Lily Ebert, iconique survivante de la Shoah, s’éteint à 100 ans
Originaire de Hongrie, cette superstar des réseaux sociaux a survécu à Auschwitz et a fondé une famille - d'abord dans l'État d'Israël naissant, puis au Royaume-Uni
Lily Ebert, iconique survivante de la Shoah, qui est devenue un phénomène mondial en utilisant les réseaux sociaux pour enseigner la Shoah, est décédée cette semaine à l’âge de 100 ans, a annoncé son arrière-petit-fils mercredi sur les réseaux sociaux.
Elle s’est éteinte paisiblement à son domicile londonien, entourée des membres de sa famille, a écrit Dov Forman dans un message publié sur Facebook.
Ayant perdu sa mère, sa sœur cadette et son frère au cours de la Shoah, Lily a consacré sa vie à l’enseignement du génocide en l’honneur de ceux qui ont péri, touchant des centaines de millions de personnes dans le monde, a-t-il écrit.
Malgré son âge, elle a embrassé les réseaux sociaux avec l’aide de Forman. Les deux ont collaboré sur TikTok pour promouvoir les leçons tirées de la Shoah, regroupant un large public.
« Jamais une promesse n’a été aussi profondément tenue que la sienne », a-t-il écrit.
« Elle nous a enseigné le pouvoir de la tolérance et de la foi, l’importance de s’exprimer et la nécessité de se dresser contre les préjugés. »

Après avoir survécu à Auschwitz-Birkenau, où elle avait été envoyée en juillet 1944, Lily a pu reconstruire sa vie et a fondé une famille de trois enfants, dix petits-enfants, 38 arrière-petits-enfants et un arrière-petit-enfant. L’une de ses filles l’a précédée dans la tombe.
Elle a raconté son histoire remarquable dans La promesse de Lily : comment j’ai survécu à Auschwitz et trouvé la force de vivre et a reçu plusieurs prix pour son travail d’éducation sur la Shoah.
Née à Bonyhad, en Hongrie, le 29 décembre 1923, Lily a vécu avec ses parents et ses cinq jeunes frères et sœurs, jusqu’à ce que son père soit emporté par une pneumonie en 1942.
Lorsque les nazis ont envahi le pays en 1944, Lily, âgée de 20 ans, et sa famille ont été arrachées à leur foyer et déportées à Auschwitz-Birkenau. Le seul membre de la fratrie qui n’a pas été envoyé à Auschwitz est le frère de Lily, Imi, qui a été enrôlé de force dans l’un des bataillons de travail juifs de Hongrie.
À son arrivée au camp de concentration, Lily a été séparée de son frère Bela, de sa sœur Berta et de sa mère Nina, qui ont été immédiatement envoyés dans les chambres à gaz.
Elle et ses deux sœurs restantes, Renée et Piri, ont été sélectionnées pour travailler dans le camp pendant quatre mois. Après cette période, elles ont été transférées dans une usine de munitions. Elles y ont travaillé jusqu’en 1945, date à laquelle elles ont été libérées par les forces alliées au cours d’une marche de la mort.
Après avoir passé du temps dans un camp de personnes déplacées géré par les Américains, Lily et ses sœurs ont cherché refuge en Suisse. Cependant, même là, elle ne se sentait pas la bienvenue. Elle a essayé d’informer les gens qu’elle rencontrait sur la Shoah, mais ils ne l’écoutaient pas, avait-elle raconté.
« Le monde ne voulait pas savoir », avait-elle déclaré dans une interview accordée au Times of Israel en 2021. On ne voulait pas de ses histoires, on ne voulait pas de son désir de changement, on ne voulait pas d’elle.

Finalement, elle a décidé que rester en Europe n’était plus une option. Aidées par Agudat Yisrael en 1946, les trois sœurs ont immigré en Palestine sous mandat britannique, où Lily a rencontré et épousé son mari Shmuel, avec qui elle a eu trois enfants. En 1953, Lily est enfin réunie avec son frère Imi, qui a également survécu à la guerre.
En 1967, Lily et sa famille retournent en Europe et s’installent à Londres, où elle restera jusqu’à sa mort.
Ces dernières années, Lily et son arrière-petit-fils ont ouvert des comptes sur TikTok et Instagram, répondant aux questions et éduquant leur public sur la Shoah. Sur ces deux plateformes, le binôme compte plus de 2 millions d’abonnés et a accumulé plus d’un milliard de vues individuelles.
Outre sa popularité sur les réseaux sociaux, Lily a également été largement décorée. Elle a reçu la médaille de l’Empire britannique en 2016 pour son travail d’éducation et de sensibilisation à la Shoah.
Lily Ebert was an inspirational woman, who committed her life to telling the world and future generations about the horrors of the Holocaust.
We thank her for her years of service and I send my deepest condolences to Dov and his family. https://t.co/jXLiIVD1ZV pic.twitter.com/Ix6obkUVRU
— Priti Patel MP (@pritipatel) October 9, 2024
En 2022, elle a reçu la Croix de Chevalier de l’Ordre du Mérite de Hongrie et a été lauréate du premier Prix Simon Wiesenthal. Le Parlement autrichien lui a également décerné un prix pour son engagement civique contre l’antisémitisme.
En 2023, elle a été nommée membre de l’Ordre de l’Empire britannique pour ses services rendus à l’enseignement du Shoah.
Les hommages à Lily ont afflué à l’annonce de son décès. Michael Newman, directeur-général de l’Association des réfugiés juifs, a qualifié Lily de « pionnière de l’enseignement de la Shoah » dont « la joie de vivre brûlera dans nos pensées ».
Karen Pollock, qui dirige le Holocaust Educational Trust, a salué en Lily « l’incarnation de la force et de la détermination ».
Le grand rabbin du Royaume-Uni, Sir Ephraïm Mirvis, a écrit sur le réseau social X que Lily était « un phare de résilience, de courage et de foi inébranlable dans les moments difficiles ».
« Elle est sortie des horreurs indicibles d’Auschwitz, non pas avec amertume ou cynisme, mais avec une promesse : témoigner, éduquer et inspirer », a-t-il ajouté.
« Dans un monde qui a plus que jamais besoin de tirer les leçons de la Shoah, puisse le souvenir de la vie extraordinaire de Lily être à jamais une bénédiction. »
Parmi les autres personnes qui ont fait l’éloge de Lily dans des déclarations, on peut citer l’ambassade de Hongrie au Royaume-Uni, l’historien juif Simon Sebag Montefiore, la députée britannique Priti Patel et l’ancien porte-parole du gouvernement israélien Eylon Levy.
Les funérailles de Lily auront lieu mercredi à 15h45, heure de Londres, et son corps sera enterré jeudi en Israël. Sa famille fera shiva – semaine de deuil traditionnelle – à Londres et à Jérusalem jusqu’à vendredi après-midi.