Liban : décès de l’ancien chef quasi centenaire de l’Eglise maronite
Nasrallah Boutros Sfeir avait critiqué le Hezbollah, le qualifiant en 2010 d'"anomalie" dans le paysage politique local, en raison de son refus de rendre les armes
L’ancien patriarche maronite du Liban, Nasrallah Boutros Sfeir, figure respectée qui joua un rôle incontournable dans la vie politique et fut un ardent partisan du retrait de la Syrie, est décédé dimanche, à quelques jours de ses 99 ans.
Mgr Sfeir était devenu en 1986 le chef de la plus grosse communauté chrétienne du Liban, un pays alors déchiré par une guerre civile meurtrière à caractère confessionnelle qui a opposé 15 années durant ses milices (1975-90).
« Patriarche d’Antioche et de tout l’Orient », il avait présenté sa démission au Vatican en 2011 à l’âge de 90 ans, en raison de sa santé déclinante.
A sa démission, ce 76e patriarche maronite, nommé cardinal en 1994 par le pape Jean-Paul II, avait été remplacé par Béchara Boutros Rahi.
L’ancien chef de l’Eglise maronite, qui devait fêter ses 99 ans le 15 mai, est mort à 03H00 du matin dimanche « après plusieurs jours de soins intensifs », a indiqué dans un communiqué l’Eglise maronite.
Dans un communiqué distinct diffusé par l’agence officielle ANI, son successeur l’a qualifié d' »icône » de sa fonction et de « pilier de la nation ». « L’Eglise maronite et le Liban sont en deuil », a-t-il ajouté.
Le gouvernement libanais a décrété deux jours de deuil national, mercredi et jeudi prochains, a indiqué l’ANI.
Dans son hommage, le Premier ministre Saad Hariri a salué un « symbole national dont la voix ne s’est jamais tarie pour soutenir la souveraineté et l’indépendance » du Liban.
Le chef de l’Etat, Michel Aoun, a dit regretter « la perte d’un des plus éminents patriarches » de l’histoire de l’Eglise maronite.
L’annonce de sa mort dimanche matin a suscité une vague de réactions sur les réseaux sociaux.
Né en 1920 à Rayfoun, un village de la région du Kesrouan (nord-est de Beyrouth), Mgr Sfeir a étudié la théologie et la philosophie.
Il avait fait de l’indépendance du pays son cheval de bataille, prenant ouvertement position contre la mainmise de la Syrie qui a maintenu plusieurs milliers de soldats au Liban, même après la fin de la guerre civile.
Critique du Hezbollah
C’est notamment à son appel en 2000 que le mouvement opposé à la tutelle syrienne, en place depuis trois décennies, a commencé à prendre de l’ampleur, jusqu’au retrait des troupes syriennes en 2005, dans la foulée de l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri.
« Son plus grand combat a été de mettre fin à la présence syrienne au Liban, ce que nous pensions tous être quelque chose d’impossible à cause des divisions », a indiqué à l’AFP son biographe Antoine Saad.
« Mais il y a travaillé de manière méthodique, objective, avec calme et méticulosité », a-t-il ajouté.
Au cours des années qui ont précédé sa démission, l’ancien chef de l’Eglise maronite a également critiqué le Hezbollah, puissant groupe terroriste chiite appuyé par Téhéran, le qualifiant en 2010 d' »anomalie » dans le paysage politique local, en raison de son refus de rendre les armes.
La communauté maronite compte toujours plusieurs centaines de milliers de fidèles, même si elle a été affaiblie par l’exode massif de ses membres durant la guerre civile.
Plusieurs postes clés au sein de l’Etat libanais lui sont réservés par la constitution, dont notamment la présidence de la République.