple et la réforme judiciaire ».

Sam Sokol a contribué à cet article.

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