Israël en guerre - Jour 346

Rechercher

Levin veut nommer un juge conservateur à la tête de la Cour suprême pendant un an

Le président par intérim Uri Vogleman a fustigé cette proposition et accuse le ministre de la Justice de "porter atteinte au bon fonctionnement du système judiciaire" dans une grave période de crise

Le ministre de la Justice Yariv Levin assistant à une cérémonie de prestation de serment pour les juges nouvellement nommés à la résidence présidentielle, à Jérusalem, le 23 juin 2024. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)
Le ministre de la Justice Yariv Levin assistant à une cérémonie de prestation de serment pour les juges nouvellement nommés à la résidence présidentielle, à Jérusalem, le 23 juin 2024. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)

Dans un contexte de processus de désignation d’un nouveau président de la Cour suprême actuellement dans l’impasse, le ministre de la Justice Yariv Levin a proposé au tribunal, lundi, de nommer le magistrat conservateur Yosef Elron à la tête de la plus haute instance judiciaire israélienne pendant un an – le juge libéral Isaac Amit prenant sa place lors de son départ. Une offre qui a été rejetée par le président intérimaire de la Cour, Uzi Vogelman.

Cela fait presque douze mois que Levin a bloqué la nomination officielle d’Amit, qui devait être désigné comme nouveau président après le départ à la retraite d’Esther Hayut qui occupait cette fonction, sur la base d’un processus de sélection fondé sur l’ancienneté (Vogelman siège depuis plus longtemps au sein de la plus haute instance judiciaire d’Israël qu’Amit – ce qui explique pourquoi il est son dirigeant par intérim – mais il a prévu de prendre sa retraite au mois d’octobre, cette année, avec pour conséquence qu’il n’aurait passé qu’un an et demi à son nouveau poste).

Le ministre s’oppose à la nomination d’Amit, un libéral, et cela fait longtemps qu’il cherche à renforcer l’influence du gouvernement sur la Cour. Il avait essayé de le faire par le biais de son projet de refonte radicale du système judiciaire israélien, dorénavant gelé, qui avait profondément divisé la société israélienne pendant toute l’année 2023 – avant le pogrom qui avait été commis par les hommes armés du Hamas sur le sol israélien, le 7 octobre, et le coup d’envoi de la guerre à Gaza.

Levin a soumis cette proposition alors que des requêtes ont été déposées à son encontre devant la même Haute-Cour – des requêtes qui dénoncent son refus de réunir la Commission de sélection judiciaire qui serait chargée de désigner un nouveau premier magistrat. Levin perdrait un éventuel vote sur le sujet, la majorité des membres du panel apportant leur soutien à Amit sur la base de son ancienneté.

Au début du mois, la Cour avait donné à Levin jusqu’au lundi 27 août, dernier délai, pour sortir de l’impasse et pour trouver un moyen de mener à bien le processus de désignation d’un nouveau président.

Notant que Levin a aussi refusé de prendre part à des réunions de travail à ses côtés depuis le début du mois de juin, affirmant que ce refus empêchait à de nombreuses affaires pressantes présentées devant les juges d’être gérées de manière appropriée, Vogelman a écrit que « pendant cette période difficile et éprouvante pour le pays et pour ses citoyens, votre conduite porte atteinte au bon fonctionnement du système judiciaire. »

Tous les magistrats qui siègent à la Haute-cour de justice sont dans l’obligation de prendre leur retraite à l’âge de 70 ans. L’offre faite par Levin – qui a évoqué « une offre de compromis » – permettrait à Elron de devenir président de la Cour suprême jusqu’au mois de septembre 2025, date à laquelle il devra prendre sa retraite. Il cèderait ensuite sa place à un nouveau président en titre de la Haute Cour qui serait alors choisi par les membres de la Commission de sélection judiciaire – ce serait probablement Amit. Ces deux nominations seraient faites simultanément.

De plus, l’offre de Levin prévoit que la commission actuellement dans l’impasse nommerait trois nouveaux magistrats au sein de ce tribunal qui en compte quinze : un serait désigné par le gouvernement et par les représentants de la Knesset au sein de la Commission ; l’autre serait choisi par les représentants du système judiciaire et le troisième serait « un candidat du consensus », sélectionné par les juges officiant dans les Cours de district.

Vogelman a fustigé l’offre faite par le ministre de la Justice, affirmant que le système de l’ancienneté – qui garantit la promotion d’Amit à la tête de la Haute-cour – visait « à protéger l’indépendance du système judiciaire et à prévenir toute politisation des juges et du président de la Haute cour de justice ».

« Dans ce sens, une offre basée sur l’annulation de la méthode de l’ancienneté ne représente pas un progrès quel qu’il soit », a ajouté Vogelman. « De surcroît », a-t-il continué, la nomination simultanée de deux présidents de la Cour « pose d’importantes difficultés au niveau juridique ».

