L’ex-otage Aviva Siegel raconte les abus sexuels et violences du Hamas envers les otages
Selon Siegel, dont le mari Keith est otage, les terroristes habillent les jeunes femmes otages en « poupées » et les regardent se laver ; le monde "n'a pas compris la leçon de la Shoah"
Après avoir passé 51 jours en captivité entre les mains du Hamas, Aviva Siegel fait inlassablement campagne pour les otages encore à Gaza. Dans une interview pour la Douzième chaine diffusée vendredi, elle revient sur l’humiliation et les violences sexuelles infligées par le groupe terroriste palestinien.
Âgée de 62 ans et enlevée par des terroristes du Hamas en même temps que son mari Keith, à leur domicile du kibboutz Kfar Aza, le 7 octobre dernier, elle évoque les violences sexuelles subies par les femmes otages, pour lesquelles elle a pris fait et cause depuis sa libération à la faveur du cessez-le-feu de novembre.
Le jour de l’attaque brutale du Hamas, des terroristes ont fait irruption dans la maison des Siegel à Kfar Aza et les ont conduits à Gaza à bord de leur propre voiture. Pour faire avancer le couple, les terroristes ont bousculé Keith, auquel ils ont cassé des côtes.
Elle explique que dans l’un des treize endroits où son mari et elle ont été détenus – un tunnel très peu ventilé – ils n’avaient pas assez d’oxygène pour ne serait-ce que parler. On les laissait croupir dans ces tunnels pendant que les gardes du Hamas faisaient des pauses en surface pour respirer de l’air frais.
Au bout de quelques jours, les otages ont demandé à leurs geôliers ce qu’ils devaient faire s’ils sentaient qu’ils ne pouvaient plus respirer, ce à quoi on leur a répondu d’appeler à l’aide. Siegel se rappelle que Keith a crié à plusieurs reprises, en vain.
Siegel revient également sur le manque de nourriture dont souffrent les otages, qui restent parfois des jours sans manger ni boire, et de leurs geôliers qui font mine de ne pas comprendre les demandes de nourriture.
Siegel se rappelle qu’un de ses compagnons d’infortune lui a un jour dit, à propos du pain qu’elle avait caché, qu’il serait rapidement couvert de moisissure, ce à quoi elle a répondu : « Ne t’inquiète pas, je le mangerai avec les moisissures. »
Siegel évoque par ailleurs la manière dont les terroristes habillent les jeunes otages avec des vêtements minuscules, les transformant en « poupées – marionnettes », que les gardes armés « passaient leur temps à regarder, inlassablement ».
On avait remis à une femme des vêtements tellement moulants qu’elle ne pouvait même pas plier les genoux.
Siegel se rappelle que lorsque « trois filles particulièrement jeunes » ont pu prendre une douche, c’était à la condition qu’elles le fassent en même temps, la porte ouverte et sous le regard des terroristes.
Selon Siegel, une jeune otage menacée d’une arme a reçu l’ordre d’accompagner un des gardes, qui l’a tirée par les cheveux et l’a fait tomber de la frapper avec un bâton avec trois autres terroristes.
« Ils l’ont frappée sur tout le corps : elle n’a pas dit un mot », se rappelle Siegel. « Quand elle est revenue, je lui ai demandé : « Comment as-tu fait pour ne pas crier ? », ce à quoi elle m’a répondu : « Je ne voulais pas leur donner la satisfaction [de savoir] qu’ils me faisaient mal. »
Siegel dit que les gardes leur répétaient à quel point cela leur plaisait de harceler les otages, pointant fréquemment des armes sur eux et menaçant de tirer avant d’éclater de rire.
Un jour, Keith a continué de parler alors que l’un des gardes lui avait dit de se taire : alors, un terroriste l’a menacé d’une arme à feu et a approché des menottes de son visage, « sans que l’on sache trop si c’était pour plaisanter, car il était énervé », raconte Siegel. « Après cela, Keith a déprimé pendant des jours. Il parlait à peine et nous pleurions en nous cachant. »
Au bout de 50 jours, les terroristes du Hamas ont bandé les yeux des Siegel et les ont conduits dans un nouvel lieu, où ils ont séparé Keith d’Aviva, qui – elle ne le savait pas encore – allait être libérée le lendemain.
« [Le garde du Hamas] vient dans ma chambre, se met à genoux et me dit : « Toi, demain, Israël », ce à quoi je lui réponds : « Non, non, non, non, non, non, Keith et moi. » Il me dit : « Tu pars maintenant. Israël, ton nom. Keith, demain. » Siegel demande à voir Keith, ce que le terroriste refuse : elle le repousse et parvient à s’approcher de son mari.
En contenant difficilement ses larmes, Siegel se remémore ses derniers instants avec Keith, qui n’a pas été libéré.
« Je l’ai regardé et je lui ai dit que je devais partir ; je l’ai serré dans mes bras, et c’est comme ça que je l’ai quitté », confie-t-elle.
A cause du manque d’oxygène, ses gardes craignaient qu’elle ne parvienne pas à monter les escaliers pour sortir du tunnel où elle était retenue prisonnière, à 40 mètres sous terre.
« J’ai couru », se souvient-elle.
Sur le chemin du retour, Siegel se souvient d’une otage âgée, Elma Avraham, qui était dans un état critique. Siegel la frictionnait sans arrêt pour lui apporter un peu de chaleur.
« Il n’est pas impossible que si vous n’aviez pas été là, elle ne serait plus avec nous », dira à Siegel, depuis l’hôpital, le fils d’Avraham, Uri Ravitz, en parlant de la convalescence de sa mère. « J’ai bien l’impression que c’est à toi que je lui dois d’être encore en vie. »
Ilan, la fille de Siegel, a déclaré à la Douzième chaine que lorsque sa mère a été libérée, toute la famille pensait que leur père suivrait rapidement.
Aviva souligne qu’au début, elle gardait pour elle les détails de ce qui s’était passé en captivité, pour que ce soit son mari qui en parle, persuadée que sa libération était imminente.
Le jour de sa libération, Siegel a été très soulagée d’apprendre que son fils Shai, qui vivait également à Kfar Aza, avait survécu au massacre du 7 octobre. Pendant tout le temps de sa captivité, elle avait pensé qu’il était mort parce qu’il n’était pas dans le tunnel avec elle et les autres otages de Kfar Aza.
Se rappelant le silence de sa grand-mère à propos de ce qu’elle avait vécu durant la Shoah, Siegel explique son choix de ne pas se taire sur ce qu’a été son calvaire. « Les gens doivent savoir ».
Lorsqu’on lui a demandé si elle se considérait comme une survivante de la Shoah, Siegel a simplement répondu : « J’ai survécu. »
« J’ai le sentiment que le monde n’a rien dit et qu’en permettant qu’une telle chose se produise, personne n’a retenu la leçon d’histoire de la Shoah. »
C’est la première interview de Siegel à la télévision israélienne depuis sa libération. Lorsqu’elle était otage, Siegel se refusait à écouter le récit des atrocités commises le 7 octobre, et après sa libération, elle a un moment gardé le silence sur son calvaire, mais elle fait désormais entendre la voix des otages lors de manifestations publiques, d’audiences parlementaires et d’autres forums, en évoquant dans le détail les violences sexuelles infligées par ses ravisseurs du Hamas.
Lors d’une audience à la Knesset le 9 janvier dernier, Siegel s’est souvenue qu’à un moment donné de leur captivité, une jeune otage était revenue des toilettes, l’air totalement désemparée. Lorsqu’elle s’était approchée d’elle pour tenter de la réconforter, le terroriste qui les gardait l’en avait empêchée.
« Elle était renfermée, silencieuse, plus vraiment la même », explique Siegel. « Et pardonnez-moi ces grossièretés, mais ce fils de pute l’avait touchée. Et il ne m’a même pas laissé la prendre dans mes bras après ça. C’est terrible, tout simplement terrible. Je lui ai dit que j’étais désolée. »
Le 23 janvier, Siegel est retournée à la Knesset pour prendre de nouveau la parole devant le comité nouvellement créé sur les victimes de violences sexuelles et sexistes lors de la guerre contre le Hamas.
Aviva et Keith Siegel vivaient à Kfar Aza depuis une quarantaine d’années.
Aviva, également connue sous le nom d’Adrienne, est née en Afrique du Sud et arrivée en Israël à l’âge de 8 ans. Keith est lui originaire des États-Unis. Ils se sont rencontrés au kibboutz Gezer, où Keith, qui travaille dans l’industrie pharmaceutique, était venu faire du bénévolat, et Aviva, aujourd’hui enseignante de maternelle, faisait une année de service communautaire avant l’armée. Ils ont quatre enfants et cinq petits-enfants.
Le 7 octobre, des milliers d’hommes armés dirigés par le groupe terroriste palestinien ont pris d’assaut Kfar Aza et d’autres communautés du sud d’Israël dans lesquelles ils ont tué avec une grande brutalité et de multiples violences sexuelles près de 1 200 personnes, principalement des civils, et fait 253 otages de tous âges. On estime désormais à 80 le nombre de membres du kibboutz Kfar Aza qui ont trouvé la mort et 18 celui des otages.
L’assaut brutal du Hamas a déclenché une guerre à Gaza au cours de laquelle près de la moitié des habitations de la bande de Gaza ont été détruites et qui a entraîné le déplacement de plus d’un million de personnes, dont beaucoup sont exposées à un risque élevé de famine.
Selon le ministère de la Santé de la bande de Gaza, contrôlé par le Hamas, plus de 28 000 Palestiniens ont été tués lors des hostilités. Ce chiffre, qui ne peut être vérifié de manière indépendante, ne fait pas le distinguo entre civils et hommes armés. L’armée israélienne revendique pour sa part la mort de 10 000 hommes armés.
Sam Sokol a contribué à cet article.