De manière notable, si aucun accord ne devait être trouvé au moment où Vogelman se retirera, au mois d’octobre, c’est Amit qui deviendra automatiquement président du tribunal.

La Haute-cour avait ordonné à Levin et à la commission de sélection judiciaire de trouver un compromis, au mois de juillet, dans le sillage du refus opposé par le ministre de la Justice de réunir le panel dans le but de procéder à un vote désignant le nouveau président.

Les juges de la Cour suprême Yosef Elron et Isaac Amit lors de l’examen d’un recours contre le limogeage du directeur de la société postale israélienne, Mishael Vaknin, le 7 septembre 2023. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

Présentant son « offre équitable », Levin avait écrit à Vogelman que « les journées difficiles et éprouvantes » que connaît actuellement Israël « nous imposent à tous de nous livrer à des efforts suprêmes pour trouver un accord. »

« Je souligne qu’il n’est pas facile pour moi de faire cette offre mais je pense qu’elle est nécessaire pour trouver enfin un arrangement », avait-il ajouté.

En réponse, Vogelman a estimé que « malgré une proposition qui semble équitable », l’offre faite par Levin de désigner trois nouveaux juges « porte atteinte, dans les faits, à l’égalité entre les membres de la Commission de sélection judiciaire et rend le vote de certains de ses membres superflu ».

La méthode de l’ancienneté, a écrit Vogelman, « a fait ses preuves depuis la fondation de l’État et vous avez parfaitement conscience, de votre côté, du fait que notre positionnement est favorable au maintien » de ce système.

Selon cette méthode – qui est devenue coutumière même si elle n’est pas inscrite dans la loi – la Commission de sélection judiciaire choisit comme président le juge ayant siégé le plus longtemps au sein de l’instance.

Le vice-président de la Cour suprême, Uzi Vogelman, arrive à une audience de la Cour suprême, le 27 mars 2024. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

La commission est formée de deux députés – un est issu de la coalition et l’autre de l’opposition – et deux ministres, y-compris le ministre de la Justice. Viennent s’ajouter à eux trois magistrats de la Haute Cour et deux représentants de l’Association israélienne du Barreau.

Les nominations à la Haute cour nécessitent une super-majorité de sept parmi les neuf membres de la Commission, ce qui rend impossible pour les cinq représentants du système judiciaire de sélectionner un juge sans avoir recours aux politiciens.

Les partisans de la méthode d’ancienneté estiment qu’elle empêche ainsi d’éventuels magistrats en quête de promotion de prêter allégeance aux politiciens.

Levin, qui avait avancé un plan de refonte radicale du système judiciaire au début de l’année 2023 – il bouleversait en profondeur son indépendance et sa capacité à intervenir dans les législations et dans les décisions prises par le gouvernement – cherche à renverser ce système basé sur l’ancienneté, en écho à l’argument avancé par les politiciens de la droite de l’échiquier politique qui affirment qu’il renforce un système judiciaire bien ancré qui fait preuve de partialité à leur encontre.

La présidente de la Cour suprême, Esther Hayut, lors d’une audience de la Haute Cour de justice sur les recours déposés contre la loi de « récusation » d’un Premier ministre, à la Cour suprême de Jérusalem, le 28 septembre 2023. (Crédit : Chaïm Goldberg/Flash90)

Le président de la Haute cour, en Israël, choisit les juges qui siègeront lors des audiences dans les différents dossiers qui lui sont présentés et les membres des commissions d’enquête d’État – ce qui donnerait une influence considérable au prochain président dans le cadre de l’enquête officielle attendue qui devrait être consacrée aux échecs qui ont permis au 7 octobre d’avoir lieu, ainsi que dans le procès pour corruption du Premier ministre Benjamin Netanyahu.

Le Premier ministre a dit s’opposer à l’ouverture d’une enquête sur le pogrom tant que les combats ne seront pas terminés. Les critiques l’accusent de reporter le lancement d’investigations par crainte que ces dernières ne révèlent tous ses manquements dans la période qui avait précédé la catastrophe.

Jeremy Sharon a contribué à cet article.

En savoir plus sur :
S'inscrire ou se connecter
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
Se connecter avec
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation
S'inscrire pour continuer
Se connecter avec
Se connecter pour continuer
S'inscrire ou se connecter
Se connecter avec
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un email à gal@rgbmedia.org.
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.
image
Inscrivez-vous gratuitement
et continuez votre lecture
L'inscription vous permet également de commenter les articles et nous aide à améliorer votre expérience. Cela ne prend que quelques secondes.
Déjà inscrit ? Entrez votre email pour vous connecter.
Veuillez utiliser le format suivant : example@domain.com
SE CONNECTER AVEC
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation. Une fois inscrit, vous recevrez gratuitement notre Une du Jour.
Register to continue
SE CONNECTER AVEC
Log in to continue
Connectez-vous ou inscrivez-vous
SE CONNECTER AVEC
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un e-mail à .
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.